Par Sophie Valenti, Vincent Lallemand et Mélissa Pouet - Cegibat GRDF
Les solutions traditionnelles telles que la chaudière THPE (Très Haute Performance Energétique) présentent toujours un très bon optimum technico-économique pour les logements collectifs neufs. Néanmoins, afin d’atteindre les exigences de la RE2020 en 2025, l’hybridation des solutions gaz devient indispensable.
Focus sur ces solutions qui ont toute leur place dans l’offre produits de 2025 !
Chaufferie collective hybride en logement collectif – source Vecteur gaz
Si cette chronique recadre la conformité réglementaire de l’énergie gaz dans la construction neuve, n’oublions pas également que tout le parc de bâtiments existants permet le renouvellement de chaudières anciennes avec des chaudières THPE avec des économies substantielles. La comparaison tendancielle d’un remplacement par des pompes à chaleur conduirait à un équipement PAC plus onéreux, intégrants des composants fabriqués en Asie (poids carbone) et dont l’usage démultiplierait massivement les besoins en électricité.
L’hybridation du gaz, une réponse de bon sens et de résilience énergétique pour la RE2025
Pour faire face à l’urgence climatique, la France a accéléré ses ambitions en matière de décarbonation du secteur du bâtiment et de l’industrie. Parmi les instruments auxquels les pouvoirs publics ont recours figure l’outil réglementaire et notamment la RE2020, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2022 pour les logements neufs.
Cette réglementation environnementale intègre une rupture forte par rapport à la RT2012, le critère carbone s’imposant sur la partie matériaux de construction et sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées aux consommations d’énergie. Pour l’énergie gaz et ses solutions traditionnelles, 2025 sera un véritable point de bascule. À cet horizon, le seuil d’émissions de GES liées aux consommations d’énergie en logement collectif passera à 6,5 kg CO2/m².an.
Dans ce contexte plus contraint pour le gaz, les fabricants ont d’ores et déjà opéré une mutation vers l’hybridation de leurs gammes de solutions individuelles et collectives. Pour la filière et la maîtrise d’ouvrage, l’hybridation des solutions gaz est une opportunité pour la construction neuve. En voici les principales raisons.
Du point de vue du système énergétique, le scénario 100 % électrique est hasardeux, pour au moins les vingt prochaines années. Nul n’ignore les tensions sur le réseau électrique (plus de la moitié des centrales nucléaires à l’arrêt ces derniers mois). Il ne pourra pas répondre à lui seul à la pointe énergétique multipliée par quatre en période hivernale. La production d’électricité renouvelable, par nature intermittente et non stockable, ne pouvant seule y suppléer, la flexibilité peut être apportée par le gaz. Et plutôt que d’investir dans des cycles combinés à gaz flexibles dont le taux d’utilisation et le rendement sont faibles, l’utilisation directe du gaz dans les bâtiments est à privilégier.
La seconde raison est que ni la filière ni la maîtrise d’ouvrage ne souhaitent dépendre d’une seule source d’énergie pour équiper les bâtiments de demain. Les solutions gaz ont des forces incontestées : la puissance de ce vecteur énergétique bien sûr, mais aussi le confort en ECS qui restera un besoin invariant et attendu des clients quelles que soient les réglementations.
Quant aux consommateurs, acquéreurs de logements ou locataires, disposer d’une solution hybride, c’est bénéficier du meilleur des deux énergies et d’un dimensionnement qui garantit la performance et l’optimum économique. Rappelons que la solution hybride permet lors des pointes hivernales de décaler l’appel de puissance électrique et de faire fonctionner la chaudière gaz avec un rendement maximum au lieu d’un COP de PAC minime.
Enfin, le cadre réglementaire va permettre d’agir sur la demande ce qui, en matière de décarbonation des bâtiments, est le premier levier à actionner.
Hybrider n’est donc pas qu’une réponse réglementaire, c’est aussi une réponse de bon sens et de résilience énergétique, pour aller encore plus loin et plus vite dans la lutte contre le réchauffement climatique. Des solutions hybrides qui seront naturellement compatibles avec le biométhane et autres gaz verts et apporteront des réponses à la rénovation performante avec l’atteinte du niveau A du DPE.
La mise à l’épreuve réussie des solutions gaz en RE2020
Depuis les prémices de la nouvelle Réglementation Environnementale 2020, de nombreuses questions se posent sur son application ainsi que sur les changements concrets qu’elle engendre sur les bâtiments d'aujourd'hui et de demain. Ces questions concernent tant la conception que la solutions énergétiques mises en place pour respecter les différentes exigences. Afin d’apporter un éclairage sur ces évolutions et les conséquences observées sur la construction des futurs logements collectifs, Cegibat a mis en place un observatoire compilant 60 études nationales et régionales réalisées avant, pendant et depuis la publication des seuils. Les résultats portent sur plus de 70 bâtiments et couvrent 2800 scénarios énergétiques.
Ces études prouvent que les solutions gaz ont toute leur place en RE2020 et qu’en fonction des seuils visés par le maître d’ouvrage (2022 ou 2025), les solutions à mettre en œuvre seront à adapter et ce quelle que soit l’énergie choisie.
Les études paramétriques ont été réalisées sur des bâtiments types représentatifs de la construction neuve et avec différents bureaux d’études thermiques qui ont suivi de près les travaux préparatoires de la RE2020. Pour les études régionales, elles ont été réalisées avec 40 bureaux d’études thermiques locaux, en partenariat avec des maîtres d’ouvrage sur des projets concrets déjà réalisés ou en cours de réalisation, représentatifs de leur production de logements. Le cahier des charges était commun à tous les acteurs, avec des adaptations régionales en fonction des habitudes de construction et des contraintes de chacun.
>> Retrouver les résultats détaillés dans le numéro spécial RE2020 de notre revue Vecteur Gaz
Les solutions gaz sont compatibles avec les exigences 2022 et 2025
En logement collectif, la mise en place de la RE2020 confirme qu’une mixité de solutions gaz est disponible, évoluant progressivement vers une hybridation des systèmes indispensable dès 2025.
- Jusqu’au 1er janvier 2025, la chaudière THPE associée à un bâti performant présente le meilleur optimum technico-économique, sans rupture technologique. La transition par rapport à la RT2012 se fait donc assez simplement, à l’exception peut-être des zones H2d et H3 dans lesquelles la problématique des degrés-heures rend les conceptions traditionnelles compliquées et encourage la conception bioclimatique, parfois limitée dans certaines configurations de bâtiment. D’autres solutions mixtes gaz/énergie renouvelables et de récupération (EnR&R) performantes, utilisées dans la RT2012, restent également compatibles avec les seuils 2022. C’est le cas de l’association d’une chaudière THPE avec du solaire thermique ou de la récupération de chaleur sur eaux grises ainsi que des PAC gaz à absorption. Ces solutions permettent d’aller au-delà des exigences de 2022 et d’atteindre l’étiquette B du DPE, par exemple.
- À partir de 2025, un changement s’opère et l’hybridation des solutions gaz devient indispensable pour respecter les exigences de la RE2020. Mais cette évolution ne concerne pas uniquement les solutions gaz, et la filière dans son ensemble doit se questionner pour intégrer ces nouvelles solutions au bâti, avec de nouvelles contraintes qui apparaissent (intégration acoustique et architecturale des unités extérieures pour les PAC, impact carbone des fluides frigorigènes, etc.).
Pour autant, des solutions hybrides gaz existent, en individuel ou en collectif. Certaines sont déjà disponibles sur le marché ou en cours de développement :
- La pompe à chaleur hybride, en individuel ou en collectif,
- La combinaison d’une chaudière THPE avec un chauffe-eau thermodynamique, en individuel ou en collectif, associée à un bâti très performant,
- L’association d’une chaudière THPE et d’une chaudière bois en collectif, là où les conditions d’implantation et les pratiques régionales s’y prêtent.
Schéma de principe d’une PAC hybride collective
>> Lire le dossier Cegibat sur les PAC hybride collective
Pour la MOA, l’hybridation des solutions gaz est déjà une réalité. L’AAP « réussir la Transition énergétique et valoriser la complémentarité des énergies » lancé au printemps 2022 par la FPI, l’USH, le pôle Habitat FFB et GRDF récompense 10 lauréats mettant en œuvre des solutions hybrides variées pour des projets de construction qui verront le jour au plus tard en 2025.
>> Lire le dossier GRDF pour découvrir les projets lauréats
Ces premières solutions hybrides permettent d’utiliser différentes sources d’énergie et de profiter de la richesse du mix énergétique, utilisant les atouts de chaque énergie de manière optimale. L’hybridation permet aussi de réduire les coûts d’investissement, puisque les solutions gaz, fiables et robustes, restent des solutions « low tech » avec des coûts de production maîtrisés depuis plusieurs années. Le verdissement progressif du réseau gaz permettra d’assurer la pertinence et la pérennité des solutions hybrides gaz dans le temps.
Les solutions gaz vers une décarbonation avec le biométhane
La filière de production de biométhane, déjà bien au-dessus des objectifs fixés pour 2021 et 2022 par l’actuelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), vise en effet une cible de 20 % de gaz vert en 2030 et de 100 % en 2050.
Cela permettra à ces solutions déjà performantes et bas carbone de réduire encore un peu plus leur impact sur le changement climatique.
Croissance des sites d’injection de biométhane en France – source GRDF
A savoir qu’au 31 décembre 2022 plus de 500 installations ont injecté du biométhane, après production et épuration de biogaz, dans les réseaux de gaz. Leur capacité s’élève à 9,0 TWh/an, en progression de 38 % par rapport à fin 2021 …
Par Sophie Valenti, responsable de Cegibat, GRDF - Vincent Lallemand, responsable efficacité énergétique Cegibat, GRDF - Mélissa Pouet, responsable efficacité énergétique Cegibat, GRDF
Source et lien