Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
27 Septembre 2010
Actuellement, quel que soit le texte que vous consultiez ou l’émission de télévision que vous suiviez, un seul thème envahit presque tous les discours : économisez l’énergie. Sous-entendu « utilisez-en le moins possible », le miracle attendu étant «l’énergie zéro» … au moins sur le plan du calcul. Y a-t-il vraiment urgence et nécessité de vivre sur un tel critère ….
Que répondez-vous à cette question impertinente ?
Depuis des années « économiser l’énergie » repose sur deux justificatifs successifs :
. d’abord l’idée selon laquelle nous allons manifestement manquer d’énergie,
. ensuite le fait que l’énergie est la principale source de détérioration de l’atmosphère.
Je reviendrai la semaine prochaine sur le deuxième justificatif – qui est étroitement lié à l’accroissement de l’effet de serre. Je voudrais aujourd’hui m’attacher uniquement au premier justificatif, celui du manque futur d’énergies traditionnelles.
Est-ce essentiel au regard de la situation actuelle ?
Vous voulez, sans doute, faire allusion à la forte diminution de consommation d’énergie constatée en France en 2009, une diminution qui serait d’un peu plus de 5%. Au-delà des cris de victoire assez déplacés des autorités écologiques, il faut bien reconnaître que cette situation est très probablement largement – sinon totalement - due aux régressions économiques. Avec des réductions significatives de consommation dans l’industrie (-9,7% de réduction en 2009), dans l’agriculture (- 3,1%) et dans les transports (- 1,1%). Une situation, en tous cas, à juger plus sereinement en 2011.
Le manque d’énergies (au sens classique) n’est-il pas, néanmoins, un risque inexorable ?
Depuis la fin des années 1950 j’ai connu trois périodes de panique basées sur la crainte du « manque inévitable d’énergie » tel qu’on pouvait le prévoir. Or, à chaque fois, la crise passée, une nouvelle analyse a conduit à la conclusion exactement inverse : les ressources d’énergie étaient, dans les trois cas et après la « crise », finalement bien plus importantes que celles qui avaient été prévues avant la crise. Donc, à chaque fois, une situation totalement inverse de celle qui avait conduit à une mise en garde inquiétante.
Est-ce toujours le cas aujourd’hui ?
C’est toujours le cas, voici pourquoi. Nous sommes entrés, il y a quelques années, dans une nouvelle crise énergétique, marquée d’abord – comme les précédentes – par la panique face aux ressources prévisibles. Or, aujourd’hui comme après les crises énergétiques précédentes, il s’avère que nos ressources d’énergie sont probablement bien supérieures à ce qui était prévu avant la crise. D’ailleurs de nombreuses petites compagnies (surtout américaines), plus ou moins suivies par les grands groupes pétroliers, se sont ruées sur le nouvel eldorado énergétique en perspective, et sur la technique en cause : le tracking.
De quoi s’agit-il ?
Du méthane souterrain dit « gaz de schiste ». Ce gaz est actuellement inaccessible car piégé dans des roches argileuses assez profondes. La solution, face à ce défi, consiste à réaliser un forage profond, et à y injecter de l’eau sous pression pour fracturer la roche et libérer le méthane. Lequel est récupéré après l’eau repompée en surface. Selon certaines estimations (de l’Institut du Pétrole par exemple) ce gaz de schiste pourrait créer des ressources pour environ 150 ans. Quand je vous disais qu’après chaque crise on trouvait des ressources énergétiques nettement plus abondantes que celles qui étaient prévues avant la crise, nous en avons là un bon exemple.
Cela signifie-t-il que vous proposez de revenir aux ressources pétrolières ?
Ce n’est pas du tout mon intention. Il s’agit simplement d’éviter toute panique énergétique, laquelle ne doit manifestement pas être notre pilote : « nous manquerons d’énergie » est un mauvais mensonge. Reste le problème de la protection de l’atmosphère, et en particulier de la maîtrise de l’effet de serre : nous y reviendrons Lundi prochain, car c’est plus délicat.
Roger CADIERGUES