Réglementation 2012 : Roger Cadiergues recadre !

Par Roger CADIERGUES – Consultant et Ancien directeur général du COSTIC

Les échanges suivants ont été recueillis ces deux derniers mois par la rédaction d'XPAIR. Le point de vue de Roger Cadiergues sur la RT 2012 est libre et éclairé. Il dénonce les faiblesses techniques et juridiques, et par voie de conséquences les pistes d'amélioration de la future réglementation thermique.

Roger Cadiergues


Roger CADIERGUES :
Polytechnicien de formation, ancien directeur général du COSTIC et consultant international, Roger Cadiergues présente un parcours incomparable dans le génie climatique - vocable dont il est l'inventeur - par les responsabilités tenues et des avancées tant techniques qu'informatiques qui lui sont dues.

Que pensez-vous des enthousiasmes trop rapides sur la réglementation RT 2012?

Attention aux enthousiasmes trop rapides sur la RT 2012 ! … Un bon nombre d'organisations françaises, nationales ou régionales ont consacré des réunions récentes à une présentation de la nouvelle réglementation RT 2012. Hélas il s'agit là d'un texte fragile Et largement inapplicable, surtout dans les délais prévus.

Cette mise en doute n'est-elle pas un peu exagérée ?

Je crains bien que non. J'ai, d'abord, espéré que cette nouvelle réglementation saurait corriger les défauts des réglementations plus anciennes et j'ai donc abordé le texte de façon a priori très positive. Hélas, je suis allé de mécompte en mécompte. D'abord un premier, qui ne semble pas avoir été bien perçu en général : la réglementation n'est pas terminée, et les auteurs du texte ont dû être sommés de fournir leur travail à une date imposée. Résultat : la RT 2012 actuelle ne s'applique qu'à l'habitat et aux bâtiments d'enseignement. Comme cette limite n'est pas clairement abordée on ne sait pas quand, ni si des textes complémentaires verront le jour. De toute façon le fameux moteur de calcul n'est pas disponible. De plus, le texte est juridiquement suspendu aux décisions du Conseil d'Etat.

N'est-ce pas une remise en cause excessive ?

J'ai, souvent souligné la faiblesse juridique des RT, mais je crains que beaucoup d'interlocuteurs aient pensé que mes réserves étaient secondaires. En fait il n'en est rien, et ce n'est probablement qu'un début. Tout tient à une modification législative applicable depuis début 2010, mais trop souvent passée inaperçue. Avant 2010 la contestation des textes réglementaires ne pouvait guère se faire qu'au niveau européen, et ce par des procédures longues et laborieuses. Depuis 2010, date d'application d'une nouvelle loi, il est possible d'attaquer les textes en Conseil d'Etat : c'est ce qui vient de se produire déjà deux fois pour la RT 2012. Ce qui, de plus, pourrait bien encore se produire dans le futur pour des motifs autres que ceux utilisés aujourd'hui.

Vous pensez que de nouveaux recours sont encore possibles ?

Absolument, mais faudra-t-il encore qu'un contestataire se déclare. Prenez, par exemple, le problème de la méthode de calcul. Le recours au CSTB dans les conditions fixées par la RT, est – à mon sens – illégal. Toute méthode, même complexe, doit pouvoir être décrite en termes clairs et en français. Bien entendu si la complexité le justifie, cette méthode peut être informatisée, mais à partir d'un texte accessible et juridiquement organisé, donc publié en français par l'autorité administrative adéquate. Un texte qui, de plus, peut alors être soumis à la critique et à la sagacité des lecteurs.

Que voulez-vous dire par là ?

Prenons un exemple : celui du calcul des consommations en climatisation, un domaine où la procédure proposée frôle parfois l'absurde et l'irréalisme. Il suffira, simplement, dans bien des cas de ne pas prévoir « officiellement » de climatisation, et de prévoir des prises de courant sur lesquelles l'occupant pourra brancher des climatiseurs. Tout ceci sans oublier bien d'autres imperfections graves dont personne ne semble vouloir parler, qu'il conviendrait de corriger : en évaluant et publiant les surcoûts très importants liés à cette nouvelle réglementation, en procédant aux vérifications in situ de la méthode de calcul des consommations (ce que font un peu tous les pays développés pour leurs propres règles).

Tout cela paraît bien formel …

Ce ne sont pas les seules fragilités de la RT 2012 telle qu'elle est actuellement prévue. Quand je l'ai lue, malgré ma bonne volonté a priori, j'ai été abasourdi par un certain nombre de dispositions, dont certaines – plus ou moins injustifiées – ont des répercussions commerciales très fortes. Même si nous laissons de côté ces faiblesses, il est évident que la RT se moque des normes. En voici un exemple : un calcul réglementaire spécifique (erroné et de bases climatiques fallacieuses) de la température intérieure d'été sans climatisation (la TIC), alors qu'il existe une norme internationale (NF EN ISO) sur le sujet, norme (valable) à laquelle il aurait été extrêmement simple de se référer.

Réglementation : Faudra-t-il abandonner la RT 2012 ?

Les avatars récents de la RT 2012, avec son examen au Conseil d'Etat, confirme pleinement ce que j'ai déjà signalé il y a plusieurs mois : la fragilité juridique des textes réglementaires nous concernant. Ma mise en garde était essentiellement basée sur l'existence d'une nouvelle disposition légale applicable depuis le 1er Janvier 2010, disposition permettant à chacun de faire appel au Conseil d'Etat en cas d'injustice.

Roger CADIERGUES – Ancien directeur général du COSTIC
Polytechnicien de formation, et consultant international, Roger Cadiergues présente un parcours incomparable dans le génie climatique (vocable dont il est l'inventeur) par les responsabilités tenues et des avancées tant techniques qu'informatiques qui lui sont dûes. Auteur de nombreux ouvrages, il anime entre autre la lettre hebdo d'XPAIR www.xpair.com

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Chroniques réglementation de R.Cadiergues

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