Par Priscilla PETINGA, Comité technique Ventilation et QAI de l’AICVF
Ne nous faisons pas peur, mais une mauvaise QAI coûte 14 milliards d’euros par an et elle coûte surtout en pathologies qui atteignent notre santé. Voici un retour d’expérience en site urbain démontrant que la QAI peut être largement améliorée en filtrant les particules, non pas nécessaire avec une filtration de ventilation double-flux, mais simplement au niveau d’entrées d’air filtrantes. Ceci a donc été testé sur un logement de 52 m2 situé dans Lyon 8ème en phase de rénovation …
Filtrer l’air extérieur pour son logement, un enjeu de santé en site urbain
1. Ne nous faisons pas peur mais une mauvaise QAI coûte 14 milliards d’euros par an !
Nous passons globalement 67% de notre temps dans nos logements selon un rapport de l’InVS[1]. La qualité de ces ambiances, tant au niveau confort, qu’au niveau hygiénique, devient une des priorités.
L’air intérieur est rarement pris en compte comme un élément à maintenir propre et hygiénique comme pourrait l’être tout autre élément du logement. Celui-ci est pourtant l’intermédiaire de liaison entre l’extérieur et l’intérieur, les différentes pièces et les occupants. La gestion de l’entrée de l’air dans le logement en mettant en place une filtration permet alors de limiter de l’entrée de particules extérieures dans l’air intérieur.
La maîtrise du taux de particules dans l’air est un véritable enjeu sanitaire. Les particules inhalées peuvent engendrer différentes pathologies allant de la simple irritation des voies respiratoires, à des problèmes respiratoires chroniques, voir à d’autres impacts sanitaires. Au point où il est possible aujourd’hui de corréler la mortalité journalière, dans les grandes villes, au taux de particules mesuré dans leur atmosphère. Selon une étude de l’InVS[2] , l’excès de risques de mortalité augmenterait de 1,4 % pour une augmentation de 10 µg/m3 des PM10. Les lignes directrices de l’OMS concernant la qualité de l’air[3] constituent l’évaluation la plus largement reconnue des effets de la pollution de l’air sur la santé.
Elles préconisent des objectifs de qualité de l’air qui permettraient de réduire fortement les risques sanitaires. Les lignes directrices indiquent qu’en ramenant les concentrations de particules (PM10) de 70 à 20 microgrammes par mètre cube, on pourrait faire baisser la mortalité liée à la qualité de l’air de 15%. De manière générale, les effets des particules dépendront :
- de leur composition : formées d’amas physico-chimiques et de microorganismes, elles peuvent par exemple transporter des bactéries contagieuses. Maîtriser les particules devient donc un moyen de lutter contre la propagation des contagions aéroportées ;
- de leur taille : on sait ainsi aujourd’hui que plus les particules sont fines, plus elles pénètrent dans notre organisme et sont potentiellement néfastes pour notre organisme.
Des taux de particules élevés engendrent un impact économique, que ce soit en lien avec leur impact sanitaire ou avec leur impact sur le bâti, la ventilation, la production, … Selon une étude trilatérale menée conjointement en Autriche, en France et en Suisse, financée par l’ADEME, l’évaluation des pertes de ressources économiques, engendrées par la pollution atmosphérique dont l’indicateur était les PM10, avait été évaluée, en 1999, à 7 milliards d’euros par an environ (en prenant une inflation de 2% par an). Les dernières données fournies par l’OQAI sur les coûts engendrés par une mauvaise QAI sont estimés à 14 milliards d’euros par an pour les particules[4].
[1] Zeghnoun A, Dor F. Description du budget espace-temps et estimation de l’exposition de la population française dans son logement. Saint-Maurice (Fra) : Institut de veille sanitaire, octobre 2010, 37 p. Disponible sur : www.invs.sante.fr
[2] De nombreuses publications sur le sujet, nous invitons le lecteur à se référer par exemple à l’étude de synthèse de l’InVS publiée en 2008 : Programme de surveillance air et santé - Analyse des liens à court terme entre pollution atmosphérique urbaine et mortalité dans neuf villes françaises.
[3] Air quality guidelines for Europe, 2ème édition. Copenhague, Bureau régional de l’Organisation mondiale de la Santé pour l’Europe, 2000 (Publications régionales de l’OMS, Série européenne, N° 91).
[4] https://www.oqai.fr/fr/campagnes/cout-socio-economique-de-la-pollution-de-l-air-interieur
2. Filtrer les entrées d’air de son logement : c’est possible et cela existe !
La pollution particulaire que l’on retrouve dans l’air extérieur peut pénétrer à l’intérieur des bâtiments via les systèmes de ventilation, les fenêtres, les fuites du bâti, et même être accentuée par les activités internes qui contribuent également à la pollution de ces espaces. Pour maitriser les ambiances, nous comprendrons aisément la priorité d’agir par des systèmes de filtration sur les entrées d’air.
Il existe aujourd’hui des filtres pouvant se placer sur les entrées d’air, fentes sur les fenêtres ou les murs, des logements.
Exemple : L’entrée d’air filtrante FILÉA 30 (module 30 m³/h) est équipée d’un filtre à particules fines est vendue par ANJOS.
Réalisée en ABS, l’entrée d’air s’installe côté intérieur en rénovation dans les pièces principales (séjours et chambres) pour l’amenée d’air neuf des systèmes simple flux en ventilation mécanique. Le capuchon de façade, posé côté extérieur, est réalisé en polystyrène résistant aux UV et aux intempéries dans les mêmes coloris que les entrées d’air.
3. Filtrer les entrées d’air de son logement : installation FILEA, retour d’expérience !
Cette entrée d’air filtrante a été testée sur un logement de 52 m2 situé dans Lyon 8ème en phase de rénovation. Le logement est constitué d’une chambre, d’une cuisine, d’un salon, d’une salle de bain et d’un cabinet d’aisance.
Les entrées d’air sont situées dans la chambre (1 fente) et dans le salon (2 fentes). L’appartement est ventilé par une VMC extractive dont les 3 bouches d’extraction sont réparties dans la cuisine, la salle de bain et le cabinet d’aisance (Figure 3).
L’installation de l’entrée d’air filtrante FILEA a été réalisée sur des ouvertures en fente dans les murs de dimension standard. L’installation est donc venue se mettre en lieu et place des anciennes sur le même socle (Figure 1 et Figure 2). Un soin complémentaire a été porté pour étancher la jonction entre le mur et le socle accueillant le filtre.
Figure 1 : Photos de l’installation de FILEA sur des fentes murales existantes
Figure 2 : Photo du rendu de FILEA à gauche dans le salon et à droite dans la chambre
4. Filtrer les entrées d’air de son logement : efficacité sur les concentrations PM intérieur
L’appartement a été équipé dans le salon de deux capteurs de particules NEXT-PM qui mesurent en continu les particules de la gamme de taille de 0,3 à 10 µm. Les résultats sont donnés en concentration massique (µg/m3) sur les fractions PM1, PM2,5 et PM10.
L’ensemble des équipements sont mentionnés sur le schéma suivant (Figure 4).
Figure 3 : Photo capteur NEXT-PM
Figure 4 : Plan de l’installation des capteurs et des installations de ventilation
La période d’enregistrement a duré 3 semaines avec une première semaine sans filtre, puis 2 semaines avec filtre. Les deux graphiques ci-dessous représentent la concentration intérieure en orange et la concentration extérieure récupérée sur la station d’ATMO Rhône-Alpes située à Gerland grâce au portail www.geodair.fr respectivement en PM10 sur le graphique de gauche et en PM2,5 sur le graphique de droite.
Les résultats (Figure 5) nous indiquent que sur la première semaine sans filtre les concentrations intérieures sont équivalentes à celles extérieures contrairement à la période avec filtre où l’on constate une amélioration de la qualité de l’air intérieur par rapport à l’extérieur. Les pics de concentration en air intérieur atteignant les 60 µg/m3 en PM10 et 30 µg/m3 en PM2.5 correspondent à des activités génératrices de poussières tels que les travaux d’aménagement intérieurs (percements dans les murs, découpes, …).
L’analyse des valeurs sur les deux périodes indiquent une concentration moyenne dans l’air intérieur de 21 µg/m3 sur les PM10, de 15 µg/m3 sur les PM2,5 et de 10,7 µg/m3 sur les PM1 sans filtre (Tableau 1) puis les concentrations moyennes dans l’air intérieur ont été abaissées avec la mise en place du filtre à 3,4 µg/m3 sur les PM10, de 2,9 µg/m3 sur les PM2,5 et de 2,2 µg/m3 sur les PM1 (Tableau 2).
Selon le tableau de corrélation entre la qualité de l’air soufflé dans un lieu (niveau « SUP ») et les concentrations attendues en PM10 et PM2,5 calculées selon les valeurs guides de l’OMS (Tableau 3), lors de notre étude l’air « neuf est passé d’un niveau SUP 5 à SUP 2. Ce qui relève d’une très bonne qualité de l’air, le niveau SUP1 étant principalement dédiés aux espaces avec risques sanitaires (hôpitaux, salle propres,…).
Figure 5 : Mesures en continu des concentrations intérieures et extérieures en PM10 à gauche et PM2.5 à droite
Tableau 1 : Résultats sur la période sans filtre
PM1 en µg/m3 |
PM2.5 en µg/m3 |
PM10 en µg/m3 |
|
---|---|---|---|
Moyenne sans Filtre |
10,7 |
15,0 |
21,0 |
écartype |
2,4 |
3,6 |
6,8 |
Min |
5,9 |
6,8 |
7,6 |
Max |
19,7 |
29,9 |
63 |
Tableau 2 : Résultats sur la période avec filtre
PM1 en µg/m3 |
PM2.5 en µg/m3 |
PM10 en µg/m3 |
|
---|---|---|---|
Moyenne sans Filtre |
2,2 |
2,9 |
3,4 |
écartype |
0,6 |
0,8 |
1,2 |
Min |
0,9 |
0,9 |
0,9 |
Max |
3,7 |
6,9 |
16,8 |
Tableau 3 : Indication des niveaux de qualité de l’air intérieur selon la norme NF EN 16978-3 et calculés à partir des valeurs guides de l’OMS
Qualité d’air intérieur = SUP |
SUP1 |
SUP2 |
SUP3 |
SUP4 |
SUP5 |
---|---|---|---|---|---|
PM 10 |
≤ 5 µg/m3 |
≤ 10 µg/m3 |
≤ 15 µg/m3 |
≤ 20 µg/m3 |
≤ 30 µg/m3 |
PM 2,5 |
≤ 2,5 µg/m3 |
≤ 5 µg/m3 |
≤ 7,5 µg/m3 |
≤ 10 µg/m3 |
≤ 15 µg/m3 |
5. Filtrer les entrées d’air de son logement : c’est possible maintenant
Cette étude permet de valider techniquement une technologie facile à mettre en œuvre et efficace qui assure une bonne qualité de l’air sans créer de désordre dans la ventilation existante, les débits sont respectés (contrôlée par ISERBA).
La filtration sur les fentes d’entrées d’air avec des filtres à faibles pertes de charges permet d’améliorer drastiquement la qualité de l’air en passant d’une SUP 5 à une SUP 2 sous réserve d’étancher le socle accueillant le filtre pour éviter les by-pass.
Cette étude a été réalisée que sur la partie installation. Il faudra dans un second temps évaluer la partie exploitation et maintenance au bout de 6 mois et 1 an de fonctionnement.
Par Priscilla PETINGA, Comité technique Ventilation et QAI de l’AICVF.
Avec le concours de ANJOS et TERA Sensor
Sources et liens