Par Giovanni Bellaviti, architecte - B+C Architectes
Dans un quartier en pleine mutation de Clichy (92), un immeuble de bureaux se démarque par la végétalisation de ses façades et des espaces lumineux entièrement modulables, avec en prime une importante performance environnementale.
Cette réalisation a été lauréate du PRIX CONSTRUCTION NEUVE aux Trophées de la Construction 2017.
Crédit photo Michel Denancé
Le maître d’ouvrage avait indiqué dans son cahier des charges qu’il souhaitait des façades végétalisées. Pour ce projet, l’architecte Giovanni Bellaviti a imaginé une disposition atypique. En effet, généralement, les façades végétalisées le sont à la verticale mais là, chaque étage du bâtiment est encerclé par des modénatures végétales horizontales.
Des espaces modulables et une conception bioclimatique
Le bâtiment occupant la totalité de la parcelle de forme trapézoïdale et étant entièrement encerclé par des rues, s’inscrit par sa position « charnière » dans l’opération de réaménagement de l’ « entrée de ville » de la porte sud de la ville de Clichy.
Le programme prévoit la réalisation d’un bâtiment capable d’accueillir plusieurs configurations de bureaux, et de se « transformer » en un minimum de temps et avec le minimum d’effort.
Chaque configuration demande au bâtiment de savoir créer des « atmosphères » et de « réagir » avec des performances et caractéristiques différentes, parfois même contradictoires. Cela aussi bien du point de vue de l’image que du point de ses qualités thermiques, acoustiques ou d’usage.
La contrainte fondamentale de ce type de bâtiment est « l’indétermination » du programme, cependant, elle en devient sa force : son « essence ».
D’où la volonté de concevoir le bâtiment comme une sorte de « machine » capable de « muter », de se « transformer », se « déguiser » et prendre différentes « identités » selon les usages, les saisons, les occupants.
Au rez-de-chaussée, l’entrée principale, avec un hall traversant, est située à l’angle sud-ouest de la rue du 8 mai 1945.
Le RDC, complètement vitré, permet l’éclairage de la rampe d’accès au parking en sous-sol.
Avec une hauteur sous plafond de 3m50, ce rez-de-chaussée est conçu de manière à pouvoir s’ouvrir complètement sur l’espace public.
Le noyau ascenseur-circulations verticales est implanté côté sud de manière à englober dans une seule entité compacte ascenseur, escalier principal et escalier secondaire, locaux communs et locaux techniques et surtout permettre de libérer des grands plateaux libres pour les futurs usagers.
L’escalier principal, situé en façade sud, permet l’éclairage naturel des circulations horizontales et des paliers accueillants ascenseur et locaux communs.
Ce noyau et ses voiles en béton offrent une inertie thermique et deviennent un espace tampon thermique pour tout le bâtiment.
La façade extérieure, composée de modules réguliers qui entourent les plateaux, permet une grande flexibilité d’aménagement pour l’implantation des cloisons séparatives.
Crédit photo Michel Denancé
Crédit photo Michel Denancé
L’idée a donc été de traduire cette volonté par l’utilisation du « végétal» comme « matériel » de façade, un matériel capable d’évoluer avec le temps, pendant la journée et les saisons, de réagir aux changements de lumières et de climat, en d’autres termes de « vivre », « mourir », se « régénérer », voir être remplacé au moindre coût.
De plus, par rapport à l’exigence de dépasser l’anomie et la sérialité typique des immeubles de bureaux, le végétal permet de personnaliser son environnement, son « horizon » au moindre coût comme on peut le faire avec le fond d’écran de son propre ordinateur.
A cet effet, le bâtiment dans sa conception se présente très simplement comme un espace modulable polyvalent et polyfonctionnel à chaque étage.
Une « modénature végétale » entoure complètement chaque étage, elle permet d’accueillir différents « paysages » (en fonction de la hauteur de l’étage et de l’orientation de la façade) qui peuvent être entretenus, modifiés voir créés au fil des saisons et du temps par les occupants.
Chaque « modénature », implantée à hauteur de table de bureau dont elle constitue le prolongement « naturel » créé à chaque étage un « horizon » flottant qui s’interpose entre l’intérieur et la ville.
Ces éléments n’ont pas un rôle seulement « décoratif » ou architectural mais participent au fonctionnement bioclimatique du bâtiment.
En été, ils jouent le rôle de véritable « filtre », en contrôlant les apports solaires entrant dans le bâtiment ainsi qu’en augmentant, grâce au principe de l’évapotranspiration, le taux d’humidité dans l’air en périphérie de l’immeuble, créant ainsi un « ilot de fraicheur » végétal autour du bâtiment.
Pendant la journée, la ventilation étant manuelle et contrôlée par les utilisateurs par simple ouverture des fenêtres, les « modénatures » participent au rafraichissement passif du bâtiment, limitant le recours à un système de climatisation.
Crédit photo Michel Denancé
Matériaux et végétalisation pour réduire les consommations énergétiques
Les façades à double vitrage de haute performance sur profilés aluminium à rupture de ponts thermiques (Uw = 1,3 W/m².K) sont doublées à l’extérieur par une exo-structure en acier laqué soutenant un système de brise soleil en tubes d’aluminium laqué couleur or.
Ces modénatures se transforment à chaque étage dans des « consoles végétalisées », qui, alimentées par un système d’arrosage automatique, enveloppent l’ensemble de son périmètre.
Crédit photo Michel Denancé
Visible depuis des bâtiments situés plus haut, la toiture est conçue comme une 5ème façade entièrement végétalisée, apportant des avantages thermiques et acoustiques. Un volume enveloppé par une peau en métal déployé accueille les équipements techniques et les panneaux photovoltaïques.
Le garde-corps de la toiture est intégré dans le système de brises soleils de la façade.
Le choix d’une ventilation naturelle, le large recours à l’éclairage naturel des locaux, le recours à un éclairage artificiel régulé selon la luminosité intérieure (avec des détecteurs de présence pour les parties communes et des détecteurs de luminosité pour les « open space ») participent à la réduction des consommations énergétiques du bâtiment.
Crédit photo Atelier MU-GO
Des choix visant la performance énergétique
Réduction du recours aux énergies fossiles :
→ Besoins énergétiques minimisés grâce à une conception bioclimatique performante.
→ Les panneaux photovoltaïques en toiture permettent de produire de l’électricité gratuite alimentant le réseau du bâtiment, avec une production annuelle de 12 kWhep/m².an.
Réduction des consommations électriques :
→ Choix d’une ventilation naturelle en été.
→ Large recours à l’éclairage naturel des locaux.
→ Recours à un éclairage artificiel de type leds d’une puissance installée inférieure à 8 W/m². Les espaces intérieurs sont régulés selon la luminosité intérieure avec des détecteurs de présence pour les parties communes.
Consommations énergétiques annuelles :
Le bâtiment atteint l’objectif de 70 kWhEP/m².an (RT 2012 – 35 %), cela avec un système de chauffage type pompe à chaleur aérotherme et ventilation double flux en hiver.
Confort d'été :
→ Pendant la journée, la ventilation est manuelle et contrôlée par les utilisateurs par simple ouverture des fenêtres.
→ L’air neuf est rafraichi par la présence des modénatures végétalisées extérieures.
→ Les « modénatures » jouent aussi le rôle complémentaire des « barrières acoustiques » en atténuant le bruit extérieur de la ville.
→ Inertie apportée par les structures intérieures en maçonnerie.
→ Contrôle des apports solaires pour chaque façade.
Confort d'hiver :
→ L’air neuf est tempéré par le système double flux.
→ Inertie apportée par les structures intérieures en maçonnerie.
→ Apports solaires pour chaque façade.
Un exemple à suivre
La végétalisation du bâtiment, au-delà de l’aspect esthétique, a participé à obtenir le label énergétique BREEAM niveau good.
Les espaces entièrement modulables, le rez-de-chaussée vitré s’ouvrant complètement sur l’espace public, la toiture, conçue comme une 5ème façade entièrement végétalisée apportent d'indéniables avantages thermiques et acoustiques.
S'y ajoutent le choix d’une ventilation naturelle contrôlée manuellement par les utilisateurs par simple ouverture des fenêtres, le large recours à l’éclairage naturel des locaux, la technologie d’un éclairage artificiel régulé selon la luminosité intérieure et extérieure. Tous ces éléments n’ont pas un rôle seulement « décoratif » ou architectural mais participent au fonctionnement bioclimatique du bâtiment et donc à la réduction de ses consommations énergétiques.
Un exemple à suivre et à reproduire pour de futurs bâtiments de bureaux !
Crédit photo Michel Denancé
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Maitre d’ouvrage |
→ Construction d’un immeuble de bureaux, commerces et parkings |
Par Giovanni Bellaviti architecte chez B+C Architectes
Intéressant, mais à quel coût au m2...?
(Avec ou sans parking s en sous-sol ?