Par Alain MAUGARD, président de QUALIBAT le 04 Juillet 2019
Parallèlement au développement des automatismes, il y a le développement des softwares de traitement des données qui, désormais, travaille sur des immenses banques de données (les BIG DATA). Les lieux où l’on traite les BIG DATA rassemblent une kyrielle d’ordinateurs qui fonctionnent tous 24h/24 et qui dégagent énormément de chaleur et donc requièrent une climatisation intense. Cette quantité de chaleur fatale va s’accroître de plus en plus avec le développement des objets connectés. Alors il y a l’idée de récupérer cette chaleur ; mais comment ? Avec un réseau de chaleur ou autrement, comme le projet de cette start-up QARNOT dont l’idée consiste à éclater complètement le centre de traitement des BIG DATA et d’aller mettre les serveurs comme des radiateurs dans les logements ou les bureaux pour les chauffer. Cette manière originale d’éclater le centre de traitement des données en de multiples radiateurs permet de chauffer en hiver (c’est le plus facile) mais également de convertir cette chaleur en froid l’été (possible mais plus difficile).
De plus, sur ce radiateur informatique source de chaleur il est possible d’y installer également un petit appendice intelligent qui permet le traitement des données de votre appartement, de votre bureau, et des automatismes de votre lieu de vie. Ce nouveau concept qui joue le rôle traditionnel du « foyer » des maisons anciennes, de la maison, est développé par la start-up QARNOT COMPUTING - https://www.qarnot.com/
Mieux vaut garder la maîtrise de ses propres accès
1°) Garder le cerveau dans le bâtiment
Cet exemple nous amène à nous poser la question quant à la localisation de l’intelligence des automatismes et des objets connectés que nous appellerons ici cerveau et qui gère notre maison : - Ou le cerveau est dans la maison, dans le bâtiment. - Ou le cerveau est ailleurs, il est dans les nuages, le Cloud.
Or pour des raisons économiques, nous pouvons penser que le cerveau se développe principalement dans le Cloud ; avec cette conséquence que les données et leur maîtrise nous échappent. Alors, la contre-proposition qui sera peut-être la solution d’avenir est de conserver le cerveau des objets connectés dans le bâtiment ; le bâtiment doit posséder son cerveau et non pas se laisser déposséder de son cerveau. Ceci même si inévitablement, une connexion vers l’extérieur est nécessaire pour des questions de gestion externe et de mise à jour ; Il faut donc disposer d’une solution hybride qui nous garantisse la maîtrise personnelle des données.
Pour les bureaux et lieux de travail, l’appréciation est un peu différente. Les bureaux sont un lieu collectif, l’intimité est remplacée par la confidentialité et demeure de la responsabilité du management de l’entreprise, du tri de l’information à communiquer ou pas. Si l’intimité est touchée, elle l’est plus dans ses dimensions visuelles et acoustiques ; encore que les open-space dérogent à ce constat pour créer des lieux où l’intimité est encore plus restreinte et où la communication collective et le partage d’information sont privilégiés.
Donc, nous sentons bien que nous allons accepter toutes ces évolutions d’automatismes qui travaillent pour nous, qui nous apportent confort, bien-être et sécurité, mais que nous allons être attentifs à la qualité des services et à la gestion des données. Créer un mini-cloud chez soi, son propre nuage intime, oui avec un filtre bien maîtrisé par l’usager quant à l’exportation des données personnelles recueillies dans son habitat, comme sans doute dans son lieu de travail, avec une responsabilité partagée. Il s’agira d’être attentif au Cloud low-cost même gratuit, bas de gamme, et sans doute manipulateur pour des objectifs pour le moins marketing voire plus dangereux.
Mais, gardons confiance, car face au risque d’exploitation par des grands groupes de nos données personnelles, nous trouverons des parades grâce à une attitude de vigilance permanente.
2°) L’avènement de l’intelligence artificielle
La piste du cerveau domicilié dans le bâtiment nous conduit, tout naturellement, à oser la mise en perspective (prospective) du développement d’une intelligence artificielle liée à ce cerveau.
Nous faisons l’hypothèse que les données recueillies sur le comportement du bâtiment, et sur nos comportements (nos modes de vie) resteront en notre possession dans la seule mémoire du cerveau domiciliée dans le bâtiment.
Dès lors, nous pouvons envisager que le cerveau du bâtiment scrute par des palpeurs nos comportements (utilisation des robinets eau chaude, eau froide ; traces de nos déplacements dans le logement ; volets ouverts ou fermés ; éclairage artificielle allumé ou pas, ouverture du frigo, consommables et aliments retirés du frigo ou des placards).
Ainsi, nous pourrons progresser, en matière de sécurité, par exemple être prévenus en cas d’infractions et vols, en cas de dégâts des eaux, en cas de départs de feu, en cas de pannes entraînant des dysfonctionnements néfastes au bâtiment.
Ainsi, nous pourrons être informés de la qualité de l’air intérieur et actionner, au besoin, la ventilation ou le cas échéant, procéder à de l’épuration de l’air.
Nous pourrons aussi progresser dans le maintien à domicile des personnes âgées sans utiliser des méthodes intrusives qui sont incompatibles avec le respect de leur intimité. Surveiller leur comportement pour savoir si tout se passe bien ; si elles n’ont pas eu d’accident domestique, si elles sont toujours alertes ; bref, une intelligence artificielle qui nous, les proches, nous avertit si des informations concordantes diagnostiquent une situation anormale.
Nous pourrons aussi envisager des développements très intéressants dans le domaine de la santé à domicile pour des situations de pré-diagnostic (diagnostic à distance) ou de rétablissement post opératoires.
Les informations, dans ce cas-là, ne peuvent remonter qu’à l’hôpital ou au médecin traitant après avoir été traitées et pré-interprétées par des algorithmes intelligents qui facilitent la tâche des soignants.
Les possibilités potentielles sont énormes, dès lors que, nous nous assurons d’en garder le contrôle en veillant à la diffusion et l’interprétation confidentielles des données.
C’est là toute la problématique de « garder le cerveau dans le bâtiment ».
Mais si nous « ouvrons » les échelles en mettant en relation celle du bâtiment avec celles du quartier et de la ville, il y a un champ nouveau à l’intelligence artificielle ; les services, les utilités sont encore plus nombreuses à l’échelle de ces territoires puisque nous y côtoyons la mobilité, l’accès aux espaces et bâtiments publics, le commerce des biens et des services.
Ainsi, s’articulent le cerveau du bâtiment avec les cerveaux du quartier et de la ville. C’est l’imbrication de ces trois cerveaux qui nous donnera la possibilité de développer une intelligence nouvelle de la vie en société.
Alain Maugard