Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
Au-delà de toutes les discussions actuelles, performances énergétiques comprises, les vrais défis sont d'une taille à laquelle nous ne sommes pas habitués. Il faut pourtant y répondre avec une certaine urgence. Ce qui ne semble pas être le cas aujourd'hui.
Quelle devrait donc être, à votre avis, la démarche souhaitable ?
Trois points fondamentaux d'abord.
1. Il faut aller directement au but. Ne pas "finasser" par exemple
en parlant d'énergie - ce qui occulte le vrai sujet. Aborder immédiatement
le but essentiel : le développement souhaitable. Quand on exige que le
seul thème "énergie" soit notre objectif ce sont des
démarches appauvries qui en résultent.
2. Mettre en priorité l'existant (et non pas le neuf), et surtout la
vie de cet existant. Sinon c'est que nous avons choisi une mauvaise voie. Il
est manifestement plus facile, pour les amoureux de normes et de calculs, d'aborder
le neuf plutôt que l'existant. Il est, pourtant, beaucoup plus instructif
et productif d'aborder d'abord l'existant, bien qu'il ne puisse pas se traiter
uniquement par des normes. Mon expérience, portant tout de même
sur plusieurs dizaines de milliers de cas concrets, pour lesquels il fallait
convaincre les usagers, prouve que c'est possible de façon relativement
simple.
3. S'attacher à la réalité, et non pas au conventionnel.
Quand il nous a fallu, sur la demande de l'AFME, nous attacher à l'existant,
il est vite apparu qu'il fallait soutenir les propositions au moyen d'évaluations
concrètes des consommations, et non pas de calculs conventionnels. Pas
question, dans ce cadre, de refuser les réalités : il fallait
impérativement être crédible auprès de nos interlocuteurs,
plusieurs dizaines de milliers d'hommes et femmes non techniciens. Pour cela,
il fallait rester très proche de la réalité : c'était
un principe incontournable.
Vous voilà revenu dans le cadre "étroit" de l'énergie ? N'est-ce pas limitatif ?
Non, loin de là si nous nous limitons à le prendre comme exemple.
C'est ainsi qu'un des premiers points concerne contre l'effet de serre puisqu'il
s'agit du dégagement de CO2 dans l'atmosphère. Quand on parle
de tonnes de CO2, et non pas de kilowattheures, on peut supposer qu'il suffit
de quelques multiplicatifs : 200 g de CO2 par kilowattheure de gaz, 250 par
kilowattheure de fioul, 400 g par kilowattheure de bois ou de charbon, etc.
Ma position est qu'il faut refuser cette démarche toute faite. Et ce
non pas parce que ces chiffres ouvrent la porte à des discussions de
spécialistes, mais parce qu'il y a mieux à faire en posant différemment
les questions.
1. Déjà, lorsqu'il s'agit d'électricité on ne sait
plus très bien comment transposer des kWh en CO2. Pour la production
EDF on peut, bien entendu, prendre 80 g de CO2 par kilowattheure fourni. Mais
que se passera t-il si nous adoptons, dans l'avenir, un autre fournisseur d'électricité.
Certains, pour le même kilowattheure électrique, produisent en
centrale 6 à 8 fois plus de CO2 !
2. Même, s'il ne s'agit que de gaz ou de fioul il faut se garder de considérer
les ratios précédents comme inexorables. Ne devons-nous pas consacrer
des efforts beaucoup plus importants à réduire les dégagements
de dioxyde de carbone en les supprimant, en captant le CO2 plutôt qu'en
les limitant ? Ce n'est pas un rêve, puisque les recherches sont en cours,
et vaudraient d'être amplifiées.
Dans ma prochaine lettre, je poursuivrai sur cette analyse.
Roger CADIERGUES