La perméabilité à l'air des bâtiments : un souci récurrent

Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019

Les lettres précédentes se sont attachées à présenter les inflexions de notre environnement professionnel et politique vers le développement durable. L'une des préoccupations essentielles concerne les pertes de chaleur en chauffage. L'isolation des parois étant assez facile à réaliser (tout aspect économique étant écarté), la faille éventuelle reste la perméabilité à l'air des bâtiments.

Cette préoccupation est-elle récente ?

Loin de là : avant d'aborder les obligations réglementaires concernant la perméabilité à l'air des bâtiments, je voudrais faire le point. En revenant un peu aux origines. Lorsque, sur la demande d'André Missenard, en 1950 j'ai pris en charge un organisme alors exsangue, le Comité qui devait devenir le COSTIC, le capital de connaissances et d'informations était loin d'y être négligeable. Cela était dû, en particulier, à l'action menée avant 1944, par une secrétaire générale de très grand talent, Jeanne Mouret. Cette dernière, l'un des premiers ingénieurs féminins de l'Ecole Centrale, avait disparu en 1944, après avoir été arrêtée pour faits de résistance au Comité même où les marques de cette arrestation subsistaient encore en 1950. Pendant toutes les années 1930 Jeanne Mouret avait accumulé de nombreuses données, originaires de tous pays aussi bien que de France. C'était le cas de la perméabilité à l'air des bâtiments, sous la forme d'un dossier qui n'avait pas encore fait l'objet de communication lorsque j'en ai pris connaissance. Ce dossier était déjà considérable.

Que contenait-il ?

Les caractéristiques "écart de pression-débit d'air au mètre carré" pour plus de 80 types de parois très variées. Allant, pour les parois fixes, de la plus imperméable (le mur en pierre bien jointoyé) à la moins perméable (des panneaux de fibre). Allant, pour l'écart de pression de 50 pascals, de 0,01 à plus de 100 [m³/m² h]. Je n'ai eu qu'à reprendre cette étude, à la compléter par quelques rares nouveaux essais survenus depuis 1944, l'ensemble ayant alors été publié en 1952 dans un fascicule de l'Institut Technique du Bâtiment et des Travaux Publics (ITBTP). Malheureusement la dispersion des résultats était telle qu'on ne pouvait guère en tirer de conclusions valables en matière de renouvellement d'air, un sujet abordé par ailleurs (de façon plus complète) sur bâtiments réels, par Jeanne Mouret d'abord, et par moi-même ensuite.

Le résultat de l'étude de la perméabilité à l'air était donc finalement décevant ?

Globalement oui, mais avec un bémol toutefois. Après la publication du dossier précité sur la perméabilité à l'air les professionnels français de la menuiserie souhaitèrent que soit créé un classement des fenêtres selon leur degré de perméabilité, et demandèrent de faire des propositions précises. Il en est résulté un classement des fenêtres qui fut ensuite utilisé pendant de nombreuses années. Ceci dit, en dehors de cette action sur les fenêtres, au plan des infiltrations il nous fallait privilégier les études directes, basées sur la mesure in situ des taux de renouvellement d'air.

Etait-ce très différent ?

Globalement oui, car nous mesurions directement les taux, en utilisant des gaz traceurs, l'hydrogène jusque vers 1954, d'autres gaz ensuite. La mesure est globale : il suffit d'injecter ce gaz dans les locaux étudiés, puis - l'injection étant suspendue - de suivre la concentration dont la décroissance est directement liée au taux de renouvellement d'air. Ce n'est plus, aujourd'hui la technique utilisée.

Pourquoi ?

Parce qu'en faisant des mesures avec traceur vous faites intervenir le taux réel, ce taux dépendant plus ou moins des conditions climatiques : températures, orientation et intensité du vent. D'où l'idée, qui n'est pas nouvelle mais qui s'impose au plan international, d'effectuer ces mesures de perméabilité de façon assez artificielle en mettant les locaux sous pression (ou dépression).

Nous disposons donc d'un dispositif de tests satisfaisant ?

La méthode consiste, en général, à utiliser une surpression intérieure de l'ordre de 50 pascals. C'est souvent, d'ailleurs, à cet écart que se réfèrent les textes normatifs ou réglementaires, mais pas toujours. Sur le plan théorique cette méthode est satisfaisante, mais sur le plan pratique cela reste à voir. Comme il y a plusieurs raisons à cette critique nous y reviendrons un peu plus en détail la semaine prochaine.

Roger CADIERGUES


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