Par Jacques ORTOLAS - Expert en Génie Climatique
La rénovation thermique ! Jamais autant d’incitations n'ont été à disposition : Eco-prêt à taux zéro jusqu’à
30 000 €, crédits d’impôt de 40% incluant la main d’oeuvre, réseaux d’éco-artisans, et depuis 2007, la réglementation thermique dans l’existant. Il était temps. Le marché de la rénovation est immense à deux titres : celui des économies d’énergie et celui de l’activité des acteurs de la construction.
1°) Architectes, BET maîtres d’œuvre, installateurs thermiciens, pensez avant tout isolation thermique
Très prochainement la réglementation thermique nous obligera à construire « basse consommation ». La RT 2012 ne laissera pas en reste ce qui est le premier gisement et le premier potentiel d’économies d’énergie : l’existant. Les travaux de rénovation thermique ont du souci à se faire, ou plutôt ils ont une chance incroyable puisqu’il faudra passer d’une construction au seuil actuel de 300 kWh(ep)/m² et par an à d’un seuil BBC autour de 80 kWh(ep)/an par m² (base du label actuel Rénovation Effinergie).
Au-delà de ce qui fait notre quotidien, nous thermiciens équipementiers, qui passons notre temps à calculer des grosses machines pour répondre quelque part aux « défaillances thermiques du bâtiment », plus communément appelées déperditions ou charges frigorifiques, il est temps de penser globalement performance énergétique. Et la première action consiste à protéger « l’enveloppe » d’une manière pérenne, soit à isoler thermiquement.
En rénovation, en maison individuelle ou en immeuble collectif, les techniques d’isolation par l’extérieur ou autres ne sont pas toujours faciles ni possibles. Alors que faire ? Et bien réfléchir et agir et isoler thermiquement coûte que coûte ! Essayer le plus possible de penser en rénovation comme pour le neuf ! Le hic viendra dans des cas comme l’habitat collectif où les contraintes de chaque copropriétaire sont difficile à gérer si l’isolation par l’extérieure n’est pas possible et si les parties privatives sont impactées (isolation, création de trémie pour conduit VMC, …).
2°) Isolation extérieure ou isolation intérieure ?
En rénovation et pour obtenir un niveau de basse consommation, le bâtiment basse consommation (BBC) doit posséder une forte enveloppe isolante. Ce qui nous apparaît comme une sur-isolation est pourtant un gage de performance énergétique durable et pérenne, car l’isolation est attachée au bâti. Et pour cela, il faut changer dès à présent nos habitudes de penser et faire un « reset total » de nos repères.
Soit par exemple, pour une maison, les épaisseurs d’isolation thermique pourront atteindre 30 cm dans les combles, 15 cm sur les murs: les vitrages seront de type triple, … Quel que soit le système de chauffage, ou de climatisation, l’isolation fera son office et économisera le moindre kWh, qu’il soit d’origine gaz, fioul, électrique, bois, …
Isoler par l’extérieur : c’est une solution qui permet d’habiller la construction d’un épais manteau, éliminant d’importantes pertes linéiques dits ponts thermiques comme les liaisons des planchers avec les murs, entre le sol et les murs, entre les murs et les fenêtres, …
C’est un fait avec des façades d’immeubles Haussmanniens décorées avec moulures anciennes, des façades classées donc non modifiables (merci Messieurs les Ministres !) l’isolation par l’extérieur n’est pas toujours réalisable. Dire que le bâtiment basse consommation n’est possible qu’avec une isolation par l’extérieur est une erreur, même si l’on se doit de privilégier cette technique. Nous pourrons toujours obtenir une performance énergétique élevée avec une isolation intérieure à la condition de soigner les dits ponts thermiques. Des rupteurs de ponts thermiques offrent cette possibilité désormais simple et se posent à la construction. Cependant, en rénovation comment faire ? La réponse est dans le schéma ci-dessous et dépend de la possibilité ou l’opportunité de ravaler la façade ou non.
3°) En rénovation, quelles techniques d’isolation utiliser ?
S’il est opportun de réaliser un ravalement de façade, l’isolation par l’extérieur sera toujours une bonne solution. Un audit attentif doit être fait par la maîtrise d’œuvre et ensuite par l’installateur afin qu’ils puissent mesurer tous les points singuliers qui peuvent apparaître et compliquer les travaux : liaisons avec l’isolation de la toiture, liaisons avec les fenêtres qu’il faudra repositionner au nu extérieur sans doute, sinon un retour d’isolation devra être prévu, … Dans tous les cas, exigez une isolation par un fabricant qui possède une certification ACERMI.
L’isolation intérieure, comme l’isolation extérieure, ne devra pas se limiter aux parois verticales et à la toiture. Les planchers bas devront être traités. Si la maison est sur terre-plein (à même le sol), un isolant rigide sous une nouvelle chape est recommandé pour limiter les déperditions du sol et traiter le pont thermique avec les parois verticales.
Point sur les vitrages : en rénovation, remplacer les vitrages et ouvrants est un acte facile et qui offre de plus un confort acoustique immédiat. Encore faut-il employer des matériaux performants comme les double-vitrages à isolation renforcé ou des triples vitrages si les finances le permettent. Ensuite veillez à bien calfeutrer le nouveau cadre de l’ouvrant sur l’ossature existante.
Enfin, point impactant sur l’hygiène et la conservation du bâti, il faudra également s’assurer de ne pas interrompre la ventilation naturelle de la maison si celle-ci se faisait via les infiltrations des anciens vitrages. Faire la chasse au moindre kilowattheure en isolant et calfeutrant parfaitement la maison nécessite de créer une ventilation hygiénique continue, soit une VMC Ventilation Mécanique Contrôlée.
4°) Isolation et ventilation sont à mener de front
Si vous optez pour une VMC simple-flux, il faudra récréer des ouvertures dans les ouvrants des pièces à vivre : bureaux, salle à manger, ….. Vous perdrez certes en isolation acoustique.
Autre solution, c’est d’opter pour une VMC double-flux avec amenée d’air et extraction séparée. En plaçant un échangeur intermédiaire, vous récupérerez de plus les calories sortantes.
La ventilation mécanique répartie ou VMR : enfin, d’autres techniques spécialement adaptées à la rénovation permettent d'aérer à partir d'aérateurs à extraction directe individuels placés dans les pièces humides (cuisine, salle de bains, toilettes) et d’assurer une ventilation permanente, économique, et sans mise en œuvre de gaines : la VMR (Ventilation Mécanique Répartie).
5°) Immeuble collectif, comment isoler ?
En immeuble collectif, l’isolation extérieure est également possible. Le schéma ci-dessus conditionné au ravalement de façade est un critère de choix important. L’isolation intérieure appartement par appartement est également possible avec le changement des ouvrants, et demandera dans ce cas une gestion rigoureuse des travaux liés à la copropriété et ceux liés à la décoration intérieure propre à chaque appartement.
Si l’immeuble collectivement n’est pas disposé à entreprendre une opération d’isolation du bâti, vous pouvez également, d’autant plus si vous êtes autonome sur le plan du chauffage et de la production d’eau chaude sanitaire (chaudière et chauffe-eau individuel, ou radiateurs électriques), réaliser vos propres travaux d’isolation thermique :
- Remplacement des anciens vitrages par des double-vitrages, des vitrages à isolation renforcée (VIR) ou triple vitrages.
- Isolation des murs, sol et plafond avec le principe de la « boite dans la boite » comme mentionné dans le schéma ci-dessus. Vous gagnerez notablement sur le plan acoustique tant en bruit aériens qu’en bruit d’impact.
- Mise en place d’une ventilation permanente, soit VMC, soit VMR.
6°) Zoom sur la réglementation thermique, ou RT sur l’existant
La contrainte réglementaire existe pour les travaux de rénovations thermiques dans l’existant, c’est l’arrêté de mai 2007 qui fixe les exigences minimum en termes de matériaux et de performance énergétique. ATTENTION !! Contrairement au passé un peu laxiste de l’administration française, il faut s’attendre également à plus de contrôles tant au niveau des chantiers d’immeubles collectifs que pour l’habitat individuel.
Vous devez donc observer les performances minimales suivantes :
PAROIS | RÉSIS TANCE thermique R minimale | CAS D’ADAPTATION POSSIBLES |
Murs en contact avec l’extérieur et rampants de toitures de pente supérieure à 60° |
2,3 |
La résistance thermique minimale peut être réduite jusqu’à 2 m²K/W dans les cas suivants : |
Murs en contact avec un volume non chauffé |
2 |
|
Toitures terrasses |
2,5 |
La résistance thermique minimale peut être réduite jusqu’à 1,5 m²K/W (1 m²K/W jusqu’au 30 juin 2008) dans les cas suivants : |
Planchers de combles perdus |
4,5 |
|
Rampants de toiture de pente inférieure à 60° |
4 |
La résistance thermique minimale peut être réduite jusqu’à 3 m²K/W lorsque, dans les locaux à usage d’habitation, les travaux d’isolation entraînent une diminution de la surface habitable des locaux concernés supérieure à 5 % en raison de l’épaisseur de l’isolant. |
Planchers bas donnant sur l’extérieur ou sur un parking collectif |
2,3 |
La résistance thermique minimale peut être réduite jusqu’à 2 m²K/W dans les cas suivants : |
Planchers bas donnant sur un vide sanitaire ou sur un volume non chauffé |
2 |
La résistance thermique minimale peut être réduite dans le cas d’installation ou de remplacement de plancher chauffant à eau chaude ou plancher chauffant rafraîchissant selon la valeur indiquée à l’article 25. |
Et pour les vitrages et parois vitrées
Le coefficient de transmission thermique Uw des fenêtres, portes fenêtres et façades rideaux installées ou remplacées, exprimé en Watt par m² et par degré Kelvin (W/m²K), doit être inférieur ou égal à la valeur donnée dans le tableau suivant:
TYPE DE BAIE | Uw MAXIMAL |
Ouvrants à menuiserie coulissante |
2,6 |
Autres cas |
2,3 sauf pour les menuiseries métalliques jusqu’au 30 juin 2008 : 2,4 |
Dans tous les cas, le coefficient « Ug » du vitrage de la fenêtre de la porte-fenêtre ou de la façade rideau doit en outre être inférieur à la valeur de 2 W/m²K.
7°) Aide mémoire sur les principaux isolants thermiques
Isolant thermique laines minérales Isolants laine de verre et laine de roche. Les uns sont obtenus par centrifugation et soufflage de verre, les autres à partir du basalte. Ce sont les minuscules bulles d’air enfermées qui donne le pouvoir isolant (ou résistance thermique). Isolant thermique laines végétales Isolants issus de matières naturelles et renouvelables comme le chanvre, le lin et la laine de bois. Isolant thermique laines de recyclage Isolants issus de matières naturelles et renouvelables dite de recyclage, comme la laine de mouton, les plumes de canard, la laine de coton provenant de résidus de l’industrie textile. Isolant thermique polystyrènes et polyuréthanes Isolants issus de ta transformation du pétrole. Ils offrent des caractéristiques d’isolation très bonnes, ils sont légers, faciles à façonner et à mettre en œuvre. Isolant thermique isolants en vrac Isolants de type laine de roche à épandre ou résidus de cellulose, ou autre, livrés en sac, particulièrement adaptés pour les planchers anciens notamment des combles. Isolants thermiques minces Nouveaux isolants d’épaisseur inférieure à 25 mm, formés de bulles d’air ou/et de multicouches dont certaines sont réfléchissantes afin contrer le rayonnement infrarouge. Légers et peu encombrants, ils sont faciles à poser et permettent des gains de surfaces ou de hauteurs. Il faut, afin de s’assurer des réelles performances affichées, privilégier les fabricants de marque dont les produits sont certifiés (ACERMI). |
→ Arrêté du 3 mai 2007 relatif à la performance énergétique des bâtiments existants
Jacques Ortolas - Expert en Génie Climatique
Jacques Ortolas s'est spécialisé depuis des années dans la recherche de solutions d'économies d'énergie et d'exploitation optimisés des installations. Son expérience en la matière en fait un expert reconnu qui participe fréquemment à des groupes de réflexion chargés de définir les politiques énergétiques et environnementales.
→ SOURCES & LIENS
Merci pour le partage de cet article très complet! D'autant plus que les possibilités de rénovations augmentent avec les opportunités actuelle : éco-prêt à taux zéro jusqu’à
30 000 €, crédits d’impôt... C'est le moment de commencer des travaux !