Vers la généralisation du bâtiment à énergie positive BEPOS

Par Richard LOYEN - délégué général d’Enerplan, syndicat des professionnels de l’énergie solaire

Le bâtiment à énergie positive, qu’est-ce que c’est ?

Graph BEPOS
Le bâtiment à énergie positive (BEPOS) est la prochaine et ultime évolution de la réglementation thermique du bâtiment, avec une consommation d’énergie non renouvelable optimisée et compensée par une production locale d’énergie renouvelable. Le BEPOS intègre consommation et production d’énergie sur un même lieu en faisant du lieu de consommation un lieu de production, pour tendre à rendre nul l’impact énergétique d’une nouvelle construction. C’est le prochain standard de construction pour 2020, qui devrait être préalablement exigé (2018) pour les nouveaux bâtiments publics. Sa définition est simple à retenir : la production annuelle d’énergie renouvelable est supérieure à la consommation annuelle d’énergie non renouvelable pour tous les usages.

Vers 100% BEPOS

Le bâtiment neutre en énergie (nearly zero energy building) est inscrit dans la directive européenne de 20101 relative à la performance énergétique des bâtiments. Ainsi, les bâtiments neufs privés « nearly zero energy » doivent être généralisés en Europe à l'horizon 2020, avec une anticipation obligatoire pour les bâtiments publics dès 2018. Cette obligation a été partiellement transcrite dans le droit français avec la loi Grenelle 12 qui transforme le « nearly zero energy building » en bâtiment à énergie positive, soit l’exigence du BEPOS à la française pour 2020. Sans doute la prochaine loi de transition énergétique finira de transcrire la directive vis-à-vis des bâtiments publics neufs, qui devront être BEPOS après 2018.

1 n°2010/31/UE article 9
2 du 3 août 2009, article 4

Le BEPOS est-il une utopie technologique ?

Les premiers retours d’expérience de projets BEPOS montrent qu’il n’y a pas de rupture technologique majeure mais une avancée vers l’innovation technique et organisationnelle avec la prise en compte de la performance énergétique dès l’esquisse du projet. Réaliser un BEPOS est relativement « simple » si le maître d’ouvrage est motivé et les professionnels compétents.

Après le saut qualitatif que représentait le passage de la Réglementation Thermique 2005 à la RT 2012, l’accès au niveau BEPOS est relativement aisé (d’un point de vue technique et économique) avec la maîtrise des besoins grâce à une bonne conception ainsi qu’au recours à la chaleur renouvelable, et avec la production d’électricité solaire au niveau de l’enveloppe du bâtiment.

A la mi-temps de la réglementation, les professionnels sont-ils prêts ?

Les professionnels du bâtiment les plus engagés dans la transition énergétique sont dans les starting-blocks pour réaliser des projets BEPOS. Anticiper la généralisation du bâtiment à énergie positive n’est pas un problème. A l’instar du label BBC-effinergie qui a pavé la voie à la RT2012, avec une appropriation progressive et anticipée par les précurseurs, le même type de démarche est à prévoir avec le label Bepos-effinergie vis-à-vis de la Réglementation thermique 2020. Les retours d’expérience avec le label BBC ont montré que les acteurs anticipant les plus tôt les futures évolutions réglementaires sont ceux qui les ont intégrées au mieux et n’ont ressenti aucune difficulté lors du changement de réglementation.

Flèche 2011 - 2020Nous connaissons l’objectif, l’échéance proche et les moyens d’y arriver. Aujourd’hui seule une construction pour 10 000 est au niveau BEPOS, après 2020, il faudra que 100% des constructions neuves le soient ! A nous tous d’avancer progressivement vers le 100% BEPOS 2020. Pour ne pas se retrouver au pied du mur réglementaire dans 5 ans, il faut anticiper l’exigence 2020. Dans cette anticipation, la maîtrise d’ouvrage publique est particulièrement concernée. Au titre de l’exemplarité, elle doit être en pointe dès 2018. Les maires ne pourront lancer de projets qui ne soient pas BEPOS d’ici la fin de leur mandat, alors qu’il sont invités et aidés à le faire dès aujourd’hui.

L’équation économique du BEPOS est-elle soluble dans le marché de l’immobilier ?

Toute chose égale par ailleurs en termes de coût de la performance intrinsèque du bâtiment au niveau Effinergie+ (RT 2012 -20%) estimé à environ 50 €/m² de construction / à la RT 2012 ; le surcoût pour passer au niveau «énergie positive» résulte essentiellement du générateur d’électricité renouvelable pour compenser la consommation résiduelle. Pour passer du niveau Effinergie+ au niveau BEPOS, il faut compter de 30 à 50 W de photovoltaïque par m² de surface de plancher, soit un surcoût estimé entre 50 et 100 €/m² de SHONRT en 2014, qui devrait descendre entre 30 et 50 €/m² de SHONRT en 2020 avec la baisse projetée des coûts du photovoltaïque.

Il est important de noter que ce surcoût du BEPOS réside dans un investissement productif (générateur électricité EnR) qui se refinance dans le temps (moins du 20 ans), par la vente d’électricité et dans certains cas par les économies de charges avec l’autoconsommation.

Ce surcoût du BEPOS, très nettement orienté à la baisse, doit par ailleurs s’appréhender au regard de la survaleur verte (goodwill) du bâtiment à énergie positive et de sa non dépréciation normative et réglementaire (meilleur niveau performantiel en vigueur) en terme d’actif immobilier.

L’anticipation volontaire du BEPOS par le marché immobilier sera à géométrie variable, selon les segments de marché, en fonction de la volonté des acteurs et des opportunités économiques. Les tendances observées montrent l’émergence du BEPOS sur le marché du bâtiment tertiaire privé.

Quelles solutions techniques privilégiées pour le BEPOS ?

Dans le cadre de l’étude sur l’élaboration de la feuille de route du BEPOS en PACA, coordonnée par Enerplan avec Effinergie, BDM et Envirobat, nous avons étudié un échantillon d’une quinzaine de BEPOS. Sans pouvoir en tirer d’enseignements définitifs, on peut toutefois identifier des pistes de réflexion sur les techniques à privilégier pour limiter la consommation à compenser pour la zone méditerranéenne.

Avant d’entrer dans la technique, nous avons constaté que les mesures architecturales et urbaines ont un impact important sur la performance énergétique. Ainsi, il faut favoriser l’orientation Sud plus ou moins 30° pour une majorité relative des vitrages, surtout si l’usage nécessite beaucoup de chauffage. Il faut par ailleurs rechercher une compacité adaptée à l’usage permettant ventilation et éclairage naturels. Si la compacité relève d’un choix architectural, il faut savoir qu’une forte compacité peut conduire à un bilan énergétique moins intéressant.

Au niveau technique, il y a lieu de privilégier ce qui conduit à des économies d’investissement sur le bâtiment, tels :


  • Des facteurs solaires de vitrages adaptés à l’orientation et à l’usage (fort au nord et au sud, faible à l’est et l’ouest),
  • Une réflexion en amont sur la production d’eau chaude : centralisée avec fort rendement mais plus de pertes en ligne ou décentralisée (idem pour le chauffage). Alors que le poste de production d’eau chaude est très impactant sur la performance globale en résidentiel, le recours à la chaleur solaire permet de réduire significativement la consommation d’énergie primaire du poste ECS,
  • Le choix du type de ventilation. A double flux avec des pertes de charges limitées à 150 Pa, une étanchéité des gaines, un échangeur à haut rendement, moteur performant et silencieux. A comparer avec une ventilation simple flux qui peut s’avérer suffisante. Si la VMC double flux s’impose, il peut être judicieux qu’elle serve de mode transport au chauffage, ce qui permet de supprimer radiateurs et tuyauteries, mais oblige à bien penser la régulation


Nous préconisons de faire des choix de bon sens très peu coûteux, qui sont importants :


  • Prévoir une végétation caduque au Sud pour limiter ou éviter la climatisation, et dans certains cas, persistante au Nord pour réduire les vents froids
  • Vérifier que les annexes de chauffage et ventilation, répondent bien à la norme Eup/Erp, obligatoire depuis le 1er Janvier 2013
  • Prévoir un éclairage artificiel performant


Enfin, il y a les mesures d’un coût très modéré :


  • La création d’une porosité de 10 à 20% selon le climat sec (10%) ou bord de mer (20%) pour favoriser la ventilation traversante, condition parfois suffisante pour supprimer la climatisation (la porosité est le ratio entre la surface des ouvrants d’une façade et la surface totale de cette façade)
  • Rechercher une inertie « sans exagérer » : deux projets récents évalués en PACA ont conclu qu’une dalle de 5 cm de béton pouvait suffire à réguler un m² habitable
  • L’optimisation de l’isolation par rapport à la RT 2012 à respecter, sachant qu’en zone H3, l’augmentation d’isolation doit d’abord servir à éviter la climatisation et non à la favoriser
  • Le choix d'une étanchéité à l’air adaptée, conforme à la réglementation. Aller chercher une excellente étanchéité n’apportera pas forcément beaucoup de gain
  • Le choix des protections solaires adaptées à l’orientation et à l’usage


On retiendra que le parti architectural et les choix techniques ont une grande influence sur l’optimisation des besoins. Cette optimisation à coût marginal, peut significativement réduire le besoin d’investissement dans le générateur d’électricité renouvelable, et par conséquent baisser le coût de revient du BEPOS.

Le label qui pave la voie à la réglementation 2020

Le développement du bâtiment à énergie positive repose aujourd’hui en France sur le label Bepos-Effinergie-2013, qui s’appuie sur la RT 2012 et le label Effinergie+. Le bâtiment doit respecter les critères du label Effinergie+, avec un bilan d’énergie primaire non renouvelable qui doit être inférieur à l’écart autorisé. La consommation d’énergie primaire non renouvelable, couvre les cinq usages réglementaires et celle liée aux autres usages. L’écart à l’énergie positive est accepté, pour permettre aux bâtiments exemplaires d’obtenir le label dans tous les contextes urbains, avec la prise en compte du type de bâtiment et de la densité urbaine.

Logo BEPOS Effinergie 2013

Synthèse des règles techniques du label Bepos-Effinergie-2013 :
Bilan epnr < Ecart autorisé

Le « bilan epnr » est le bilan d’énergie primaire non renouvelable consommée en fonctionnement. C’est la différence entre l’énergie primaire non renouvelable entrant et l’énergie primaire renouvelable sortant.

Maiosn Niveaux
Ecart autorisé = Cepref+ Aueref – Prodref, soit la somme de la consommation de référence Effinergie+ pour les usages réglementés (Cepref) et de la consommation d’énergie primaire liée aux autres usages (Aueref : 70 kWhep/m².an pour le logement, 100 pour des bureaux et 30 pour bâtiment d’enseignement et crèche), à laquelle on soustrait la production EnR de référence qui correspond au potentiel de production du projet (Prodref). La production Enr de référence est pondérée selon le type de bâtiment et le nombre de niveaux.

Si la consommation d’énergie grise (matériaux de construction) et la consommation d’énergie engendrée par les déplacements des utilisateurs du bâtiment (potentiel d’écomobilité) n’ont pas été intégrées dans le label Bepos-Effnergie-2013, elles doivent toutefois être évaluées. Pour le potentiel d’écomobilité, un outil est disponible en ligne.


Ecomobilité
Règles techniques du label Bepos-effinergie-2013

Par Richard LOYEN
Délégué général d’Enerplan, syndicat des professionnels de l’énergie solaire.
ENERPLAN représente l’offre solaire industrielle et commerciale en France (industriels, ensembliers, bureaux d’études, installateurs, architectes, énergéticiens,...). Sa vocation : Agir pour la promotion et le développement de l’énergie solaire. Ses missions : Représenter et défendre les professionnels du solaire ; animer, structurer et promouvoir la filière solaire française.
www.enerplan.asso.fr

SOURCES ET LIENS

Logo Enerplan


Commentaires

  • Jean-Marc
    0
    12/07/2014

    Bonjour,

    Dans les solutions techniques privilégiées préconisées, apparaît généralement une absence révélatrice d'un manque d'informations spécifiques ou erronées, c'est la gestion active et dynamique des lots techniques du second œuvre par la mise en place d'une véritable domotique adaptée aux besoins et au budget du maître d'ouvrage.
    La GAB (Gestion Active du Bâtiment) ne doit pas être un gadget mais bien la nouvelle génération d’installation électrique moderne, intelligente et communicante. Elle permet de développer un système impressionnant de puissance et de multiples possibilités de fonctions et de scénarios.
    L’intelligence dans le bâtiment positionne l’installation électrique comme un vrai levier de la performance énergétique et du confort.
    La domotique ne doit pas être un ajout mais bien la colonne vertébrale des lots techniques.
    Adressez-vous à un véritable intégrateur-domoticien qui vous composera une installation électrique moderne, innovante, intelligente, flexible, évolutive et communicante.
    Vous devez le faire intervenir en début de projet car il orchestrera la gestion dynamique de l'éclairage, du chauffage, des occultants, de la ventilation, de la sécurité et d'autres fonctionnalités.
    Cette méthodologie vous évitera les doubles emplois et vous aurez ainsi une gestion active, dynamique et centralisée de votre maison.
    Contrairement à ce que l'on vous laisse croire, cette technologie n'est pas beaucoup plus onéreuse que la solution traditionnelle mais elle vous procure une puissance de fonctionnalités démesurées.
    Si vous faites appel à un simple électricien, il se tournera vers son grossiste qui vous fournira le matériel sur lequel il a la plus belle marge sans se préoccuper des fonctionnalités spécifiques à votre construction.
    Consultez l'annuaire du site de la FFD (Fédération française de Domotique) pour trouver un spécialiste dans votre région : http://www.ffdomotique.org/.
    Question prix, je ne suis pas d'accord avec la tendance à dire que la domotique coûte cher.
    Si vous passez par un bon intégrateur-domoticien, en début de projet, il vous confectionnera, à fonctionnalités égales, une installation électrique moderne, flexible, innovante, évolutive, intelligente et communicante pour un budget légèrement supérieur à une installation figée qui ne vous permet aucune évolution.
    Je le répète, la domotique doit être la colonne vertébrale des lots techniques de votre construction abordée en amont de votre projet par un spécialiste qualifié.
    Adressez-vous à un technicien spécialisé qu'est l'intégrateur-domoticien.
    N'étant lié à aucune marque, il choisira dans la panoplie des produits du marché ce qui correspond le mieux à vos besoins et à votre budget.
    Choisissez celui qui travaille en KNX, seul protocole mondial ouvert comprenant plus de 340 fabricants et des milliers de produits parlant le même langage.
    Enfin, sachez qu'à fonctionnalités égales, une domotique ouverte ne coûte que quelques pourcents en plus qu'une installation traditionnelle et vous permet d'avoir une globalisation et une interopérabilité des différentes fonctions.
    Le ROI est limité à +- cinq années.
    En conclusion, il est scandaleux, aberrant et incompréhensive, d'encore voir en 2014 des nouvelles constructions équipées d'une installation figée basée sur des principes du siècle dernier !!!


  • mohamed
    0
    11/07/2014

    En tant que lecteur intéressé par les sujets sur l’efficacité énergétique, j'adhère à ce nouvel objectif "Bepos"qui optimise la consommation énergétique entre le renouvelable et le non renouvelable dans l'exploitation des bâtiments. La finalité pour moi est d'arriver à inclure la phase fabrication des matériaux de construction dans le bilan énergétique pour mieux apprécier ce que consomme 1m² de béton pour le fabriquer en usine et ce qu'il consomme après pour assurer le confort.


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