Diminution des coûts des bâtiments dans les éco-quartiers

Par Alain GARNIER ingénieur et directeur du bureau d'études GARNIER à Reims.



Les éco-quartiers pourraient soulager le coût des bâtiments futurs et des bâtiments rénovés, ainsi que leurs charges ! Voilà une affirmation qui mérite démonstration et pédagogie avant tout.



Qu’est-ce qu’un éco-quartier ?

Si on se réfère au site du Ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, un éco-quartier a pour ambition de favoriser une nouvelle façon de concevoir, construire, faire évoluer et gérer la ville et touche à tous les aspects de l’aménagement durable (eau, déchets, biodiversité, mobilité, sobriété énergétique et énergies renouvelables, densité et formes urbaines, écoconstruction).

Cette définition est suffisamment vaste pour englober tout et son contraire : allons plus loin en mettant l’accent sur ses principales caractéristiques :


  • Un quartier conçu dans sa globalité dans une démarche de conception et d’aménagement d’ensemble.
  • Un quartier qui fonctionne comme une entité propre (densité suffisante de services publics et privés) mais en lien avec la ville (pour toutes les interactions de transport, d’échanges).
  • Une implication forte des citoyens dès en amont du projet et à chaque étape.
  • Une réduction de l’impact écologique : réduction des déchets, des émissions de gaz à effet de serre, développement des énergies renouvelables, meilleure gestion de l’eau, renforcement des transports publics et des modes doux (à pied et en vélo), développement de l’écoconstruction, préservation de la biodiversité, etc.
  • Une mixité (entre riches et moins riches, entre jeunes et vieux, entre logements, commerces et bureaux) pour favoriser proximité et lien social.
  • Une qualité de vie et amélioration du bien-être collectif.


éco-quartiers

Mais les éco-quartiers, ce n’est pas que cette simple image, c’est bien plus !






Concevons « ensemble » !

Les éco-quartiers devraient être pour l’énergéticien et l’urbaniste une formidable opportunité de pouvoir travailler ensemble dans l’intérêt général.

Les éco-quartiers devraient être conçus comme un écosystème intégré.

Lors de la construction d’éco-quartiers, seul l’urbaniste est consulté pour le moment. Avec les enjeux énergétiques, d’aujourd’hui et surtout de demain, un énergéticien devrait lui être associé au stade de l’avant-projet. Si c’était le cas, non seulement on favoriserait les synergies énergétiques et le recours aux énergies renouvelables et fatales, mais on diminuerait les coûts de construction des bâtiments car on n’aurait moins à investir pour obtenir la certification BEPAS ou BEPOS.

Si l’énergéticien était impliqué lors de la rénovation de quartiers, là aussi son action permettrait de diminuer les coûts de construction et d’exploitation en rendant les bâtiments plus accessibles. De plus, son analyse et ses solutions permettraient bien souvent d’augmenter les surfaces habitables et la sécurité en supprimant les chaufferies intégrées.



20% d’énergies renouvelables



L’UE a pour objectif d’avoir en 2020 dans son bouquet énergétique une part de 20% d’énergies renouvelables.

Se chauffer avec moins d’énergie


Quelles sont les opportunités à ne pas manquer pour se chauffer avec moins d’énergie ?

On devrait systématiquement profiter de l’implantation d’activités produisant beaucoup d’énergie fatale, telles que les datacenters, les centres commerciaux, etc, ... ou encore celles ayant un excès de puissance en production de chaleur ou de froid, pour les mettre à la disposition de bâtiments en ayant besoin.

Ce type de réflexion devrait entrer dans nos stratégies globales lors de travaux neufs ou de rénovation, c’est fondamental.



Datacenter - Thermographie de la chaleur dissipée        Répartition de la consommation d’énergie électrique Datacenter - Thermographie de la chaleur dissipée - Répartition de la consommation d’énergie électrique



En utilisant l’énergie fatale des datacenters, le donnant n’aura plus à recourir à des systèmes de dissipation de chaleur (tour de refroidissement, dry adiabatique, etc ...). Ce gain pèsera dans la négociation lors de l’achat de cette énergie qui est normalement perdue. Cette stratégie ne s’arrêtera pas là ; on devra aussi implanter au plus près, les bâtiments les plus consommateurs d’énergie, tels que les hôpitaux ou les piscines.

Si l’énergie fatale ou renouvelable est en quantité suffisante, mais n’a pas d’intérêt du fait de sa température trop basse, on pourra toujours venir la « booster » à l’aide de pompes à chaleur HT.



Schéma de PAC HT pour boucle d’eau, en relevage de température d’un circuit de réjection de chaleur

Schéma de PAC HT pour boucle d’eau



Schéma d’une PAC HT pour réseau, en pré-refroidissement d’un circuit d’eau glacée de datacenter

Schéma d’une PAC HT pour réseau



Si le bilan thermique est déficitaire, on aura à compléter la production de chaleur au moyen de chaufferies d’appoint de façon à n’avoir que des réseaux courts avec peu de pertes thermiques, voire des chaufferies centrales (biomasse ou biogaz) avec un réseau de chaleur.



On ne peut parler de réseau de chaleur sans parler de leur température et donc de source de récupération d’énergie ou de production.

Aujourd’hui, le niveau moyen de consommation énergétique du parc est de 240 kWhep/m².an. La règlementation thermique 2012 a des exigences dans la construction neuve de 50 kWhep/m².an pour les cinq usages : chauffage, eau chaude sanitaire (ECS), climatisation, éclairage et consommation des auxiliaires. De même, deux labels de performance énergétique ont été́ mis en place pour la rénovation : le label HPE rénovation à 150 kWhep/m².an et le label BBC rénovation à 80 kWhep/m².an.

Une loi d’eau doit pouvoir évoluer dans le temps. Si les propriétaires isolent leurs bâtiments de façon répartie, cela permettra de descendre la loi d’eau et aura pour avantage de couvrir les besoins calorifiques avec encore plus d’énergies renouvelables ou fatales. Il faudra les favoriser pour cet acte en tenant compte dans le prix des charges de leur température de départ et de retour.



Loi d’eau habituellement utilisée (doc.Garnier)

Loi d’eau habituellement utilisée

Nota :


  • La température d’eau au retour de réseaux de chaleur MT permettra aussi un meilleur rendement des chaudières lorsque celles-ci sont à condensation.
  • En ce qui concerne les réseaux d’eau glacée, leur température moyenne sera fonction de la température et humidité des locaux et du rapport gains sensibles / gains totaux. C’est important de le redire car dans le cas de groupes électriques, une erreur de +1°C entraînera une surconsommation électrique d’environ 3%.


Principales sources de récupération d’énergie calorifique :


Energie fatale à basse température


Observations


Eaux usées

Nécessite la mise en place d’une pompe à chaleur HT

Echappement de séchoirs, de cuisine, air vicié de laboratoires, de blocs opératoires

Nécessite la mise en place d’une pompe à chaleur HT

Réjection de chaleur de groupes de froid (climatisation ou alimentaire)

Nécessite la mise en place d’une pompe à chaleur HT

Eau de refroidissement de génératrices, écoulement d’eaux usées de procédés

Nécessite la mise en place d’une pompe à chaleur HT



Energie fatale à basse température


Observations


Gaz brûlés provenant de chaudières ou de fours

Echappement de génératrices

Condensats usés de production de vapeur



Principales sources d’énergie renouvelable :


Energie renouvelable


Observations


Géothermie basse température

Nécessite la mise en place d’une pompe à chaleur HT

Géothermie haute température

Solaire

Nécessite la mise en place d’un stockage et d’une pompe à chaleur



Accessibilité : la source de chaleur perdue devra être facilement accessible. Cela veut dire quelle doit être stockée et concentrée autant que possible.

La distance entre la source et la demande : plus la distance sera courte entre la source et la demande, plus le projet aura de chance d’être viable.

La périodicité : plus le talon du profil de la source de chaleur perdue sera important, plus le projet aura de chance d’être viable.

Les aspects réglementaires : le classement du réseau permettra de rendre le projet viable.






Rénovation énergétique du parc

Les éco-quartiers pourront permettre de réaliser des immeubles de type BEPAS ou BEPOS vendables et louables. Ils pourront également permettre d’aider la réhabilitation d’immeubles anciens.

Selon l’Insee, dans une étude publiée du jeudi 8 Janvier 2015, 4 millions de ménages français - soit 14,6% de la population - sont en situation de vulnérabilité énergétique.

Le recours à des systèmes collectifs de production de chaleur ou de froid éco n’est pas réservé à une certaine taille de quartier et de puissance, mais il peut l’être pour des îlots.

L’échelle du projet ne doit pas être le seul intérêt immédiat - comme il s’agit d’éco-quartier, l’intérêt n’arrivera parfois que lorsque tous les immeubles auront été construits - ; on peut donc commencer en îlot énergétique et finir en éco-quartier quelques années plus tard.

A plus petite échelle, nous aurons donc des îlots énergétiques ; ils permettront de réaliser des parcs d’activités commerciales ou des zones de maisons individuelles groupées de type BEPAS ou BEPOS à prix vendable et à loyer soutenable.



Schéma simplifié d’une synergie énergétique d’un îlot énergétique
avec production de chaleur et de froid centralisée (doc.Garnier)


Schéma simplifié d’une synergie énergétique d’un îlot énergétique



Si les sources de production et les besoins ne sont pas trop éloignés, on pourrait partager les sites de production au sein d’un ou de plusieurs réseaux (chaleur BT, MT, HT, froid thermodynamique, free chilling, etc.). On prévoirait une disconnection hydraulique par des échangeurs à faible pincement. Les différents sites utilisant différentes énergies, on pourrait disposer d’un mix énergétique à base d’énergies renouvelables et fatales.

Les producteurs auraient des machines fonctionnant avec des taux de charge meilleurs pour leur rendement du fait du foisonnement des besoins. L’équilibre financier de l’opération pendant la période d’amortissement des installations serait mieux assuré.

De plus, on ne serait pas obligé comme c’est le cas aujourd’hui, d’avoir à investir sur une seule production centrale, ce qui exige un investissement lourd au départ et un classement du réseau de chaleur difficile à obtenir du fait qu’il faut au moins à 50% à partir de sources renouvelables ou fatales dès le départ.



Cadre juridique :
Le classement des réseaux de chaleur et de froid est défini par les articles L712-1 à L712-5 du Code de l’énergie, les articles 5 et 7 de la loi 80-531 du 15 Juillet 1980, le décret n°2012-394 du 23 Mars 2012 relatif au classement des réseaux de chaleur et de froid et l'arrêté du 22 Décembre 2012 relatif au classement des réseaux de chaleur et de froid.

Grâce à cette solution, l’utilisateur pourrait à tous moments choisir son ou ses réseaux en fonction de ses besoins qui peuvent évoluer en cours de vie suivant d’éventuels travaux d’isolation et des coûts d’énergie parfois saisonnalisés.

On aurait au minimum un réseau de chaleur BT et un HT. Cela éviterait d’avoir à installer des PAC HT en relève de température sur le seul réseau BT pour les seuls besoins de production d’ECS. Le réseau BT serait celui véhiculant les énergies renouvelables et fatales en accélérant leur mise en place.



Schéma simplifié d’une synergie énergétique d’un îlot énergétique
avec des productions chaleur et de froid partagées et un mix énergétique (doc.Garnier)


Schéma simplifié d’une synergie énergétique d’un îlot énergétique



Cette solution permettrait d’avoir un secours entre les différents sites de production ainsi qu’une mise en cascade des machines en fonction des besoins, ce qui améliorerait leur rendement de génération.

La solution éco-quartier ou îlot énergétique permettra dans le futur de diminuer les coûts de deux manières :


  • Des travaux des bâtiments, en allégeant les équipements contribuant à l’obtention de la certification.
  • D’exploitation, en utilisant des énergies renouvelables et fatales.

Ce serait du bon sens, que de créer des synergies entre tous les bâtiments, que ce soit de type tertiaire, habitat ou encore industriel. Les bâtiments qui produisent de l’énergie fatale ainsi que ceux qui doivent produire de l’énergie renouvelable pour ne pas être taxés, valoriseraient ces énergies auprès de ceux qui en auraient besoin.

Ces fondamentaux devraient rentrer dans la culture des pouvoirs publics, des urbanistes, des AMO, des architectes et des bureaux d’études et surtout être enseignés dans les écoles.


A l’inverse et après une étude au cas par cas, l’énergéticien pourra être amené à déconseiller :


  • Le recours à des capteurs solaires thermiques installés :
    • Sur des bâtiments non utilisés durant les vacances d’été (écoles,
    • Sur des piscines déshumidifiées en thermodynamique et qui ont déjà à utiliser leur chaleur de réjection provenant du condenseur de la machine.

  • Le recours à des chaufferies biomasse avec une seule chaudière bois et donc avec peu de modulation de puissance et beaucoup d’inertie thermique pour alimenter en chaleur les bâtiments dont les besoins peuvent varier très rapidement comme le sont : les écoles, les gymnases ou les piscines très vitrées.
  • La conception de réseaux de chaleur dont la conception hydraulique ne permettra pas d’appauvrir au maximum la température de retour par un débit variable. Si c’est le cas, on aura des pertes de distribution et une consommation électrique des pompes qui sera élevée ainsi que des chaudières à condensation qui ne condenseront jamais.
  • La réalisation de réseaux de chaleur sur des kilomètres pour alimenter les bâtiments ayant de faibles besoins calorifiques qui, de plus, ne le seraient seulement qu’en hiver.

L’énergéticien remettra son programme aux AMO chargés de la construction des différents bâtiments. Dans celui-ci, il donnera des indicateurs de performance lesquels seront repris dans les programmes de chaque projet, ceux-ci seront contrôler de la phase avant-projet à celle d’exploitation. Les besoins seront relevés par un compteur d’énergie et le coût unitaire de l’énergie devra tenir compte des températures départ et retour du fluide.






Freins et accélérateurs pour faire avancer les éco-quartiers

Quatre thématiques freinent pour le moment la mise en place du « volet énergie » dans les éco-quartiers :



  • Réglementaire : l’incorporation des exigences énergétiques mentionnées dans le programme au sein de chaque projet.

Il s’agira d’imposer aux maîtres d’ouvrage, les performances qui permettront d’arriver aux objectifs énergétiques visés et comment les relayer auprès de la maîtrise d’œuvre pour qu’elle les traduise intelligemment en termes de moyens.



  • Organisationnelle : le pilotage, l’assistance et l’organisation entre les différents acteurs concernés par le volet énergie, tout au long du projet.

Il s’agira de voir quelles sont les modalités de concertation entre ces derniers et d’identifier les rôles respectifs de chacun dans un seul but : la recherche de l’efficience énergétique.



  • Financière : les sources de financement et les leviers d’actions concernés par la mise en place du volet énergie.

La gestion des « surinvestissements » fera l’objet d’une attention particulière de la part des différents acteurs. De même, il s’agira d’identifier les dispositifs financiers sollicités concernant la recherche de l’efficience énergétique dans cette opération. Bien souvent, il y aura des contreparties telles que le classement des réseaux de chaleur qui permettront une TVA à un taux plus bas.



  • Délais : la notion de temps n’est souvent pas la même pour les MO que pour les promoteurs qui sont plus regardants sur la durée de construction qui influence leurs marges de profit. Les élus locaux quant à eux raisonnent souvent en termes de mandat ce qui ne favorise pas le développement durable.


Plusieurs raisons peuvent cependant motiver les élus à soutenir un projet d’éco-quartier


  • Obtenir une image de marque auprès de ses administrés ; à condition que le contenu du projet ne consiste pas en un simple affichage sans une véritable éco-efficacité. La mise en place d’une stratégie et le recrutement de professionnels compétents s’impose : un accompagnement par un AMO entouré d’un énergéticien spécialisé.
  • Obtenir une certification donnant accès à des aides spécifiques en fonction de l’éco-efficacité pourra permettre de diminuer le surcoût du projet.

Afficher une certaine cohérence et motivation de la part de la municipalité permet, d’autre part, d’impulser une dynamique auprès de l’ensemble des acteurs pour optimiser le financement de l’opération.


  • Diminuer les consommations d’énergie des équipements publics construits au sein même de l’éco-quartier par la ZAC et, par conséquent, réduire les factures correspondantes.
  • Montrer l’exemple et acquérir ainsi une légitimité auprès de l’ensemble des acteurs, ce qui pourra par la suite faciliter l’engagement de projets similaires.

La recherche de l’efficacité énergétique, et donc de la mise en œuvre de moyens, constitue encore une démarche particulièrement innovante.

Comme on le voit, il y a de nombreux obstacles à la réalisation d’éco-quartiers performants sur le plan énergétique. Outre le manque de financement qui est le premier obstacle, de telles initiatives ne peuvent réussir qu'avec des personnes totalement engagées, une équipe à plein temps et mandatée.

La question des compétences à trouver se pose pour nombre de maîtres d’ouvrage. Sur certains projets, nous avons pu constater que le recrutement de prestataires extérieurs avait été fait sur la seule expérience en matière de qualité environnementale ; c’est bien insuffisant. L’atteinte des objectifs visés en termes d’efficience énergétique de tels projets sous- entend une mobilisation très forte de la part des prestataires en termes de management, de connaissances thermiques et fluides, de qualité de formation et même de négociation.


La possibilité d’autofinancement du volet énergétique.

Les coûts des travaux et d’exploitation relatifs au volet énergie sont rarement supportés par les maîtres d’ouvrage.

Le principe souvent mis en place était jusqu’à présent celui de la délégation de service public : DSP ou du partenariat-public-privé (PPP). Depuis quelques mois il existe un arsenal de solutions plus adaptées CREM, REM et SEMOP.

Dans le cas d’un éco-quartier il sera préférable qu’il y ait un seul et même prestataire pour réaliser les prestations relatives au volet énergie.

Il n’existe pour le moment aucune incitation qui encourage le développement de réseaux de chaleur favorisant des synergies énergétiques.

J’en veux pour preuve une modification récente de la réglementaire qui aurait pu le permettre : Depuis le 1er Janvier 2008 pour les projets de bâtiments de plus de 1000 m² et à compter du 1er Janvier 2014 pour les projets à partir de 50 m², le maître d’ouvrage d’une opération doit réaliser, avant le dépôt du permis de construire, une étude de faisabilité technique et économique explorant les diverses solutions d’approvisionnement en énergie de la construction (art L.111-9 du code de la construction et de l’habitation).

Or cette révision de réglementation ne tient toujours compte que des sources d’approvisionnement en énergie mais n’oblige pas à recenser les énergies fatales qui pourraient être mises à la disposition de ses voisins et ainsi être valorisées.

Cette passivité ne favorise pas les réseaux de chaleur alors que nous pourrions valoriser l’énergie fatale provenant des datacenters et des centres commerciaux de plus en plus nombreux. Nous pourrions aussi mettre à disposition les chaudières des piscines qui ont leur puissance calculée pour réchauffer les bassins en 48h alors qu’elles n’ont une charge que de 35% en hiver.

C’est un oubli important qui pourtant aurait pu permettre l’allègement du coût des travaux des BEPAS, BEPOS et de la rénovation ainsi que les charges dans un moment où les français ont de plus en plus de mal à payer (précarité énergétique).



Et si nous commencions par avoir une véritable stratégie pour construire ou rénover ?

Avant même de construire des bâtiments à basse consommation et à prévoir des installations à partir de générateurs performants dont les prix et les loyers risqueront de ne pas être supportables, ne serait-il pas plus judicieux de nous organiser pour produire collectivement à partir d’énergies renouvelable et fatale ?

Seules des solutions collectives avec pourquoi pas des réseaux de chaleur et de froid courts de 4 tubes, permettront des transferts, avec des installations de puissances moins importantes du fait du foisonnement des besoins et donc plus performantes et moins chères (voir schéma de l’ilot énergétique).

Cela n’est toujours pas enseigné ou n’est pas prévu dans les moteurs de calculs. On forme nos ingénieurs à consommer de l’énergie pour produire de la chaleur ou du froid du mieux possible, certes, mais pas pour l’éviter en ayant par exemple recours aux énergies renouvelables ou fatales.

Or, nous avons les connaissances et les technologies nécessaires pour changer. Ne serait-ce que pour prendre quelques exemples de bâtiments les plus consommateurs, nous savons :


  • Dans les datacenters, on pourrait descendre le PUE de 2,5 à 1,6 ; soit un gain d’énergie de 36%, sans compter la valorisation possible. En moyenne, un data center consomme 30 000 MWh, soit l'équivalent d'une ville de 25 000 habitants. La croissance du secteur étant très importante (+10% en France) en raison du développement d’Internet sur appareils mobiles et de l’augmentation des besoins de stockage des entreprises, la demande énergétique liée aux datacenters va continuer à augmenter fortement.
  • Dans les piscines ayant 1000 m² de bassins, on pourrait réaliser un gain d’énergie d’environ 50%, c’est-à-dire gagner environ 1 500 MWh, soit l'équivalent d'une ville de 2 500 habitants, sans compter la mise à disposition de 65% de sa puissance calorifique.

Mais ce n’est pas fini, si en plus on pouvait mettre à disposition de ses voisins au travers d’un réseau, son énergie fatale, son surcroît d’énergie renouvelable, son froid obtenu par free chilling, là on ferait bien mieux que la simple recherche de performance de matériel qui est proposée aujourd’hui. C’est cela l’éco-efficacité.

Demain, on verra qu’un réseau entièrement à base d’énergie fossile n’offrira plus aucun intérêt pour la collectivité si ce n’est que de rendre captif ses abonnés.



Les différentes alternatives de solutions éco à partir de bâtiments
de typologies différentes, en neuf comme en rénovation.


différentes alternatives de solutions éco






La ville du futur – Les fondamentaux

La proposition qui est faite, ci-dessus, à l’aide d’une coupe montre une cuvette entourée de collines. Ce schéma ne diffère pas tellement du modèle actuel que l’on trouve dans la plupart des villes car il a fait la preuve de son efficacité. Ce qui diffère c’est la logique de l’organisation ; on ne peut blâmer les villes qui ont évoluées de façon plus ou moins anarchique car cela est dû à leur historique : le patrimoine existant, l’industrialisation, l’urbanisation et les reconstructions suite à des guerres.

Les logiques à mettre en place dans une ville nouvelle, seraient du point de vue de l’énergéticien, les suivantes :


  • Sur la coupe ci-dessus de la ville, on voit que le centre urbain est au niveau bas et donne sur une rivière permettant la collecte des rejets d‘EP filtrés et dépollués au moyen de réseaux gravitaires. Dans un avenir proche, les EU rassemblées à ce point permettront de récupérer la chaleur contenue dans ces effluents.
    On pourra y ajouter un bassin (création d’un biotope) pour répondre aux diverses fonctions de stockage d’eau et d’amélioration du confort. Cette rivière et ce bassin permettront de réaliser de façon simple le free chilling des datacenters, des hôpitaux et des bureaux proches.

    On pourra aussi mutualiser les sources de production de chaleur et de froid des bâtiments cités de façon à limiter les émissions de GES. C’est dans ce centre urbain que l’on pourra plus facilement viser le « zéro émission » et réduire la taille des réseaux de chaleur compte tenu de la proximité des sources d’approvisionnement en énergie fatale et des besoins.

  • On voit que la couronne intermédiaire qui correspond à de l’habitat, aux loisirs et aux centres commerciaux sera plus généreuse en espace végétal ce qui permettra de réaliser des zones de stationnement intégrées. On pourra mettre en place un maillage et une desserte favorisant l’accessibilité pour tous, la mobilité douce et les transports en commun. On devra veiller à la séparation physique des voies motorisées et des autres modes de circulation douce. On pourra assurer l’accessibilité des quartiers en particulier aux personnes handicapées.

    On y aménagera des jardins attenants aux bâtiments afin de créer des zones tampons entre les constructions. C’est grâce à ces espaces que l’on pourra construire des BEPAS en garantissant un droit au soleil. On pourra mettre en place dans ces espaces des protections solaires végétalisées et aussi prévoir pour les bâtiments exposés des protections végétales aux vents froids d’hiver. On pourra ainsi maximiser la part des EnR dans les besoins énergétiques liés au chauffage et à la production d’eau chaude. On pourra maximiser la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité et privilégier la ventilation naturelle.

  • La couronne périphérique correspondante aux industries (pollution), aux maisons individuelles isolées, à l’aéroport (acoustique et sécurité) sera située au niveau haut. On pourra mettre en place des éoliennes du fait de l’exposition au vent. Les exploitations agricoles proches pourront permettre de produire une partie de l’électricité et le biogaz de demain ; c’est un premier pas, n’oublions pas qu’en 2050, GrDF prévoit 56% de biogaz injecté dans l’actuel réseau de gaz naturel).

    C’est dans cette couronne que l’on pourra mettre en place des aires de stockage des déchets et les valoriser en matière ou en énergie.

Par Alain GARNIER
Alain Garnier est ingénieur et directeur du bureau d’études GARNIER 20 rue Chanteraine à Reims.
Lauréat du premier prix de l'Eco-Efficacité catégorie « concepteurs » en 2009, récompense remise lors de l'UCE (Université du confort et de l'eau) de ICO à Lille.

SOURCES ET LIENS



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