Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
15 Octobre 2012
Depuis quelques années le bâtiment subit de profondes réformes, présentées un peu partout comme un très grand progrès. Malheureusement cet enthousiasme ne va pas sans quelques problèmes, des problèmes malheureusement trop souvent cachés par des admirateurs inconditionnels.
Que voulez-vous dire ?
Qu’il faut essayer d’être objectif, ce qui n’est pas toujours facile. Pour l’expliquer j’ai tendance – et je m’en excuse – à faire appel à un examen du passé. Un passé du bâtiment (hors des siècles plus anciens) que je considère comme ayant connu trois périodes, que l’on retrouve d’ailleurs incarnées dans l’existant.
La première période, essentielle jusqu’à la fin des années 1930, fut – surtout en habitation – celle des bâtiments en maçonnerie classique, chauffés (et plus ou moins ventilés) par des couples « foyers ouverts (à bois ou à charbon) + conduits de fumée », des équipements qui ont souvent subsisté même lorsque le chauffage a évolué.
Deuxième période : à partir des années 1930-1940 le chauffage central s’est fortement développé, la ventilation a suivi, et les volumes – les hauteurs sous plafond en particulier (règlement sanitaire oblige) - ont été réduits.
Quant à la troisième période, ouverte récemment – disons vers 2000 environ - c’est une époque au cours de laquelle les préoccupations énergétiques sont devenues essentielles. Elles ont envahi, et plus ou moins déformé les décisions, la meilleure illustration en étant les règles RT.
Ceci dit, je voudrais d’abord faire le point sur la deuxième période, celle dont les débuts ont coïncidé plus ou moins avec les miens, période où les problèmes essentiels sont ceux sur lesquels j’ai eu d’abord à intervenir.
De quels problèmes voulez-vous parler ?
Je vais l’illustrer par un exemple. A l’époque dont je parle (1952-56) un architecte renommé, Paul Peirani, fut chargé par les éditions Eyrolles de coordonner la publication d’une dizaine de manuels du bâtiment, chaque tome étant consacré à un corps d’état spécifique : la maçonnerie, la menuiserie, la construction métallique, la plomberie, le chauffage, etc. Le hasard fit que je fus associé par André Missenard au manuel de chauffage et de ventilation. De manière un peu indépendante, il me parut alors, et séparément, que la collection prévue allait être incomplète, et je proposai qu’un nouveau tome soit consacré aux aspects fonctionnels du bâtiment (humidité du bâti, thermique du bâti, acoustique, etc.). Des thèmes qui – à cette époque – manquaient totalement dans la littérature technique française. Ma proposition fut immédiatement acceptée par Paul Peirani, ce qui aboutit à la publication en 1958 d’un manuel spécifique (R. Cadiergues, Isolation et protection des bâtiments). Si je cite cet ouvrage c’est qu’il va nous permettre de faire le point sur un aspect très particulier, et désormais essentiel avec nos nouvelles réglementations : l’humidité du bâtiment.
Est-ce vraiment un problème pour nos nouvelles exigences ?
Absolument : la preuve en est le rapport récent de l’Agence Qualité Construction qui, après l’examen de 211 bâtiments dits « basse consommation » (BBC) a constaté, dans un assez grand nombre de cas, de très fortes condensations, se traduisant par des taches ou de multiples moisissures, allant jusqu’à provoquer des déformations de menuiserie, tout cela étant lié aux difficultés de séchage des bâtiments. Or ce séchage des bâtiments est le premier sujet abordé par le premier chapitre (l’humidité) de l’ouvrage de 1958 cité plus haut. Et ce avec une formule indiquant que le temps de séchage d’une paroi est proportionnel au carré de l’épaisseur. Supposons, par exemple, qu’en solution jusqu’ici classique nous ayons prévu un isolant de 6 cm d’épaisseur, le temps de séchage naturel du bâtiment prévu étant alors de l’ordre d’un mois. Avec les nouvelles réglementations thermiques nous allons, par exemple, porter l’épaisseur de l’isolant à 18 cm (les exigences actuelles). Mais, dans ce cas, ce que vous n’aviez pas prévu va survenir : le temps de séchage naturel n’est plus d’un mois mais de neuf mois. Ce qui, bien entendu, conduit au genre de sinistres constatés par l’Agence Qualité Construction.
Ce problème d’humidité parait effectivement grave : est-ce le seul ?
Permettez-moi de vous répondre la semaine prochaine …
Roger CADIERGUES