Quel dimensionnement pour les PAC hybrides collectives sur le marché du neuf ?

Par Vincent LALLEMAND, Responsable efficacité énergétique GRDF – CEGIBAT

Depuis l’application de la réglementation environnementale, la RE2020, plus d’une centaine d’études réglementaires ont été analysées avec la solution pompe à chaleur hybride collective. Le constat est chaque fois le même : la solution PAC hybride collective respecte les seuils 2025 de la RE2020 ainsi que l’étiquette A du DPE ! Et ce, sans renforcement de bâti, avec un bâtiment standard à Bbiomax que rien ne différencie des solutions concurrentes.

Ainsi, le positionnement réglementaire RE2020 de la solution PAC hybride collective est aujourd’hui confirmé, cependant le sujet du dimensionnement optimal de cette solution « biénergie » reste à affiner afin d’obtenir un optimum technico-économique capable de passer les seuils 2025 de la RE2020, voire de l’étiquette A du DPE, tout en conservant un investissement le plus raisonnable possible et donc une puissance de PAC la plus faible possible.
C’est tout l’objet des travaux lancés avec les industriels fabricants fin 2022 et dont les enseignements majeurs sont fournis dans cette parole d’expert.

Objectifs et approche méthodologique de cette étude

Entre mi-2022 et fin 2023, sept fabricants, tous intéressés par la Pompe à Chaleur (PAC) hybride collective, ont été sollicités pour collaborer avec Engie Lab Crigen dans le but de définir le dimensionnement optimal de ces systèmes. L'objectif primordial était de garantir la conformité avec les normes de la RE2020 d'ici 2025, tout en optimisant l'investissement initial et en tenant compte d'autres aspects tels que l'encombrement, les coûts d'exploitation, la facture énergétique et la puissance électrique de raccordement.

Chaque fabricant a reçu pour mission de concevoir simultanément une solution avec une PAC hybride collective et une autre avec une PAC fonctionnant à 100 %, pour trois types de bâtiments distincts. Par la suite, Engie Lab Crigen a procédé à la modélisation de ces projets dans les huit zones climatiques, en se basant sur les données techniques fournies par les fabricants. L'objectif était d'optimiser le dimensionnement en recherchant à chaque fois la puissance minimale de PAC nécessaire pour respecter les normes de la RE2020 pour 2025. Dans chaque étude de PAC hybride collective, l'hybridation a été effectuée pour les deux usages, chauffage et Eau Chaude Sanitaire (ECS), en utilisant diverses solutions selon les fabricants : soit une PAC dédiée pour chaque usage, soit une PAC unique pour les deux usages.

Trois bâtiments représentatifs ont été examinés isolément en respectant les normes de la RE2020 (Bbio = Bbiomax - RE2020)

Enseignement n°1

Dimensionnement : 20 à 40 % des pertes thermiques selon Engie Lab

Un dimensionnement optimal de la Pompe à Chaleur (PAC), sans système d'appoint, fonctionnant à des températures de 0 °C à l'extérieur et à 50 °C en départ chauffage, est crucial pour garantir que la PAC hybride puisse satisfaire aux exigences de la réglementation environnementale (RE) en 2025 et obtenir l'étiquette A du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE), tout en minimisant les coûts d'investissement. Selon les analyses effectuées, ce dimensionnement optimal se situe entre certaines valeurs spécifiques, notamment en climat froid (H1a), pour les immeubles collectifs de taille moyenne à grande.

Dans les grands bâtiments collectifs, la proportion de la puissance de la PAC par rapport à la taille du bâtiment est plus faible. En d'autres termes, par rapport à une solution 100 % électrique, la puissance de la PAC dans une PAC hybride collective est réduite d'un tiers, et la taille du ballon peut être diminuée de moitié.

Ces valeurs fournissent une première approximation pour le dimensionnement de la PAC dans une configuration hybride collective. Cependant, une étude plus approfondie, réalisée par un bureau d'études thermiques en fonction du projet spécifique et du fabricant choisi, permettra d'optimiser davantage cette puissance. En effet, une puissance de PAC plus faible se traduit par des économies d'investissement plus importantes.

Ratio de la puissance de la PAC par rapport aux pertes de chaleur entre 0 et 50°C

Enseignement n°2

PAC : couverture de 60 à 80 % des besoins en chauffage et ECS

Après avoir déterminé ce dimensionnement optimal, nous avons utilisé l'outil de calcul RE2020 pour évaluer la part des besoins en chauffage et en eau chaude sanitaire (ECS) couverts par la Pompe à Chaleur (PAC). Le taux de couverture de la PAC est calculé en pourcentage, représentant la quantité d'énergie fournie par la PAC sans l'appoint par rapport aux besoins annuels totaux en chaleur pour le chauffage et l'ECS de la résidence. Dans cette analyse, la PAC couvre entre 60 et 80 % des besoins combinés en chauffage et en ECS pour les immeubles de taille R+4/R+6, quel que soit le climat local. Sur un immeuble de 18 logements, cette proportion est encore plus élevée.

Pourcentage des besoins en chauffage et en eau chaude sanitaire satisfaits par la PAC

Enseignement n°3

PAC hybride collective : normes RE2020 et label énergétique A d'ici 2025

Avec le dimensionnement décrit précédemment, la PAC hybride collective atteint les objectifs de 2025 et l'étiquette A du DPE. Selon l'IC énergie de la RE2020, ses émissions se situent entre 4 et 5 kgCO2éq/m²/an, bien en dessous des 6,5 kgCO2éq/m²/an imposés pour 2025 (et bien en dessous des 14 kgCO2éq/m²/an de 2022). La consommation d'énergie primaire se situe entre 50 et 60 kWhep/m²/an, avec une marge par rapport aux seuils réglementaires légèrement inférieure à celle d'une PAC 100 % électrique.

Performance de la PAC hybride collective pour 2025 selon la RE2020 et l'étiquette A du DPE

Enseignement n°4

Économies importantes grâce à la PAC hybride collective

Les coûts des équipements et du stockage sont basés sur les estimations des fabricants, après ajustement de la puissance de la PAC pour répondre aux normes de la RE2020 et à l'étiquette énergétique A du DPE. Les coûts annexes ont été évalués par un économiste du bâtiment. Les économies d'investissement varient entre -1 300 € et -1 500 € par logement pour les immeubles R+4 et R+6, et sont moins élevées pour les immeubles R+2. De plus, la PAC hybride permet un dimensionnement sur un régime de température de 70/50 °C, ce qui permet d'utiliser des radiateurs de taille modeste dans les logements.

Coûts d'installation des PAC et PAC hybrides en R+4

Enseignement n°5

PAC hybride : réduction de 2 à 7 fois de la demande électrique en pic

En suivant la règle de dimensionnement mentionnée, la puissance de la PAC d'une PAC hybride collective est réduite de 2 à 5 par rapport à une PAC électrique seule. En plus de cela, il y a les puissances nécessaires pour le chauffage d'appoint électrique et la préparation de l'ECS. Cette puissance d'appoint est fournie par la chaudière dans le cas d'une PAC hybride collective. Avec cette solution, la demande électrique en période de pointe peut être réduite de 2 à 7 fois par rapport à une PAC électrique seule, en utilisant un mode de pilotage "base + appoint". Cela a un impact direct sur la taille des transformateurs nécessaires et sur la facture énergétique. Passer à un tarif jaune est inévitable avec une PAC 100% électrique, ce qui doit être pris en compte, surtout dans les régions où la puissance électrique disponible est limitée.

Enseignement n°6

Économies énergétiques grâce à une PAC hybride collective

La facture pour les 34 logements, d'une moyenne de 71 m² chacun, prend en compte les coûts des services communs et des équipements électriques. Opter pour une pompe à chaleur hybride maintient l'abonnement électrique sous 36 kVA, évitant ainsi des coûts plus élevés. Bien que la facture annuelle soit légèrement inférieure avec la pompe à chaleur hybride, l'impact de l'abonnement au gaz est négligeable, représentant moins de 1% de la facture totale.

Frais énergétiques pour nouveaux logements collectifs selon la RE2020

Enseignement n°7

Réduction du bruit et de l'espace grâce à l'hybridation

Installer une pompe à chaleur nécessite toujours la mise en place d'une unité extérieure sur le site. L'emplacement de cette unité influence les nuisances sonores, qu'elle soit installée en toiture, en rez-de-jardin ou en intérieur avec un système de gainage. Une étude acoustique préliminaire permet de prendre en compte ces contraintes et de mettre en œuvre des mesures acoustiques telles que des pièges à son ou des caissons acoustiques lorsque cela est possible. L'utilisation d'une solution hybride, par rapport à une pompe à chaleur 100% électrique, permet de réduire l'impact sonore en divisant la puissance installée par deux à cinq.

En ce qui concerne l'encombrement, une étude montre que l'installation d'une pompe à chaleur hybride collective permet de diviser par deux les volumes de stockage, grâce à la puissance disponible sur la chaudière. De plus, elle réduit le nombre et parfois l'emprise au sol des unités extérieures de la pompe à chaleur, qui sont moins nombreuses et moins puissantes que dans une solution entièrement électrique.