IFPEB - Institut Français pour la Performance du Bâtiment
Voici la comparaison du bilan carbone de la rénovation par rapport à celui de la démolition-reconstruction.
90 acteurs de l'immobilier regroupés dans le « Hub des prescripteurs bas carbone » [1] ont comparé l’impact carbone et le bilan environnemental de la rénovation lourde d'un bâtiment par rapport à celui d'une démolition-reconstruction sur des études de cas concrets.
La rénovation « bas carbone » d’un bâti existant, comparée à une démolition-reconstruction neuf au standard actuel, est championne de la décarbonation avec un bilan carbone environ 30% meilleur.
Rénovation bas carbone, démolition-reconstruction
Néanmoins, lorsque les constructeurs de bâtiments témoignent d’une ambition carbone exemplaire [2] sur le neuf, le bilan carbone de la rénovation est comparable à celui de la démolition-reconstruction. La rénovation reste alors avantageuse si on considère l'enjeu de la conservation des ressources matérielles (granulats, sable, …) puisqu’elle divise en moyenne par 2 le besoin.
[1] Le Hub bas carbone est une coalition de 30 maîtres d’ouvrage et 60 maîtres d’œuvre
[2] Le Neuf exemplaire : respect du seuil carbone 2031 de la RE2020. Cas d’une démolition-reconstruction donc sur le même foncier disponible déjà artificialisé.
Le « Hub » appelle les pouvoirs publics à faire émerger rapidement un cadre incitatif d’exemplarité carbone de la rénovation, à l’instar de l’expérimentation E+/C- qui avait permis de préfigurer la RE2020 pour le neuf.
Le Hub des prescripteurs bas carbone anime depuis plus d’un an une étude collective sur le bilan carbone de la rénovation
A partir de cas réels de logements, bureaux, résidences sénior, …, le collectif a souhaité comprendre comment passer d’une rénovation lourde [3] énergétique à une rénovation bas carbone et à quel prix. Après deux premières restitutions publiques [4], le Hub a révélé le 30 Mai à l’occasion d’un webinaire les enseignements de leur dernière phase d’étude :
Doit-on préserver l’existant à tout prix ou démolir-reconstruire dans certains cas ?
[3] Rénovation lourde au sens de la RT globale
[4] Trois scénarios ont été étudiés en allant de la simple rénovation à la démolition reconstruction :
- Scénario 1 – Rénovation énergétique : mesurer l’impact carbone et passer à l’action
- Scénario 2 – Rénovation bas carbone : optimiser chaque € investis
- Scénario 3 – Rénover et/ou démolir-reconstruire, quelle équation coût carbone ?
Si trois conditions sont réunies, le bilan carbone d’une rénovation est environ 30% meilleur qu’une démolition-reconstruction standard
Les études menées démontrent que la rénovation présente un bilan carbone environ 30% meilleur qu’une démolition-reconstruction standard si trois conditions sont réunies :
- Un travail sur la sobriété énergétique : avec une économie d’énergie importante par exemple à minima de 40%. Cela implique l’amélioration de l’enveloppe du bâtiment et la sobriété des usages pour diminuer sa facture énergétique sans que cela soit au détriment du confort d’usage. Le Hub rappelle par ailleurs que baisser la consommation d’énergie et donc améliorer la sobriété (du bâti et des usages) est le premier levier de décarbonation à l’échelle du bâtiment mais aussi au niveau national.
- Une sortie des énergies fossiles : il est essentiel de favoriser l’accès aux énergies renouvelables et de récupération et accélérer la décarbonation des réseaux. Sans sortie des fossiles (charbon, fioul, gaz fossile), les études du Hub révèlent que le bilan carbone de la rénovation peine à concurrencer le neuf standard.
- Une conservation de l’existant : c’est le meilleur levier pour diminuer le besoin en matériaux neufs et donc améliorer l’impact carbone de la rénovation. Les bâtiments ne présentent néanmoins pas tous le même potentiel de conservation des matériaux car cela dépend de leur état (obsolescence technique, réglementaire, fonctionnelle, …), la question du potentiel de conservation doit ainsi être systématisée.
Lorsque ces conditions ne peuvent pas être réunies, le bilan carbone de la rénovation peut alors être comparable voire supérieur à la démolition-reconstruction. Le Hub recommande que toute demande de permis de construire pour une démolition-reconstruction soit associée à une ACV comparative pour guider les choix programmatiques et les arbitrages.
Comparaison du bilan carbone (matière et énergie) d’une rénovation énergétique, d’une rénovation bas carbone et d’une démolition-reconstruction
respectant les seuils 2022 de la RE2020 - Hub bas carbone - Mai 2024
La rénovation des bâtiments patrimoniaux implique une nouvelle norme bas carbone adaptée à leurs enjeux
Le bilan carbone d’une rénovation d’un bâtiment patrimonial (qui est donc inscrit ou classé au patrimoine [5]) est dans certains cas moins bon que celui d’une démolition-reconstruction quelle que soit l’ambition carbone. En effet, la compacité du bâtiment peut être très mauvaise, la hauteur sous plafond pas adaptée, les tailles et le nombre de locaux techniques inappropriés, … Toutes ces contraintes peuvent impliquer une équation économique et un bilan carbone plus élevés que le scénario d’une démolition-reconstruction. Ainsi, en cas de changement de destination du bâtiment patrimonial par exemple, il est essentiel de questionner la compatibilité du programme à l’architecture du bâtiment et de prendre en compte que le bilan carbone est potentiellement élevé. Il sera ainsi nécessaire d’élaborer une norme bas carbone adaptée à la préservation et revalorisation du patrimoine historique.
[5] Un monument historique est un édifice, un espace ou un objet, qui a été protégé du fait de son intérêt patrimonial. Un ensemble de critères (historiques, artistiques, scientifiques et techniques) sont pris en compte pour réaliser cette évaluation.
- Sont inscrits les biens dont l’intérêt historique ou artistique en rend la préservation désirable.
- Sont classés les biens qui présentent un intérêt public.
Comparaison du bilan carbone (matière + énergie) d’une rénovation énergétique, d’une rénovation bas carbone et d’une démolition-reconstruction
respectant les seuils 2022 et 2031 de la RE2020 sur un bâtiment patrimonial transformé en résidence sénior - Hub bas carbone - Mai 2024
Une rénovation bas carbone présente un bilan carbone comparable à celui d'une démolition-reconstruction exemplaire (seuil 2031 de la RE2020)
Bien que la rénovation permette de préserver une partie de l’existant, l’empreinte carbone matériaux de la rénovation est comparable (voire plus importante) aux valeurs projetées par la RE2020 à 2031 pour le neuf.
Le paramètre principal expliquant les écarts est lié au potentiel de conservation de l’existant :
- Lorsque les matériaux sont encore en bon état et peuvent être conservés, la rénovation demande moins de matériaux neufs et le bilan carbone est donc plus faible.
- Lorsque les matériaux sont en mauvais état, la rénovation demande quasiment autant de matériaux que le neuf, voire plus en raison des contraintes de l’existant (compacité, hauteur sous plafond, nombre et taille des locaux techniques ? …).
Comparaison du bilan carbone (matière + énergie) d’une rénovation énergétique, d’une rénovation bas carbone et d’une démolition-reconstruction
respectant les seuils 2031 de la RE2020 - Hub bas carbone - Mai 2024
La rénovation permet d’économiser environ 50% de ressources matérielles par rapport à une démolition-reconstruction.
Consommation de ressources d’un bureau entre un scénario de démolition-reconstruction 2022 et 2028
et celui d’une rénovation bas carbone - Hub bas carbone - Mai 2024
Le Hub appelle à une expérimentation E+/C- de la rénovation
En conclusion, le collectif d'acteurs regroupés au sein du « Hub » estime que la première étape est d'initier rapidement une phase d'apprentissage par l’expérimentation en systématisant la réalisation d'une Analyse de Cycle de Vie sur les rénovations lourdes [6] pour préparer l'évolution du cadre réglementaire.
[6] Rénovation lourde au sens de la RT globale
Lecture recommandée
Rénovation bas carbone, rénover et/ou démolir-reconstruire ?
Webinaire en replay
Rénovation bas carbone, rénover vs démolir/reconstruire
IFPEB - Institut Français pour la Performance du Bâtiment
Source et Lien
A propos du Hub des Prescripteurs Bas Carbone
Le Hub des Prescripteurs Bas Carbone est une plateforme collaborative portée par l’Institut Français pour la Performance du Bâtiment (IFPEB) en partenariat avec Carbone 4, à destination des donneurs d’ordres du secteur de la construction (Foncières, investisseurs, promoteurs, entreprises générales…).
Cette initiative a pour objectif de partager les meilleures pratiques et doter les membres de l’ensemble des outils opérationnels nécessaires à la prescription du bas carbone. En 2020, le Hub comptait déjà les participants suivants : Bouygues Immobilier, Bouygues Construction, BNP Paribas Real Estate, Groupama Immobilier, Linkcity, Poste Immo, Rabot Dutilleul, Covivio, Sogeprom, Vinci Immobilier, Icade et Altarea. Ils sont maintenant une trentaine de maitrises d’ouvrage à avoir rejoint l’aventure qui mobilise de plus en plus et s’intensifie sans cesse. Une communauté de 60 maîtrises d’œuvres a aussi rejoint l’aventure : cabinet d’architecture et bureaux d’études pluridisciplinaire. Le Hub mobilise de plus en plus et s’intensifie sans cesse.
A propos de l’IFPEB
L’Institut pour la performance du bâtiment est une alliance d’acteurs économiques qui s’attachent à mettre en œuvre, grâce à la connaissance opérationnelle, les moyens d’une transition énergétique et environnementale ambitieuse et efficace pour l’immobilier et la construction compatible avec le marché.
L’IFPEB sert de « peloton de tête » à ses membres, permettant d’échanger au meilleur niveau, de partager les tendances lourdes avec l’objectif d’anticiper et de s’équiper sur tous les aspects de la construction durable, via des projets concrets, des travaux communs, des veilles… L’Institut est une consultance mutualisée pour accélérer et entraîner le marché. Cet ensemble de compétences permet à ses membres de faire des économies d’échelle et de temps par la mutualisation et l’élaboration méthodologique conjointes. L’Institut est partie prenante des réflexions sur le cadre des politiques publiques.
A propos de Carbone 4
Carbone 4 est le premier cabinet de conseil indépendant spécialisé dans la stratégie bas-carbone et l’adaptation au changement climatique.
Leur objectif commun depuis 2007 : guider leurs client·es dans la compréhension du monde qui se dessine. En permanence à l’écoute des signaux faibles, Carbone 4 déploie une vision systémique des enjeux climat et biodiversité, et a à cœur d’accompagner la nécessaire transformation technique d’une transformation humaine.
Carbone 4 met sa rigueur et sa créativité en œuvre pour transformer ses client·es en leaders du défi climatique et embarquer les acteurs dans le changement.