Station de Tarentaise, la Station de Tignes s'est engagée dans une démarche environnementale de longue haleine, dont l'une des étapes est la revalorisation du quartier des Boisses par la construction de l'Ecovillage des Boisses.
Situé près du célèbre barrage, ce village est la porte d'entrée de la Station de la commune et est donc la première « image » de Tignes.
La collectivité a donc décidé de la création d'un Ecovillage exemplaire de l'Habitat en montagne et a confié l'aménagement de la ZAC à la Société d'Aménagement de la Savoie.
Nous ne nous intéresserons ici qu'à l'aspect énergétique du projet.
Le projet d'Ecovillage et son contexte énergétique
L'hébergement touristique en montagne est au seuil de subir de profonds bouleversements quant aux techniques utilisées pour chauffer les logements : la mise en œuvre de la RT 2012 proscrit pratiquement l'usage de l'énergie électrique directe et méconnait les problèmes des implantations d'altitude.
L'écovillage est donc pour la Station un prototype de ce que pourrait être l'avenir de l'habitat montagnard.
Les caractéristiques de cet habitat peuvent être définies de la façon suivante :
- Besoins de base pour la mise hors gel répartis sur une très longue période d'Octobre à Avril et représentant jusqu'à 60% des besoins de chauffage
- Période d'occupation des logements courte : de mi-décembre à mi-mai
- Besoins d'eau chaude sanitaire importants avec une période d'utilisation concentrée sur 2 périodes de la journée
Les caractéristiques du village sont les suivantes :
Une centrale géothermique en montagne !
La réflexion a été confiée à Abac Ingenierie, spécialiste de l'Habitat de Montagne.
Après avoir comparé diverses solutions, telles que chauffage gaz individuel, chaufferie bois collective, performances maximales de l'habitat pour autoriser le chauffage électrique.., il a été décidé d'étudier la possibilité de mettre en place une centrale géothermique.
Cette solution a l'avantage de tirer partie de l'énergie électrique présente dans le secteur montagneux, avec l'efficacité énergétique de la pompe à chaleur.
La faisabilité de cette solution a été confirmée par le Cabinet Amsler et Bombelli et la démarche d'études proprement dite a été lancée :
-
1. Réalisation d'un forage d'essai dimensionnant pour la pré étude
2. Réalisation d'une opération pilote et de 2 forages dimensionnant pour l'étude finale
3. Réalisation de la centrale et raccordement des premiers logements
Le forage d'essai préliminaire a été réalisé en Juillet 2011. D'une profondeur de 100 m, il a permis de définir les caractéristiques du massif rocheux.
Cette première installation dite pilote a donc consisté à mettre en œuvre sur le principe de géothermie un générateur électrique de type pompe à chaleur eau-eau sur sondes géothermiques.
Ceci pour un ilot de 39 logements à caractéristiques BBC, soit identique à la RT 2012 actuelle.
L'opération pilote dite « les Tourmalines » (logements locatifs) est actuellement en cours de réalisation et la mise en service de la géothermie propre à celle-ci est prévue en Avril 2013.
Une opération pilote pour 39 logements : PAC sur sondes réchauffées par le solaire
Cette installation de géothermie possède les caractéristiques suivantes :
- 39 logements en locatifs, label BBC
- 36 sondes géothermiques de 100 m de profondeur et 152 mm de diamètre avec réseaux en Dia 323 (la profondeur de 100 m est dictée par des problèmes règlementaires)
- Une pompe à chaleur de 121 kW avec relève et secours électrique
- L'eau est extraite (en circuit fermé) des forages à une température de 6° et après passage dans la pompe à chaleur est réinjectée à 3°
- La pompe à chaleur délivre de l'eau à 45°
Cette installation sera équipée de tous les appareils de mesures nécessaires pour le retour d'expérience.
La centrale géothermique sera réalisée en partenariat avec l'ADEME, l'INES et le BRGM.
Le financement de l'ADEME est voisin de 50% pour la production PAC+ forage ; seule manière de rentabiliser l'opération. Les travaux de forage étant les plus onéreux dans le cas de figure.
Schéma de principe de l'installation géothermique
Elle sera réalisée en partenariat avec l'ADEME, l'INES et le BRGM.
En complément de la géothermie, il a été démontré la rentabilité de la recharge des sondes par capteurs solaires en été, excellente façon de rentabiliser l'énergie solaire en montagne, disponible à une période où les logements sont quasi inoccupés.
Chaleur solaire injectée dans les puits géothermiques
En complément de la géothermie, il a été démontré la rentabilité de la recharge des sondes par capteurs solaires en été, excellente façon de rentabiliser l'énergie solaire en montagne, disponible à une période où les logements sont quasi inoccupés.
Le principe est le suivant :
En fonction de l'ensoleillement, l'eau chaude solaire captée par les panneaux solaires thermiques, est injectée dans les réseaux d'eau géothermiques des puits (réseaux à circuits fermés). Cela provoque un réchauffement de la roche 10 mètres autour du puits géothermique. Et charge en inertie thermique le puits géothermique.
Cette opération s'effectue en été, durant une période de 4 mois, où l'ensoleillement est très abondant en montagne. Une façon astucieuse de combiner solaire et géothermie en montagne !
Les résultats donne un fonctionnement rentable – sous réserve de l'aide au financement ci-dessus – est une conception à haute efficacité énergétique combinant géothermie avec pompe à chaleur et solaire avec injection de chaleur dans les puits géothermiques.
Pour cet ilot de 39 logements ainsi équipés, nous notons une couverture de 80% des besoins thermiques chauffage + ECS. A noter que pour ce type d'application en montagne par des températures moyennes hivernales autour de -15°C, cette production assure la part principale du chauffage (jusqu'à 8°C) et la part d'eau chaude sanitaire ; prépondérante autour de 50%.
Le schéma de l'opération pour les 35 000 m²
(nota : les dimensionnements sont provisoires)
Les sondes seront de même type que celles utilisées pour l'opération pilote mais seront de profondeurs de 200 m.
Les différents corps de bâtiment seront alimentés depuis un réseau de distribution avec sous station, celles-ci ayant également en charge le relevage de la température ECS.
Les régimes de température sont identiques à ceux de l'opération pilote, avec la circulation de «recharge » par les panneaux solaires réalisée sous un régime de 20° en injection et retour à 17°C.
Les performances attendues sont les suivantes :
- Couverture de 80% des besoins avec 50% de la puissance
En résumé
Cette installation résout le problème de l'efficacité énergétique en montagne. Comment être conforme à la RT 2012, ou réaliser du BBC en rénovation ? Comment éviter l'électricité directe ? Certes, l'investissement notamment des forages géothermiques est aujourd'hui pénalisant et nécessite une aide financière pour rentabiliser l'opération. Cependant, cette conception ouvre la voie à d'autres réalisations en montagne du même type, avec des concepts similaires, une double utilisation du solaire, pourquoi pas pour les puits et en direct, une optimisation des conditions de stockage de chaleur solaire, ...
Les acteurs du projet
Maître d'ouvrage : |
Les chiffres clés
- 35 000 m² de SHON |
→ Sources et liens :
→ Crédits photos :
Atelier PLEXUS ARCHITECTES, ABAC
Article intéressant qui ouvre la voie de la pompe à chaleur et du solaire dans les réalisations en altitude, deux sources d'énergie naturelles et ici complémentaires. J'espère que cette référence fera "des petits", .... Robert P. BET