Lycée à « Energie zéro » chauffé par géothermie

Par Jean-Loup LACROIX, Responsable Géothermie chez GINGER CEBTP et Adrien AUVRAY, Chef de projet HQE chez Eléments Ingénieries

Cette construction neuve d’un lycée pour 800 élèves sur 13 800 m² de plancher est exemplaire de part ses qualités énergétiques mais également environnementales. Le niveau « énergie zéro » est notamment obtenu grâce à une géothermie sur eau de nappe. Le lycée se situe à Noisy-le-Grand (93) // Bry-sur-Marne (94).

lycée Noisy-le-Grand - Bry-sur-Marne

Maitre d’Ouvrage

Région Ile-de-France

Maitre d’Ouvrage Délégué

SAERP

Architecte

ATELIERS 234

BET TCE, Economiste

SAS MIZRAHI

BET HQE

Eléments Ingénieries

BET Géothermie

GINGER CEBTP

Le Lycée international de Noisy/Bry se doit d’être un bâtiment à la hauteur des ambitions de la région Ile de France en terme de réduction des consommations, d’autosuffisance énergétique et de limitations de son impact sur l’effet de serre. Dans cet objectif, ce lycée est Zéro Energie produisant autant d’énergie sur l’année qu’il n’en consomme. La volonté programmatique est une équivalence au minimum sur les postes concernés par la réglementation thermique et est aussi d’étudier la possibilité sur les autres postes non réglementaires (ventilation du parking, éclairage extérieur, bureautique et process).

Sur une parcelle vierge de toute construction avec une zone humide déjà présente, le projet de construction prévoit la construction d’un lycée de 800 élèves et d’un internat de 150 lits sur une surface de plancher d’environ 13 800 m².

Afin de respecter cet ambitieux objectif énergétique pour ce type d’équipement et réduire son impact environnemental, il a été nécessaire d’axer la conception sur plusieurs stratégies :

  • Minimiser les déperditions thermiques et favoriser les apports solaires passifs ;
  • Favoriser l’éclairage naturel pour réduire l’éclairage artificiel et favoriser le confort ;
  • Produire de la chaleur à moindre coût énergétique ;
  • Assurer le confort d’été par la ventilation naturelle, des protections solaires performantes et l’inertie du bâtiment..;
apports solaires passifs de jour

Schéma déperditions nuit
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Minimiser les déperditions thermiques

Pendant toute la conception du projet, les performances énergétiques liées aux déperditions ont été analysées et quantifiées à l’aide d’outils de simulation dynamique. Ces études ont permis de réaliser une conception bioclimatique, par une optimisation des ratios de surface vitrée/surface opaque et le choix d’une enveloppe isolante très performante. Ainsi, les besoins en chauffage du bâtiment sont réduits, par une surface vitrée adaptée (quantités et caractéristiques des vitrages) permettant de capter le rayonnement solaire et ainsi chauffer le bâtiment, et une isolation adaptée permettant de limiter les déperditions thermiques.


Coupe lycée

Coupe lycée

Coupe internat

Coupe internat

De nombreuse itérations ont ainsi été réalisées dans les simulations thermiques dynamiques, pour trouver le meilleur compromis entre surface de vitrage, caractéristiques de ces derniers (facteur solaire, transmission lumineuse), et performance de l’isolation (type d’isolant, épaisseur), afin d’optimiser le bâtiment sans pour autant utiliser une quantité de matière trop importante.
Cet exercice s’avère extrêmement compliqué dès lors que d’autres objectifs sont également liés à ces choix (éclairage naturel, confort thermique, etc ...). Les études sur le confort et la thermique ont donc été multi-critères et multi-objectifs. Les simulations thermiques dynamiques, outils permettant de se rapprocher au maximum de l’usage réel du bâtiment ont permis d’aboutir à un choix raisonné.

D’autre part, une étude détaillée du bâtiment a été faite, tant en conception qu’en phase chantier, pour détecter les points sensibles (jonctions entre les différentes parois opaques et entre parois opaques et parties vitrées), afin de réduire au maximum les ponts thermiques structurels, sources de déperditions importantes.

Enfin, une attention particulière a été apportée aux détails et au choix des produits, afin d’apporter au bâtiment une étanchéité à l’air très performante (objectif de 0,8 m³/h/m² pour le lycée et de 0,4 pour l’internat).

2

Favoriser l’éclairage naturel

L’ensemble des locaux à occupation prolongée ont accès à la lumière naturelle. Des patios ont été mis en place pour favoriser l’éclairage naturel des circulations. Des verrières permettent d’apporter de l’éclairage naturel dans les espaces profonds et contraints, tel que l’amphithéâtre, la salle de restauration et la salle de sport. La localisation des surfaces vitrées et les caractéristiques des vitrages ont été étudiées avec précision pour favoriser l’entrée de la lumière dans le bâtiment et ainsi atteindre un facteur de lumière du jour important.
L’optimisation a été poussée jusqu’à la définition des caractéristiques des revêtements intérieurs pour favoriser la réflexion de la lumière dans les différents espaces.

verrières coursives

verrières coursives
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Produire de la chaleur à faible coût énergétique

Pour atteindre l’objectif de consommation énergétique 35 kWhep/m²/an, la solution de production de chauffage et d’eau chaude sanitaire (ECS) s’est naturellement orientée vers une solution de pompe à chaleur géothermique sur nappe.

Compte-tenu de la morphologie des deux bâtiments et du site, un dispositif de production de chauffage et une boucle géothermale ont été mis en place pour chaque bâtiment.
Contrairement à une solution de pompe à chaleur aérothermique, la pompe à chaleur géothermique sur nappe travaille à quasi température constante côté évaporateur, ce qui lui permet de d’obtenir des performances (COP) très élevées pouvant dépasser des valeurs de 6 ou 7. Pour ce projet, les pompes à chaleur produisant le chauffage atteignent un coefficient de performance (COP) moyen d’environ 6 et une valeur d’environ 4 pour la pompe à chaleur produisant l’ECS.

A Noisy-le-Grand, le principe de la géothermie repose sur la réalisation d’un forage de production qui permettra de prélever l’eau de la nappe du Lutétien à une température d’environ 15°C pendant toute la période de chauffage. L’eau de nappe (eau minéralisée) est ensuite acheminée au travers de canalisation spécifique vers un dispositif de filtration dans le local de géothermie avant de l’envoyer vers l’échangeur à plaques primaire au niveau duquel sera prélevée l’énergie nécessaire à alimenter la pompe à chaleur en énergie. A la suite de l’échangeur thermique, l’eau de nappe refroidie (9°C) est réacheminée en direction d’un second forage d’eau pour y être restituée à son aquifère d’origine.

Schéma de principe de la géothermie sur nappe

Schéma de principe de la géothermie sur nappe

Aussi pour cette opération, 4 forages géothermiques sur nappe ont été réalisés jusqu’à une profondeur de 95 m de profondeur environ. Compte-tenu de cette profondeur assez importante, il a été nécessaire de réaliser 2 phases de télescopage équipées de tubages acier cimentés sous pression afin d’isoler les terrains supérieurs et les aquifères sus-jacents.

Coupe géologique et technique de l’ouvrage géothermique

Coupe géologique et technique de l’ouvrage géothermique

 

Doublet du Lycée

Doublet de l’internat

Débit sur nappe

42 m³/h

25 m³/h

Delta de température

-6°C

-6°C

Puissance calorifique maximale délivrée

390 kW

230 kW

Ecartement entre les deux forages

81 m

85 m

Débit moyen sur l’année

6,8 m³/h

4,9 m³/h

Malgré un gros travail sur les économies d’énergie, il a été nécessaire de porter notre réflexion sur l’optimisation de la géothermie et les consommations électriques de la future installation, ce qui a nécessité plusieurs adaptations dont notamment :

  • Optimisation de la régulation énergétique du bâtiment en définissant des consignes de démarrage secteur par secteur dans le lycée, ce qui a permis de réduire de près de 20% les puissances calorifiques de dimensionnement de l’installation de géothermie.
  • Mise en place de variateurs de fréquence pour les pompes immergées de forage pour permettre une plage de fonctionnement assez large (de 8 m³/h jusqu’à 40 m³/h) avec une régulation sur les températures à l’échangeur.
  • Choix d’un équipement des forages en crépine inox en fil enroulé (plus-value de 50% par rapport à une crépine standard) ce qui permet d’améliorer la surface d’échange avec le réservoir aquifère et de diminuer les pertes de charges quadratiques lors du pompage réduisant ainsi les consommations électriques des équipements immergés.
Modélisation panache thermique
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Un confort d’été assuré sans rafraîchissement

Afin de limiter les consommations du bâtiment, une stratégie bioclimatique a également été définie pour assurer un confort d’été optimale. Ainsi, aucun système de climatisation n’est mis en place dans le lycée.
Le confort d’été est assuré par une ventilation naturelle efficace, fonctionnant en période diurne et nocturne, par l’intermédiaire adapté.

Une attention particulière a également été apportée à l’inertie thermique, lourde, qui permet un lissage des températures intérieures et un déphasage de la transmission de chaleur en période nocturne, afin de permettre de décharger le bâtiment en chaleur.
Cette stratégie permet, dans de nombreux espaces, comme les salles de classe, de se passer de free cooling et ainsi réduire considérablement les consommations électriques des ventilateurs.

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Conclusions

En conclusion, avec une réflexion approfondie sur de nombreuses thématiques, il a été possible de satisfaire les objectifs énergétiques et environnementaux souhaités par la Région Ile-de-France pour ce projet. De telles optimisations devraient donner des idées à l’avenir aux Maîtres d’ouvrage publics ou privés avec notamment le recours à des solutions de géothermie optimisées et performantes. Pour preuve la ville de Noisy-le-Grand étudie actuellement la possibilité de mettre en œuvre des solutions de géothermie pour ces futurs équipements neufs.

Lycée énergie zéro

Par Jean-Loup LACROIX, Responsable Géothermie chez GINGER CEBTP et Adrien AUVRAY, Chef de projet HQE chez Eléments Ingénieries


SOURCES ET LIENS

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Logo Elements ingenierie

Commentaires

  • Jean-Loup
    0
    30/11/2015

    Bonjour, En effet dans le cadre de cet article, nous n'avons pas évoqué, la compensation énergétique par du photovoltaïque. Une puissance de crête de 210 KWc (1500 m²) a été installée, ce qui permet d'obtenir une production de 181 MWh/an.


  • Tugdual ALLAIN
    0
    19/11/2015

    Bonjour,
    comment le bâtiment peut être à "zéro énergie", autant de production que de consommation, si il n'y a pas de production?


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