La FEDENE ou Fédération des Services Energie Environnement qui propose des solutions globales depuis la conception/réalisation jusqu'à l'exploitation a élaboré un document dit contribution sur la Programmation Pluriannuelle de l’Energie.
Celle-ci, diffusée auprès des différents ministères, administrations et organisations concernés, est focalisée sur les sujets d’économies d’énergies dans les bâtiments et de chaleur renouvelable et de récupération qui constituent encore les deux principaux piliers quantitatifs de la Transition énergétique et de cette PPE Il (Programmation Pluriannuelle de l’Energie).
Une PPE divergente entre ambition et déclinaison détaillée
Le projet actuel de Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE II) marque à notre sens, une inflexion
politique forte autour de deux priorités qui tiennent en outre compte des récents mouvements sociaux et
d’une volonté d’efficience économique et environnementale :
→ priorité à la décarbonation, dans la perspective de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) :
réduction des consommations d’énergies et substitution des énergies fossiles les plus carbonées.
Cette priorité aboutit logiquement à cibler les secteurs de la chaleur et du transport qui
représentent les ¾ de nos consommations énergétiques finales et plus de 95% de nos émissions
carbonées (l’électricité qui représente un quart de nos consommations étant déjà décarbonée à
90%) ;
→ une volonté enfin clairement affichée de « maîtrise des coûts collectifs », d’accompagnement au
niveau social, et de préservation de la compétitivité de l’industrie. Cette orientation ne peut à notre
avis que se renforcer compte tenu des volontés politiques exprimées à l’issue du Grand Débat de
réduire les impôts donc d’optimiser les moyens publics de financement de la transition
énergétique.
Concrètement cette inflexion doit aboutir à la promotion des solutions les plus efficientes du point de vue
de la réduction des émissions de carbone et coût par tonne de CO2 évitée, qui sont aujourd’hui
parfaitement identifiées, et évoquées dans ce projet : d’une part les économies d’énergie les plus
efficientes dans les bâtiments et d’autre part la chaleur renouvelable et de récupération ; leviers
technologiques et environnementaux (versus isolation globale).
La FEDENE salue cette inflexion vers une logique de résultat qui nous semble tirer partiellement parti
des leçons du passé, et des résultats malheureusement très décevants de la précédente PPE, malgré
l’engagement de soutiens financiers publics considérables mais, à notre avis, insuffisamment efficaces et
surtout totalement déséquilibrés par rapport aux mêmes objectifs de cette précédente PPE (par rapport à
2012).
En effet, la nouvelle PPE fait ressortir un décalage très important des résultats et des objectifs par rapport
à la PPE antérieure, qui devrait interroger sur l’efficacité des dispositifs mis en place et les causes de cette
« inefficacité ». On constate :
‐ Un décalage significatif des objectifs d’économies d’énergies :
* en 2018 : ‐2% contre ‐7% prévus dans l’ancienne PPE
* en 2023 : ‐6% contre ‐12,6% prévus
Ce décalage est encore plus important sur les bâtiments avec des décalages respectivement de ‐
3% contre ‐10,7% en 2018 et ‐6% contre ‐17,9% en 2023.
→ de façon surprenante, aucune analyse quantifiée des émissions de CO2 n’est présentée dans la PPE,
alors que c’est l’enjeu principal affiché. L’analyse des données chiffrées fait apparaitre un décalage
significatif des émissions de CO2 et un report des objectifs de décarbonation des EnR&R
thermiques vers les EnR Electriques, notamment à partir de 2023.
En conséquence, la FEDENE regrette que cette inflexion ne soit pas prise en compte dans les objectifs
détaillés de la nouvelle PPE, qui s’inscrivent plutôt dans la continuité de l’exercice PPE précédent.
La FEDENE constate notamment que le critère d’efficience économique (mesurée en € par tonne de CO2
évitée) n’est pas réellement décliné dans les objectifs détaillés et constate à nouveau une absence de
cohérence entre les objectifs quantitatifs affichés et les moyens de soutien financiers.
Une PPE non financée
En outre, le scénario présenté repose sur la trajectoire carbone de la CCE, aujourd’hui suspendue. Par
conséquent, outre le fait que l’absence de visibilité est par nature contraire aux investissements nécessaires
qui sous‐tendent toutes ces solutions de transition énergétique, la PPE peut être considérée à ce jour
comme non financée, notamment sur ses deux plus importants objectifs :
→ chaleur renouvelable et de récupération dont la massification est conditionnée par l’attractivité
relative des solutions EnR thermiques par rapport aux énergies fossiles concurrentes ;
→ rénovations énergétiques des bâtiments les plus efficientes en matière de coût par tonne de CO2
évitée, (techniques et comportementales) qui dépendent en grande partie de la valeur anticipée
des économies d’énergie réalisées par rapport au coût d’investissement des bouquets de solutions
qui permettent de les engendrer.
Points d’attention et recommandations
Nous attirons l’attention des pouvoirs publics sur les points suivants :
→ La nouvelle PPE fait ressortir des retards très significatifs sur ces 2 sujets à l’issue de la première
période en 2018, et un glissement des objectifs futurs. Aucune analyse des causes de ces dérives,
de l’efficacité des actions menées n’est jointe à la PPE. Cela nous aurait semblé nécessaire et
logique, en particulier dans la logique de gouvernance actuelle d’évaluation ex post d’évaluer les
effets des mesures prises avant de tracer de futures trajectoires.
→ En particulier, il nous semble indispensable à la fois de recréer rapidement un cadre
économiquement équilibré, stable et prévisible (entre valeurs de marché et aides publiques)
permettant l’émergence des projets de transition, et de donner de nouvelles impulsions claires
pour renouer avec des trajectoires permettant de garantir la bonne atteinte des objectifs que se
fixe notre pays.
→ Il n’existe toujours pas d’articulation entre les objectifs nationaux repris dans cette PPE et leur
déclinaison au niveau des territoires, à qui pourtant a été déléguée la responsabilité de la définition
de de la mise en oeuvre de la stratégie énergie climat.
L’actuelle PPE nous semble à nouveau trop fortement orientée électricité, avec des enjeux en effet
spécifiques tels que sécurité d’approvisionnement et dénucléarisation, mais qui n’ont qu’un impact
limité sur la priorité affichée de décarbonation et d’efficience économique. En particulier, le sujet
du coefficient primaire d’énergie soulève un certain nombre de conséquences et de difficultés qui
nous semblent à ce stade insuffisamment analysées.
→ De façon générale, les scénarii décrits sont insuffisamment progressifs et reportent les objectifs
quantitatifs les plus ambitieux au‐delà de la première période de 5 ans à venir (en les accentuant
d’ailleurs pour rester cohérents avec les objectifs 2030). Reporter les échéances n’est à notre avis
pas le meilleur moyen de s’assurer de l’atteinte des objectifs à terme.
→ Il existe des solutions éprouvées, simples, reconnues par des organismes publics indépendants tels
que la Direction du Trésor, la Cour des Comptes, ou encore l’Observatoire des Contrats de
Performance Energétiques qui peuvent mettre en oeuvre, à condition de leur apporter le niveau
de soutien limité mais nécessaire et qui respecte l’objectif d’efficience économique en €/tonne de
CO2 évitée :
- la chaleur renouvelable, les réseaux de chaleur et de froid, la récupération de chaleur
industrielle fatale, l’optimisation de la chaleur de récupération sur les déchets…
- les économies d’énergie via une démarche par étapes en commençant par les
opérations de rénovation technique et comportementale « autoportantes
financièrement ».
→ Ces solutions, si elles nécessitent un appui financier complémentaire à court terme, sont, du fait
de leur équilibre financier dans la durée, créatrices de valeur, d’emplois non délocalisables et de
valorisation de ressources locales, dans une logique d’économie circulaire. Ces solutions qui
viennent en outre substituer des importations d’énergies fossiles, et qui constituent des leviers de
Croissance verte, sont insuffisamment mises en exergue dans le cadre de la PPE.
La FEDENE se tient à disposition des autorités pour approfondir et élaborer plus en détail et par segment
de marchés ces diverses solutions, en particulier dans le cadre des groupes de travail sur la rénovation
énergétique des bâtiments et la chaleur renouvelable actuellement en cours de constitution sous l’égide
de la Secrétaire d’état chargée de la Transition énergétique, Mme WARGON.
Pascal ROGER, Président de la FEDENE
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