Par Alain MAUGARD, président de QUALIBAT le 04 Juillet 2019
Quand l’industriel apporte sa connaissance
Comme nous l’avons vu, l’industriel peut être appelé autour de la maquette virtuelle. Cela peut être par le maître d’ouvrage, par le concepteur et par l’entreprise.
Commençons par le maître d’ouvrage. Celui-ci peut être amené à réaliser des projets répétitifs par exemple des logements, des hôtels, des commerces, … C’est le maître d’ouvrage qui veut que l’on pose telle ou telle marque qui correspond aux usages des occupants et à leurs besoins. Sans la citer, évoquons cette marque de sèche-serviette imposée par exemple par les promoteurs et installée dès l’appartement témoin !
Le deuxième acteur qui a intérêt à discuter avec les industriels, c’est l’architecte. Pour des questions de complexité et d’originalité d’ouvrage, voire d’esthétique, l’architecte peut être amené à faire intervenir l’industriel dès la conception, car l’originalité du projet architectural passe souvent par des composants spécifiques non standards, c’est le cas notamment des revêtements de façades, façades vitrées, double façades.
Enfin l’entreprise aura intérêt à faire appel à l’industriel dans de très nombreux cas notamment pour des raisons économiques de chantier. Par exemple, pour que la mise en œuvre soit la plus facile possible et que toute la gestion de chantier puisse se réaliser d’une manière la plus optimisée possible et la moins coûteuse. Cela passe par le packaging des matériaux, leur poids, leur dimension adaptée, leur protection, … Tout ce dialogue technique et pratique se passe directement entre l’entrepreneur et l’industriel. Les deux apportent leurs connaissances et savoir-faire. Chacun comprend le métier de l’autre ; c’est le propre du travail collaboratif !
Le séquentiel appauvrit, le collaboratif enrichit
Beaucoup d’industries se sont développées en taille en jouant sur un effet d’échelle pour augmenter leur productivité.
Dans le futur, ce n’est pas évident qu’une unité de fabrication soit forcément de taille importante pour être compétitive. Ne va-t-on pas vers des entreprises mixtes par exemple pour certaines filières du bâtiment comme le bois. Sont-elles plutôt industries ou entrepreneur ? Certaines ont muté du statut d’entrepreneur à partir du moment où elles ont eu un bureau d’études et des unités de fabrication, elles sont devenues fabricant / entrepreneur. A l’inverse les industriels eux-mêmes tentent de devenir des entrepreneurs et tentent de monter leur réseau d’installateurs !
Ce qui est essentiel, c’est qu’à partir du moment où nous sommes passés d’une approche séquentielle à une approche collaborative, il y a un enrichissement des compétences de chacun. Chacun comprend le métier de l’autre, les interfaces sont mieux gérées et ce travail collaboratif génère des économies de coûts de construction et autres (exploitation, maintenance, …)
Les autres acteurs ?
Ces deux dernières chroniques ont montré comment le changement de paradigme et de comportement autour d’un nouveau mode de travail, collaboratif et participatif, améliore à la fois le coût et la qualité de la construction. Maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’œuvre, entrepreneur et industriel ont été passés au peigne fin, et chacun montre son réel potentiel à œuvrer dans ce sens.
Certains acteurs non cités de la construction sont importants et doivent également se rassembler autour du travail collaboratif. Par exemple les bureaux de contrôle qui sont au service du Maître d’Ouvrage, ils doivent « rentrer dans l’arène ».
D’autres fonctions comme l’OPC (ordonnancement, pilotage, coordination) ou le SPS (sécurité, prévention de chantier), sont issues de la démarche séquentielle, et il serait heureux de redistribuer ces fonctions auprès de l’architecte par exemple car c’est lui qui a une vision d’ensemble et de synthèse ; mais cela suppose qu’il élargisse ses compétences. Dans le futur, il faudra aussi se préoccuper du gestionnaire BIM. Cette fonction va être nécessaire mais faut-il créer un acteur nouveau ? La réponse est non. Il faut absolument la confier à un des acteurs existants en spécifiant qu’il est chargé de cette mission nouvelle. Désormais, l’enrichissement des tâches ou les tâches nouvelles doivent être confiées à des acteurs existants déjà assez nombreux.
Si la mutation des acteurs autour du travail collaboratif permet une rupture des comportements et une baisse importante des coûts de construction il reste un pan important d’économies que nous apportera l’échelle industrielle. Comment faire baisser les coûts des matériaux, équipements, notamment des EnR si indispensables à la réalisation des bâtiments performants comme le Bepos.
C’est ce que nous verrons dans notre prochaine chronique.
Alain Maugard