Par Dominique BIDOU, président d'honneur de l'Alliance HQE-GBC France le 04 Juillet 2019
1 - Un classique du développement durable
Surtout quand ils fuient, et que la France manque d’eau ! Des chiffres éloquents : un robinet qui goutte, c’est 4 litres par heure de gaspillés, soit 35 mètres cubes par an, à rapprocher de la consommation moyenne en France, de 50 mètres cubes par an.
La chasse au gaspi reste un must du développement durable. On gagne sur tous les tableaux. Le calcul a été fait pour un grand parc immobilier, que les techniciens dédiés au repérage et à la réparation des fuites d’eau rapportaient trois à quatre fois leur salaire. On remplace de la ressource naturelle, l’eau, par du travail humain : c’est tout bon ! On ménage la ressource, on offre de l’emploi, et en plus on fait des économies. Voilà une politique bonne pour l’environnement, l’emploi (valeur sociale) et l’économie. On est pile au cœur du développement durable. Des retours d’expérience déjà anciens mais toujours éloquents peuvent être présentés, notamment différents programmes de villes économes en eau, à l’initiative d’agences de l’eau. A Lorient, ville qui a adopté une politique ambitieuse de ce point de vue depuis longtemps, on a divisé par 4 la consommation d’eau entre 1978 et 2004. Et les économies ont permis de recruter du personnel pour conseiller les habitants dans leur comportement.
2 - L’énergie offre des possibilités de même ordre
En hiver, fermer les volets le soir est source d’économies de l’ordre de 25%. C’est un peu de temps passé, en échange d’énergie économisée. Cet échange est très intéressant, puisqu’il ménage une ressource rare ou polluante à produire, au profit de travail humain.
3 - Economies d’énergie et de ressources et comportements
Les économies se trouvent dans des organisations et emplois dédiés, mais aussi dans les comportements. Du basique, mais qu’il convient de rappeler de temps en temps : laisser couler l’eau en continu pendant qu’on se brosse les dents représente 10 mètres cubes d’eau gaspillée au bout d’un an. Autre exemple, pour la mobilité : selon le mode de conduite, les écarts de consommation peuvent atteindre 40% ! Un chiffre extrême, mais une baisse de consommation de 15% peut être facilement obtenue. Les grands transporteurs routiers ont recours à l’écoconduite depuis longtemps, mais les particuliers restent à l’écart. Pourtant, nous savons que le budget logement et le budget mobilité sont liés, l’éloignement faisant baisser le premier mais croître le second. Il y a des gisements importants d’économies dans les comportements, avec des dividendes pour la planète comme pour les particuliers.
4 - Une source d’économie réside également dans les équipements
Il y a l’étiquetage énergétique, qui s’étend aujourd’hui de l’électroménager à la voiture, et qui concerne maintenant tous les bâtiments. Cette information simple permet au consommateur de prendre conscience des charges dues au fonctionnement de ses achats, et par suite d’en faire un critère d’appréciation pour ses choix, ou de négociation du prix. Acheter plus cher pour économiser ensuite peut se révéler un excellent calcul, encore faut-il être informé, disposer des indications suffisantes pour faire ce calcul.
Il est dommage que, souvent, certaines options d’économies soient impossibles. Prenons le cas des sèche-linges. Ils consomment de deux à trois fois l’énergie nécessaire au lavage. C’est un paradoxe que la fonction essentielle, le lavage, consomme finalement beaucoup moins d’énergie que la fonction secondaire, le séchage. La parade semble simple : pourquoi avoir recours au sèche-linge, pourquoi ne pas étendre le linge sur un fil, ce qui ne consomme aucun kilowatt/heure ? Et bien certains appartements n’offrent pas réellement cette possibilité. Il n’y a pas d’espace suffisant, pas de local approprié, les plafonds sont trop bas pour y installer des cadres mobiles pour y faire pendre le linge, et pas de jardin. Le linge aux fenêtres est peu apprécié, et souvent interdit. Que faire d’autre, dans ces conditions que d’acheter un sèche-linge, une armoire électrique qui consomme beaucoup d’énergie pour faire ce que traditionnellement la nature faisait si bien ! La réponse est donc aussi dans la conception des logements. On parle souvent des emplacements à prévoir pour les déchets ménagers, qu’il faut stocker en prévision d’un tri et d’une valorisation à venir. C’est bien, mais c’est l’ensemble des tâches ménagères qui doit être l’objet d’une analyse environnementale.
5 - L’eau chaude sanitaire est un point sensible
Puisqu’il y a à la fois de l’eau et de l’énergie, et que la meilleure isolation n’en réduira pas le besoin. Deux ressources importantes pour l’environnement et le porte-monnaie des utilisateurs. Toute la chaîne doit être examinée : la source d’énergie, la chaudière, dont le rendement doit être le meilleur possible, qui doit le cas échéant avoir recours aux énergies renouvelables, au solaire, aux pompes à chaleur, etc. Ensuite, la disposition de la source d’eau chaude par rapport aux lieux d’utilisation. S’il faut attendre deux minutes, exaspérantes de surcroît, entre le moment où vous ouvrez le robinet et celui où l’eau est effectivement chaude, c’est deux minutes d’eau qui coulent en pure perte, de l’eau qui a été chauffée et qui s’est refroidie dans les tuyaux. Il y a ensuite la qualité des mitigeurs, des mousseurs, des pommes de douche, etc. Des écarts importants de consommation en dépendent, jusque 50% d’économie avec des pommes de douche performantes.
Robinet et robinetterie sont donc au cœur du développement durable. Approche triviale, mais quotidienne, cumulative, et que chacun, une fois informé, peut traduire immédiatement dans ses choix personnels, sans attendre une rénovation ou des aides publiques.
Le développement durable apparaît parfois comme un idéal lointain, mais il a aussi des aspects simples et aisément accessibles. Profitons-en !
À propos de l'auteur
Dominique Bidou
Ingénieur et démographe de formation, Dominique Bidou a été directeur au ministère de l’Environnement et est Président d’Honneur de l’association HQE (désormais Alliance HQE – GBC). Il est consultant en Développement Durable, a écrit de nombreux ouvrages tels que « Le développement durable, une affaire d’entrepreneurs », anime son blog...