La petite cogénération en panne

Afin de stimuler un marché atone, plusieurs acteurs européens se sont regroupés pour promouvoir la filière.

Les lecteurs les plus fidèles de ces colonnes l’auront noté : la grande majorité des fabricants de chaudières s’intéressent à la cogénération dans ses déclinaisons applicables au résidentiel collectif et au tertiaire (mini et micro-cogénération, puissances inférieures au MW). Baxi, Buderus, Viessmann, De Dietrich et autres Vaillant développent des unités de cogénération en passe d’être mises sur le marché, dans tous les types de technologies disponibles (combustion interne, combustion externe, pile à combustible, micro-turbine à combustion).
Problème : le marché tarde à prendre son essor. Le constat, valable pour de nombreux pays européens, est particulièrement patent en France où, situation paradoxale, le volontarisme institutionnel n’est pas suivi d’effets. D’où un cadre réglementaire mettant à mal la viabilité des projets, avec notamment, un tarif d’achat par EDF de l’électricité suspendu à une durée annuelle de fonctionnement trop courte (3 624 heures), ainsi que des coûts de raccordement au réseau électrique élevés.
Sans parler du renchérissement du gaz, qui n’aide pas à la rentabilité des petites installations. En l’état actuel des choses, les rares projets français de cogénération concernent essentiellement l’industrie et le tertiaire (hôpitaux, universités…), les technologies étant encore trop onéreuses pour des particuliers. En revanche, l’habitat collectif, via les bailleurs sociaux, constitue d’ores et déjà un débouché plus sérieux. Dernièrement, l’Opac de Paris a ainsi procédé à l’installation d’une cogénération gaz de 210 kWe (Énergie Plus n° 398).

1 300 unités en deux ans

Afin de dynamiser la filière, des promoteurs d’envergure régionale se sont fédérés à travers l’Union européenne autour d’un projet à valeur informative et démonstrative baptisé « Cogen Challenge ».
Initiée dans le cadre du programme « Intelligent Energy Europe » sous l’égide de la Commission européenne, l’opération se donnait pour objectif de réaliser 1 000 unités de petite cogénération à travers l’Europe et ce, entre janvier 2006 et la fin décembre 2007. Avec dans l’idée de constituer une base de données relative à ces installations.

Résultat des courses : le contrat a été plus que rempli, puisque quelque 1 300 installations de moins de 500 kWe ont fi nalement vu le jour dans ce délai. « Tous les types d’application – logement collectif, piscines, bureaux, réseaux de chaleur, hôpitaux – et toutes les technologies – Stirling, pile à combustible, moteur à gaz ou à huile végétale pure, microturbine – ont fait l’objet d’un projet », nous apprend Peter Schilken, de l’association Énergie-cités, partie prenante du programme.
En plus des données collectées sur les différents sites (sur la base du volontariat), la campagne aura permis d’affiner un certain nombre d’outils : l’Institut de conseil et d’étude en développement durable, partenaire belge du programme, aura ainsi éprouvé la viabilité d’un logiciel de dimensionnement destiné aux bureaux d’études ainsi qu’aux collectivités territoriales belges.

La ville de Francfort a pu quant à elle mettre à jour l’évaluation sur dix ans des coûts d’installation et de maintenance des unités de production. Mais, de l’aveu de ses promoteurs, l’opération a surtout une visée pédagogique : « L’objectif était de montrer que les maîtres d’ouvrage intéressés par la petite cogénération ne sont pas tout seuls, souligne Reinhard Six, de l’association Rhônalpénergie, autre représentant français. Ce genre de démonstration tend à les convaincre, de même que les bureaux d’études, de se lancer. » Néanmoins, ce dernier ne cache pas ses doutes quant aux perspectives de la filières : « Je suis un peu désabusé, notamment du fait de l’augmentation du prix du gaz. S’il augmente encore sans que les tarifs d’achat d’électricité ne soient rehaussés, la cogénération gaz sera moins intéressante. Quant aux types de cogénération recourant aux EnR, elles font face à un certain nombre d’obstacles : le recours au biogaz nécessite d’investir dans un méthaniseur ; l’utilisation d’huile végétale pure est pour l’instant interdite en France – une aberration, selon moi –, sauf dérogation ; la cogénération bois met en oeuvre des technologies très chères. » Le salut de la filière passera peut-être par la transcription complète, au sein de tous les pays de l’Union, de la directive européenne 2 004/8/CE, dite « directive cogénération », qui serait plus favorable au développement de projets de petite cogénération. IZ

Pour consulter les fi ches techniques des 1 300 projets, consulter le site www.petitecogeneration.org, rubrique « installations existantes ».

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