Suivant une tradition bien établie, le syndicat ACR vous présente son évaluation du marché français de la régulation et de la gestion technique des bâtiments (GTB) pour l’année 2015 qui peut se résumer ainsi : « Une baisse anticipée dans un contexte peu favorable »
PRÉAMBULE
L’année 2015 a été marquée par des engagements politiques importants que sont la promulgation de la Loi de Transition Énergétique pour la Croissance Verte (LTECV), l’entrée en application des Directives Écoconception et Étiquetage Énergétique sur les équipements de chauffage et de climatisation ainsi que l’accord sur le climat à la COP 21 à Paris.
Ces mesures contribuent toutes à valoriser le rôle de la gestion active et efficace de l’énergie dans l’atteinte des objectifs collectifs de notre société mondialisée. Au triple niveau national, européen et international, l’efficience et la performance énergétique des bâtiments sont plus que jamais une priorité et le Syndicat ACR s’en réjouit.
Sur le plan européen et de par leur mise en œuvre en France, les modalités d’application des Directives Performance Énergétique des Bâtiments (2010/31/UE), Écoconception (2009/125/CE) et Étiquetage Énergétique (2010/30/UE) sont déterminantes dans l’atteinte des résultats attendus. Puisque la stratégie réglementaire de l’Union Européenne repose fortement sur la normalisation, le Syndicat ACR est particulièrement impliqué dans cette dynamique, notamment dans le cadre du mandat de normalisation M/480 financé par la Commission Européenne concernant la DPEB. Les normes qui en résulteront d’ici 2016 (série EN ISO 52000) devront impérativement s’articuler sans ambiguïté avec celles utilisées pour répondre aux exigences des Directives Écoconception et Étiquetage Énergétique.
Une application trop segmentée de ces normes conduirait à la fois à un échec des politiques énergétiques réglementaires et à une tension sur les marchés. Le Syndicat ACR fait donc une de ses priorités de veiller à la cohérence du cadre normatif et réglementaire en Europe et appelle les autorités réglementaires françaises ainsi que l’ensemble des parties prenantes à soutenir cette démarche.
Par ailleurs, le secteur du bâtiment connait actuellement de profondes mutations générées par de nouvelles technologies et de nouveaux modèles économiques auxquels le Syndicat ACR est particulièrement vigilant.
En premier lieu, la multiplication des offres réunies sous le terme « Internet of Things» (IoT) ou « Objets connectés » issues du monde de l’Internet bouleversent les pratiques et les attentes des consommateurs. Pour autant, au-delà des défis technologiques qui semblent chaque jour être dépassés, le supplément de confort qu’apportent ces technologies ne doit pas perturber la réponse aux besoins fondamentaux des usagers des bâtiments.
D’autre part, le Syndicat ACR suit activement le développement de la maquette numérique. Une vigilance accrue est portée sur la cohérence des référentiels en cours d’élaboration au niveau national, européen et international. En atteste la participation du Syndicat ACR et de l’Association BACnet au premier Salon BIM WOLRD des 6 et 7 Avril 2016.
Enfin, l’année 2016 sera marquée par le lancement d’une nouvelle certification eu.bac concernant l’interchangeabilité pour faciliter la conception, l’installation, l’exploitation et la maintenance des systèmes de GTB.
Sur ces sujets, les actualités sont à suivre sur les sites www.acr-régulation.com et/ou www.eubaccert.eu
PRÉSENTATION DES RÉSULTATS 2015
De manière générale, le marché global français a fortement chuté depuis 2008 avec un niveau historiquement haut évalué à 330,4 M€. Après avoir progressivement retrouvé ce niveau en 2013, la trop timide reprise du secteur du bâtiment se reflète dans les évolutions du marché 2015 qui a stagné puis baissé, se situant désormais à 327,2 M€.
Cette baisse fait écho à celle des permis de construire constatée depuis plusieurs années qui impacte désormais logiquement le marché de la régulation et de la GTB, expliqué par l’intervention différée de ses professionnels sur les chantiers. Toutefois, les services associés à la gestion des bâtiments continuent leur progression ce qui permet d’atténuer la décroissance du marché.
La baisse générale des prix entrainée par un marché en forte tension et l’arrivée de nouveaux entrants doivent également être pris en compte pour relativiser la baisse du marché en 2015.
Pour finir, aux éléments susmentionnés se cumulent également l’effet de la réglementation thermique RT2012 et le poids prépondérant encore accordé à l’isolation thermique dans le neuf, de même qu’en rénovation.
Les sections suivantes visent à analyser plus finement chaque catégorie du marché : régulation, GTB et services.
LA RÉGULATION
Après une période de croissance régulière de ses deux composantes que sont la régulation du chauffage individuel et collectif et la régulation de la ventilation et de la climatisation, le marché s’est brutalement interrompu en 2009 (- 6%). Par la suite, renouant avec une croissance annuelle fluctuant entre 2% et 0,5% jusqu’en 2013, ce marché est à nouveau en recul depuis 2014 (- 0,7%). En 2015, il s’évalue à 196,7 M€, soit une baisse de - 1,6%.
Les produits de régulation du chauffage sont particulièrement impactés du fait de l’amélioration de la performance intrinsèque des bâtiments neufs depuis l’entrée en vigueur de la RT 2012. Les besoins en chauffage sont moins importants qu’auparavant et l’utilisation d’une régulation adaptée, permettant d’apporter confort et efficacité tout au long de l’année, n’est pas encore suffisamment prise en compte.
Par ailleurs, le niveau élevé des températures en 2014 et 2015 (+ 0,4°C en moyenne) ne favorise pas le développement des solutions de régulation du chauffage, ce qui accentue la tendance à la baisse du marché. Les installations ont été moins sollicitées et par conséquent, la maintenance préventive et curative est moins importante.
La Régulation du Chauffage Individuel et Collectif
Après la chute de 2009, le marché a repris en 2010 (+ 3%), mais ce rétablissement ne s’est pas confirmé. En 2015, le marché est en régression pour la troisième année consécutive à 120,2 M€ soit - 2,7%.
Dans cette analyse, il faut distinguer :
- Le chauffage électrique :
- Le chauffage à eau chaude :
Depuis l’entrée en vigueur de la réglementation thermique RT 2012, le marché est en constante régression dans la construction neuve des logements résidentiels. En effet, le coefficient de conversion de l’électricité en énergie primaire, établi conventionnellement à 2,58 kWh d’énergie primaire par kWh électrique consommé, pénalise les solutions électriques.
Les innovations des industriels, qui visent notamment à prendre en compte l’inertie des bâtiments grâce aux délesteurs, ne suffisent pas à inverser la tendance du marché. Les économies financières qu’ils apportent mériteraient ainsi d’être connues d’avantage afin de soutenir leurs croissances annuelles.
Par opposition, la filière de la boucle à eau chaude bénéficie encore des dispositifs réglementaires en vigueur. Toutefois, la conjoncture du secteur du bâtiment impacte également ces solutions.
Globalement, le glissement vers les matériels performants et solutions énergétiquement efficaces se confirme. Mais les évolutions de la répartition des parts de marché se fait au bénéfice de nouveaux entrants sur le marché, notamment celui des intégrateurs. Les produits de régulation sont affectés différemment selon leur catégorie et les canaux de distribution utilisés.
Les thermostats de tous types sont à nouveau en régression sur 2015, à l’exception des thermostats d’ambiance programmables sans fil, qui constituent une solution efficace pour apporter confort et économies d’énergie dans l’existant.
L’offre abondante de thermostats dits « connectés » non captés par cette analyse tend à réduire d’autant plus les parts de marché des thermostats classiques, notamment en raison des bas prix qu’ils affichent. Le Syndicat ACR s’interroge sur les capacités de ces produits à atteindre les performances déclarées par certains fabricants en termes d’économies d’énergie. En particulier au regard des référentiels en vigueur dans le bâtiment auxquels une partie de cette offre pourrait ne pas répondre.
Concernant les robinets thermostatiques, l’évolution de cette famille de produits n’est pas corrélée avec les avantages qu’ils présentent. Cette technologie, efficace, bon marché et offrant des économies d’énergies, est désormais reconnue à travers la publication d’une fiche d’opération standardisée permettant de bénéficier de Certificats d’Économies d’Énergies (CEE). Leur utilisation systématique en rénovation se traduirait rapidement par une réduction de la consommation énergétique du parc des radiateurs vieillissants. La prise en compte la plus large possible de cette recommandation sera un des axes d’actions prioritaires du syndicat ACR en 2016.
Les régulateurs, en fonction de la température extérieure, pour le chauffage individuel sont en baisse, tout comme les modèles communicants pour le collectif. Toutefois, la baisse est moins importante pour cette catégorie, eu égard aux travaux de rénovation engagés qui se traduisent souvent par un remplacement des chaudières traditionnelles par des solutions intégrant une régulation (en fonction de la température extérieure). Ce marché devrait se renforcer avec l’entrée en vigueur des futures réglementations sur l’existant. De plus, avec la poursuite du programme de rénovation des bâtiments, récemment réévalué à la hausse avec un objectif de 700 000 logements rénovés (communication ministérielle du 3 Mars 2016) renforcera encore ce marché.
En outre, le Module Thermique d’Appartement (MTA) continue à s’imposer comme une solution innovante pour atteindre de fortes économies d’énergie dans le logement collectif en remplacement des chaudières à gaz individuelles. Les MTA sont d’ailleurs maintenant pleinement prises en compte dans les calculs réglementaires. Ce développement confirme leur succès puisque le marché 2015 enregistre à nouveau une forte progression de 37%. Les MTA favorisent également le bilan carbone des bâtiments dans lesquels ils sont mis en œuvre lorsque l’énergie qu’ils utilisent provient des réseaux de chaleur.
Par ailleurs, les MTA constituent une solution pertinente pour répondre à la future réglementation sur la répartition des frais de chauffage individuel. Le développement de ce marché constitue donc une priorité pour les adhérents de l’ACR, notamment à travers les travaux de son pôle Hydraulique.
Enfin, le marché des vannes auto-équilibrantes résiste à la baisse globale du marché et connait une croissance prometteuse. Les exigences réglementaires en termes d’équilibrages hydrauliques des colonnes dans le collectif contribuent à cette bonne performance.
La Régulation de la Ventilation et de la Climatisation
Évoluant de façon inconstante depuis une dizaine d’années, ce marché connait actuellement une stagnation à 76,5 M€ en 2015 (+ 0%). Toutefois, l’évolution à la baisse des prix ne doit pas estomper la légère croissance de ce marché.
En effet, les besoins croissants en renouvellement d’air accentués par les progrès réalisés en matière d’isolation et d’étanchéité viennent soutenir le développement de ce marché. Les variations suivantes permettent d’expliquer la situation actuelle :
- Les régulateurs non communicants sont encore présents et se maintiennent à un bon niveau de croissance. La prise en compte du coût global de ces solutions devrait à terme reporter cette croissance sur les solutions communicantes.
- Les produits s’appuyant sur des protocoles de communications propriétaires sont en très nette régression tandis que ceux reposant sur les protocoles ouverts et standardisés sont largement plébiscités, notamment ceux qui utilisent le protocole BACnet.
- La régulation pièce par pièce répond au besoin croissant d’une gestion active de la partie CVC, de l’éclairage et des stores.
- La famille des moteurs de registre accompagnant le développement des solutions de climatisation à air est en bonne santé. Cela étant, l’arrivée d’une offre moins qualitative, mais plus compétitive issue de nouveaux acteurs, impacte l’analyse du Syndicat ACR.
LA GESTION TECHNIQUE DES BÂTIMENTS
Si la gestion technique des bâtiments (GTB) connaissait une croissance cumulée de 25% de 2005 à 2007, la crise de 2008 a là aussi considérablement affecté ce marché qui s’est progressivement rétabli à son niveau d’avant crise. Il entame désormais une phase décroissante depuis 2013.
Le marché s’établit à 71,6 M€ en 2015, ce qui correspond à une régression de - 6,7%.
Sur ce marché, on constate en particulier le développement des systèmes à intelligence décentralisée qui se traduit par une augmentation des unités de traitement local à faible capacité. Parallèlement, le nombre de licences pour les postes centraux continue à diminuer. Leur rôle a tendance à se réduire, en particulier lorsqu’il se limite à des fonctions de supervision qui impliquent un transfert complet des fonctions de gestion énergétique sur les unités de traitement local.
Par ailleurs, l’utilisation de régulateurs communicants pour augmenter les économies d’énergies des systèmes de GTB est désormais une offre reconnue qui devrait se maintenir. Toutefois, elle ne permet pas de soutenir durablement ce marché du fait de l’évolution non proportionnelle du nombre de produits vendus. La priorité actuelle donnée à l’isolation dans la rénovation ainsi que la baisse des nouveaux projets ne permet pas de travailler en régime de croissance sur ce marché.
LES SERVICES REGULATION ET GTB
Les services considérés ici sont essentiellement ceux qui sont liés à la GTB, c’est-à-dire les contrats de maintenance et d’entretien sur les matériels et logiciels installés. Ce marché est en croissance depuis une dizaine d’années et les résultats 2015 confirment à nouveau cette tendance.
Historiquement, l’année 2008 avait même été marquée par une progression de + 18,5% malgré la crise impactant les autres secteurs, la croissance avait perduré en 2009 avec un taux plus modeste de + 6%. Depuis, les évolutions sont maintenues à un taux positif.
À 58,9 M€ en 2015, le marché des services est en croissance de + 3,5%.
Les constructeurs, notamment ceux représentés au sein du Syndicat ACR, restent les plus compétents pour assurer les services liés à la GTB. En tant qu’interlocuteurs privilégiés et de confiance, ils séduisent naturellement les utilisateurs. Ce marché continue donc sa progression, à un rythme toutefois légèrement moins soutenu par rapport aux années précédentes ce qui s’explique par le manque de vitalité du marché global du bâtiment.
CONCLUSION
L’année 2014 s’est marquée par une stagnation du marché global de l’ACR malgré le contexte économique difficile du secteur du bâtiment qui peine à renouer avec son niveau d’avant crise. L’activité du secteur n’étant pas encore franchement repartie à la hausse en 2015, il était inévitable que les résultats se dégradent.
En effet, les constructeurs de matériels et produits de régulation et GTB ne bénéficient pas encore du léger rebond encourageant des derniers mois, compte tenu de leur intervention différée d’environ deux ans sur le lancement des nouveaux chantiers.
Enfin, les services associés à la gestion active de l’énergie continuent leur progression et les avantages perçus par les clients suite à la mise en œuvre des produits de régulation et GTB performants sont de plus en plus reconnus. Toutefois la baisse du niveau général des prix des produits, engendrée par l’arrivée de nouveaux entrants, pénalise les performances globales du marché.
PERSPECTIVES 2016
Parmi les défis prioritaires en 2016, la pleine intégration du métier transversal de la régulation et de la GTB au nouveau modèle économique et technologique qu’est la maquette numérique (BIM), est fondamentale.
De plus, l’utilisation de la régulation et la GTB pour faciliter la gestion des énergies renouvelables (produites à l’intérieur et/ou à l’extérieur du bâtiment) couplée aux interactions avec les réseaux d’énergies « grids », doit conduire au « Smart Building », puis au « Smart City ». Dans ce domaine, les travaux de normalisation sur le « Facility Smart Grid Information Model » (FSGIM), à travers le projet de norme ISO 17800, sont essentiels pour permettre une communication bidirectionnelle efficace entre les bâtiments et les réseaux d’énergies, en s’appuyant sur les protocoles de communication ouverts tels que BACnet.
En outre, la mise en place des compteurs de mesure de tous types associés à la GTB répondra aux objectifs de « Smart Metering » (ou comptage intelligent).
Par ailleurs, les objets connectés « IoT » représentent un défi pour la profession, car ils font évoluer la façon d’aborder Internet. Réciproquement, les nouveaux acteurs et leurs technologies doivent s’adapter au monde de la régulation et GTB, comme le font déjà les adhérents du Syndicat ACR. Fort de son expertise de plus de 40 ans, le Syndicat ACR attache la plus grande importance au respect des référentiels normatifs et réglementaires applicables afin de garantir la satisfaction des usagers et la pérennité de ce nouveau marché. Avec l’association BACnet France, le Syndicat ACR et ses adhérents souhaitent d’ailleurs valoriser l’utilisation de protocoles de communication ouverts et standardisés tels que BACnet, KNX et LON. Ils représentent une solution particulièrement adéquate pour fédérer le(s) réseau(x) de communication au sein d’un bâtiment et permettre aux exploitants une gestion efficace de l’ensemble de ces systèmes et équipements incluant les objets connectés.
Enfin, la cyber sécurité va imposer de plus en plus de contraintes. Sa mise en œuvre devra se faire à une échelle la plus large possible.
En conclusion, les performances reconnues des solutions mises en œuvre par les professionnels de la régulation et de la GTB constituent un ensemble de réponses adaptées aux défis technologiques actuels. Celles-ci concourent à la réduction de la consommation énergétique, tout en maintenant un haut niveau de confort et autorisant le développement des énergies renouvelables.
Les travaux de normalisation en cours au niveau européen et international sur la performance énergétique globale des bâtiments et de ses équipements devraient aussi tirer le marché à la hausse et permettre de le réguler. Il est primordial que ces référentiels soient effectivement pris en compte par les autorités réglementaires à l’avenir.
Ainsi, conjugué à un espoir de reprise de l’activité dans le secteur du bâtiment, le marché global de la régulation et de la GTB devrait pouvoir renouer avec la croissance dans les 12 à 18 mois à venir. La capacité des adhérents du Syndicat ACR à accompagner et maîtriser la forte évolution actuelle des technologies, en s’appuyant sur la cohérence des référentiels normatifs, réglementaires et de certifications, sera un élément déterminant de succès.
Source et lien
Syndicat des Automatismes du génie Climatique et de la Régulation
11-17 Rue de l’Amiral Hamelin 75016 Paris
Tél. : 01 45 05 71 22
http://www.acr-regulation.com/