Par Alain MAUGARD, président de QUALIBAT le 04 Juillet 2019
Avant de nous diriger complètement vers les modes de vie, regardons de plus près la structure et le fonctionnement de la ville : en clair comment elle vie dans sa morphologie donnée.
Une ville durable qui tire parti de sa morphologie
Comme pour le bâtiment, nous pouvons parler de morphologie de la ville.
Morphologie du bâtiment et morphologie de la ville. Dans le bâtiment, existe sa morphologie et la façon dont on l’exploite, dont on optimise sa gestion, de sa construction à sa reconstruction, soit son cycle complet. Quand nous avons travaillé sur le BEPOS, nous nous sommes intéressés en premier à toute sa phase d’exploitation pendant sa durée de vie et on a d’abord diminué sa balance énergétique de sa phase d’exploitation pour la rendre positive. Puis, nous avons fait apparaître l’énergie grise de sa phase construction et de son cycle de vie, en voulant nécessairement la diminuer.
A ce sujet, les industriels du bâtiment demandent que l’on fasse une analyse énergie grise sur le cycle de vie des matériaux (un matériau qui dure 100 ans, est bien différent de celui qui dure 20 ans). L’énergie grise des matériaux de construction est liée à la durée de vie des matériaux y compris aux possibilités de recyclage.
A l’échelle de la ville, sa morphologie, en dehors de quelques villes neuves, est un mixte de quartiers neufs et de quartiers anciens. Pour la ville, c’est comme pour le bâtiment, la quantité de l’existant est notablement plus importante que la partie neuve. Il y a prédominance du stock.
Une ville qui évolue ne renouvelle son stock que progressivement. Aujourd’hui, nous agissons localement sur la partie neuve minoritaire, et nous rénovons une partie du stock. Nous disposons ainsi de toute une partie de la ville dont la morphologie va rester la même. La morphologie d’une ville, c’est la morphologie de son ensemble existant et c’est une donnée relativement invariable à l’échelle du court moyen terme, nous n’allons pas raser des villes pour construire des villes nouvelles. Nous verrons que la morphologie de la ville et surtout des centres villes même anciens, représente plutôt une force qu’une faiblesse.
Ainsi pour la ville, comme pour le bâtiment sinon plus, nous devons poser la question non pas de la morphologie mais de son fonctionnement, de la façon dont elle vie, dont on la gère. Cela s’appelle le métabolisme : le métabolisme de la ville. La comparaison avec un être vivant est osée mais intéressante et présente des similitudes. Car la ville est vivante, elle possède des flux entrants, des flux sortants et recyclés, qui la font vivre. Des entrants et sortants tels que l’eau et les eaux usées, l’énergie, les matériaux plus ou moins renouvelables qui vont devenir déchets, des entrants alimentaires qui termineront également en déchets.
Nous devons donc tirer parti de la morphologie de la ville. Dans la plupart de nos villes en France et en Europe, nous ne pouvons pas raser pour reconstruire ; néanmoins nous pouvons bénéficier d’une grande partie de cette morphologie ; notamment, aussi curieux que cela puisse paraître de la partie la plus ancienne. A partir d’une morphologie donnée, si nous analysons le métabolisme de la ville alors nous avons de nombreuses actions à mener. Plus les zones sont denses, plus le métabolisme est en jeu car il y a plus de consommation d’énergie, d’eau, plus de transport, … Nous avons donc matière en modifiant le métabolisme à réduire l’empreinte écologique.
La morphologie du centre-ville ou le cœur de la ville durable
Le centre-ville, la vieille ville, la ville historique (Moyen âge, renaissance, classique) les quartiers Haussmanniens sont sources de potentiels élevés. Ces zones peuvent s’adapter à des transports en commun, ou des mobilités douces (vélos), ainsi qu’à des zones piétonnes pourvues d’activités commerciales et artisanales.
Ainsi retrouver des commerces de proximité, permettra à la ville de présenter une empreinte écologique plus faible tout en apportant un capital bonheur aux usagers et occupants. La très bonne nouvelle c’est que la morphologie, des villes héritées de l’ancien temps, peut être conservée et transformée pour faire baisser l’empreinte écologique de leur métabolisme.
La ville ancienne était autosuffisante, elle produisait des biens qu’elle s’achetait elle-même en auto consommant tout en commençant à échanger le surplus avec le reste du monde. La mondialisation n’était pas sa première préoccupation, c’était d’abord l’autoproduction et l’autoconsommation de la production locale donc ramenée à la ville. Nous nous disons que nous pouvons la reconquérir. C’était une évidence que l’on avait perdue de vue ; la ville ancienne était sobre à moins de 2000 W tout en étant agréable à vivre.
En revanche, la ville la plus compliquée (au sens de diminuer l’empreinte écologique de son métabolisme) est celle qui s’est étalée, celle qui ne fonctionne que par l’usage de la voiture et qui sectorise les individus et « zone » les modes de vie. Cette ville plus récente, la plupart du temps moins belle, c’est elle qui fait « déborder le bilan ». C’est celle-là qu’il faut transformer en profondeur, en retouchant aussi sa morphologie (par exemple en créant de nouvelles centralités).
Tout a été fait pour que nous soyons un consommateur cloisonné dans notre façon de vivre, de nous loger, et de consommer. On nous a amené à l’hypermarché qui a détruit le commerce de proximité et qui a rallongé les distances, sans apporter forcément un capital bonheur supplémentaire. Nous redécouvrons petit à petit le commerce de proximité, les denrées locales, l’agriculture urbaine que l’on avait perdue de vue. Est-ce économiquement logique que les terres à potentiel maraicher à 50 km de Paris d’une fertilité extraordinaire ne soient utilisées que pour une agriculture céréalière, de plus subventionnée par l’Europe ? Il est certain que nous ne sommes pas dans un optimum économique, ni écologique, ni tourné vers l’individu.
Ce que nous avons fait sur la ville en l’étalant à l’excès et en utilisant des surfaces urbaines au détriment de l’agriculture, est très critiquable d’autant plus que cela s’est accompagné d’un surcroît d’infrastructures avec toujours plus d’investissements de capacité. Il y a ainsi hypertrophie de l’infrastructure qui n’est pas utilisée au mieux du métabolisme et insuffisance d’intelligence d’exploitation.
Intelligence d’exploitation et adhésion rapide des usagers
L’intelligence d’exploitation n’est pas synonyme d’investissement démesuré et elle nous renvoie aux modes de vie et à notre propre intelligence de vie. Un exemple éloquent est celui du succès des rues piétonnes qui au début avaient soulevées des critiques de la part des commerçants eux-mêmes, qui sont aujourd’hui les premiers à les plébisciter. L’exemple des couloirs de bus l’est également. Qui aurait pensé que le maire de Paris aurait pu être réélu en aménageant des couloirs de bus. Aujourd’hui un maire met en avant sa ligne de tramway pour favoriser sa réélection alors qu’il y a peu, il aurait été battu à cause d’elle !
Cela veut dire que le mental des individus a changé. Cette nouvelle vision urbaine, même si elle ne s’applique pas partout est en marche et va nous changer. Nous devenons favorables aux transports collectifs, aux zones piétonnes, aux zones 30 mixtes partagées : aux commerces de proximités, à l’agriculture proche, .., Et cela va à une vitesse grand V.
Ce qui vous attend pour la prochaine chronique ?
Il est extraordinaire que partant du BEPOS bâtiment, nous ayons été amenés à réfléchir à nos modes de vie et à notre qualité de vie. Prochainement nous verrons comment avec un changement de métabolisme c'est-à-dire avec une nouvelle gestion de la vie de la ville et en libérant les initiatives de ses occupants, nous pouvons gagner en sobriété énergétique, en empreinte écologique et en qualité de vie.
Nous verrons cela prochainement, …
Alain Maugard
Très triste de voir que ces remarques viennent d'un habitant de l'ile de France qui croit que c'est pour tout le monde pareil.
Du coup il modélise sur Paris et sa banlieue!
Ce n'est ni l'avenir de la France ni l'identité de la France.
C'est un cas à part entre parisiens qui croient pouvoir penser pour le monde!