Par Guillaume Sommerer, Journaliste à BFMTV et Philippe Nunes, directeur d’EnerJ-meeting
La 3ème édition d’EnerJ-Meeting a lieu ce jeudi 7 février 2019, une journée consacrée à l’Efficacité Energétique et Environnementale du Bâtiment, avec en ligne de mire la construction neuve 2020 mais surtout la rénovation énergétique.
Le contexte en France : environ 7 millions de personnes sont mal logées et ne peuvent plus payer des charges de chauffage de plus en plus élevées. La rénovation énergétique est un enjeu économique pour tout le monde, des moins aisés au plus aisés, et représente une source de consommation considérable en France. La question est : Les Français en 2019 sont-ils prêts pour la rénovation énergétique de leurs logements ?
On en parle avec : Philippe Nunes, directeur général d'EnerJ-Meeting - Intégrale Placements, du vendredi 1er février 2019, présenté par Guillaume Sommerer et Cédric Decoeur, sur BFM Business
Guillaume Sommerer - Journaliste : Les logements qui se transforment. La rénovation énergétique des bâtiments s’impose partout et elle va donc forcément vous toucher. Philippe NUNES, Directeur d’EnerJ-meeting, est avec nous pour en parler.
Philippe Nunes à BFM Business – Intégrale placements – le 1er février 2019
GS : EnerJ-meeting, c’est une journée que vous consacrez au bâtiment et en particulier à la rénovation énergétique des bâtiments, ce sera Jeudi 7 Février prochain, ça approche ! Une journée sur la rénovation énergétique des bâtiments : ça veut dire que c’est une thématique qui intéresse de plus en plus ?
PN : Je pense que c’est une thématique qui intéresse et qui est nécessaire avant tout. Il faut savoir qu’il y a 7 millions de gens qui sont mal logés et payent cher leur chauffage, finalement pour que leur chauffage passe par les fenêtres, les murs et également chauffe et pollue notre planète. Donc effectivement, cela impacte et intéresse déjà en premier lieu les personnes les plus modestes. Et puis ça intéresse aussi les professionnels, puisque, pour la première fois, nous avons un plan de rénovation énergétique important pour lequel l’Etat a investi 9 milliards d’euros sur son quinquennat. Il ne faut pas oublier que le bâtiment c’est un des poumons de l’économie française ; donc c’est à la fois les particuliers, effectivement les plus modestes, c’est important de le dire dans le climat social que nous traversons, mais également les professionnels du bâtiment qui sont concernés. Il y a un grand plan de relance économique, le plan de rénovation énergétique des bâtiments qui est en train de se lancer actuellement, avec un petit peu de retard, certes, mais qui augure vraiment des résultats très importants en 2019 et 2020 …
GS : Rappelons les enjeux : le bâtiment, c’est la première source de consommation énergétique au monde, devant les transports, largement.
PN : Oui, en France, c’est 45% de la consommation d’énergie finale, donc c’est une part très importante après les transports. Je pense qu’aujourd’hui il y en a assez d’être dépendant des énergies fossiles ; il y en a assez de chauffer les murs, pour que les murs chauffent l’extérieur et notre planète. La rénovation c’est aussi 99% du parc. Il faut savoir que le neuf en France, ne représente que 1% du patrimoine immobilier. Certes, le neuf est élitiste, il y a de nouvelles réglementations à venir dès 2020, plus vertes qui vont vers l’énergie positive, c’est-à-dire pour produire son énergie, qui vont vers des bâtiments bas carbone. Mais la rénovation touche 99% du parc, donc tous les Français et, j’insiste, touche plus sensiblement ceux qui sont dans la précarité énergétique.
GS : Alors, on en est où, justement en France, sur cette rénovation énergétique ? Vous nous disiez, « le gouvernement a lancé un plan de 9 milliards d’euros qui commence juste à entrer en œuvre » : on est là sur une véritable dynamique, une véritable prise en main du problème ?
PN : On est là sur une véritable dynamique et il n’y a jamais eu autant de facilités et d’aides financières qu’aujourd’hui pour la rénovation énergétique. Elles sont peut-être mal connues. Il y a un tout nouveau programme qu’a lancé l’Etat via l’ADEME, c’est le programme FAIRe qui est en train d’être communiqué et qui est fort prometteur, eu égard au contexte très important d’aides et d’accompagnements. Je vais vous donner un exemple. Un ménage qui a des revenus très modestes et qui veut installer une pompe à chaleur. Combien cela coûte-t-il ? Disons 11 000 €. Le ménage peut quasiment se faire financer son système de chauffage. Comment ? Sur les 11 000 €, l’ANAH, l’Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat, peut l’aider à hauteur de 5 000 €. L’Etat, via le « coup de pouce chauffage » ou la prime de reconversion, peut aider ce même ménage à hauteur de 4000 € + aide EDF 1000 € = 5000 €. C’est-à-dire, 5000 plus 5000 égal déjà 10 000 €. Le reste à financer n’est plus que de 1 000 €. Sur les 1 000 €, ce ménage a droit, comme d’ailleurs tous les français, au CITE, c’est-à-dire au Crédit d’Impôt Transition Energétique. En plus, sur ces 1 000 € je répète, le ménage à le droit à un prêt à taux zéro. C’est incroyable, mais l’installation d’une pompe à chaleur à 11 000 € peut quasiment être financée par l’Etat aujourd’hui. C’est vraiment quelque chose qu’il faut dire car le propriétaire, même s’il a des revenus modestes, peut se faire financer son installation de chauffage, ce qui donne quand même une valorisation à son bien, et en plus, qui va consommer moins, voire moitié moins d’énergie qu’auparavant, soit un gain de pouvoir d’achat à l’installation et en continu d’année en année.
GS : Il n’y a pas beaucoup de pays qui offrent ça honnêtement ?
PN : Non, en France, je comprends les mouvements sociaux qui existent actuellement, mais il faut savoir que nous avons des atouts, des pépites comme ça…
GS : …à côté desquels les français passent parce qu’ils ne sont pas assez informés. Vous publiez d’ailleurs une étude là-dessus, qui montre que les français sont encore mal informés d’un certain nombre d’aides auxquelles ils ont droit y compris pour le bâtiment et la rénovation énergétique.
PN : Oui, exactement. Je citais l’ANAH (l’Agence Nationale de l’Amélioration de l’Habitat), la moitié, donc 50% des français, savent ce que peut faire l’ANAH pour les aider, l’autre moitié, non. C’est tout de même un dilemme d’avoir des possibilités d’aides aussi importantes pour la rénovation de son chauffage et de son isolation et de ne pas en profiter. Moi-même qui suis un professionnel dans ce métier depuis plus de 30 ans je n’ai jamais vu ça. Donc, franchement, il faut lâcher les chevaux !
GS : Parce que c’est complexe aussi… Donc quelles mesures, - vous avez, dans ces études, demandé justement aux français – quelles mesures les motiveraient le plus à réaliser des travaux de rénovation énergétique ? Est-ce que ce qui est proposé là par le gouvernement correspond aux attentes, au type d’outils que les français réclament pour pouvoir réellement agir ?
PN : Les mesures qui sont proposées sont des mesures de bon sens. C’est-à-dire isoler le bâtiment, remplacer sa vieille chaudière par une nouvelle chaudière : voilà déjà deux mesures phares qui pourraient régler une grande partie des problèmes. Aujourd’hui, nous disposons de plus de solutions de régulation, de domotique qui sont extrêmement peu chères mais qui permettent d’éviter tout gaspillage d’énergie. Je crois qu’on a tout pour réussir.
GS : Est-ce qu’il y a une responsabilité des copropriétés puisque vous nous dites « les français ne sont pas suffisamment informés ». Beaucoup de français vivent dans des immeubles et des copropriétés, est-ce que les copropriétés sont responsables du fait de ne pas prendre ces carottes qui s’offrent à elles pour réaliser les travaux de rénovation énergétique ?
PN : Alors, elles sont responsables, oui et non, sachant que la copropriété rentre dans une problématique particulière. Tout simplement parce qu’il y a une « co-propriété », c’est-à-dire, et qu’il faut déjà créer du lien. Il peut y avoir des conflits, il peut y avoir des procès... La copropriété est un domaine d’intervention un peu différent de la maîtrise d’ouvrage organisé comme un office d’HLM par exemple où il y a déjà une culture technique du bâtiment. La copropriété dépend déjà de cette problématique, disons entre guillemets, humaine et sociale. Un point important et central pour créer du lien, c’est le syndic seul ou avec – et c’est souhaitable - des professionnels architectes et bureaux d’études. En copropriété, les avancées et le potentiel sont dingues. Je vais vous donner un exemple très éloquent quand on a envie de faire, donc envie c’est une manière collective de faire afin de valoriser jusqu’au bout la copropriété. Ce sont les opérations de surélévation / extension. Lorsque l’on a la possibilité de vendre un foncier, à Paris par exemple dont on connaît le prix du m², on peut vendre les m² de la toiture terrasse, soit plusieurs centaines de milliers d’euros. Ce foncier, pour faire une surélévation, va permettre d’embarquer toute la rénovation énergétique, isolation et autres, puisque, immédiatement et par un mode mécanique, on va pouvoir quoi qu’il arrive donner une valorisation à la copropriété, et en même temps, faire payer tous les travaux de rénovation énergétique, avec même un surplus, un gain. La copropriété, c’est du potentiel, exploitons-le !
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Guillaume Sommerer, Journaliste à BFMTV et Philippe Nunes, directeur d’EnerJ-meeting
SOURCES
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EnerJ-meeting est le rendez-vous annuel des décideurs du bâtiments, décideurs clés, prescripteurs maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre du bâtiment qui a lieu chaque année au Palais Brongniart à Paris.
Petite coquille : c'est 14 milliards et non pas 9 milliards le Preb. Il y avait déjà le Preh avant avec des moyens également.