Par Thierry Aubert - Responsable Technique Chauffage et Équilibrage DANFOSS
Cette chronique traite d’équilibrage hydraulique au travers de 3 questions de la rédaction d’XPAIR posées à Thierry Aubert, responsable technique et formateur chez DANFOSS.
Les sujets posés sont :
→ L’auto-équilibrage hydraulique : quels procédés et précautions sont à mettre en avant aujourd’hui ?
→ Equilibrage hydraulique et qualité d’eau, compatibilité et précautions également ?
→ Est-ce que la régulation digitale et IA pourraient régler l’équilibrage hydraulique par vannes et le faire disparaître ?
L’équilibrage automatique : une évolution irréversible
Equilibrage automatique = une (r)évolution dans le monde de l’hydraulique
Apparues sur le marché français il y a plus de 30 ans, les solutions d’équilibrage automatique pénètrent progressivement tous les domaines du CVC, soit le chauffage à eau chaude, la climatisation et le refroidissement.
En Europe, les solutions ont été adoptées plus rapidement dans tous les domaines (résidentiel, tertiaire, réseaux urbains), alors qu’en France la pénétration est toujours faible en résidentiel mais a été immédiate sur les applications unités terminales en tertiaire.
Notons toutefois une percée notable des robinets thermostatiques auto-équilibrants qui sont applicables dans une bonne partie du parc résidentiel.
Robinets thermostatiques auto-équilibrants
RA-DV Danfoss
Ensemble qui regroupe un robinet thermostatique et un limiteur de débit dans un même produit, agissant à la fois au contrôle de la température et à l'équilibrage automatique de l'installation.
Le régulateur de pression différentielle intégré élimine les variations de pression dans les systèmes de chauffage bitube.
Equilibrage automatique = maîtrise des débits à toutes les charges
C’est pourquoi il supplante l’équilibrage manuel sur les réseaux à débit variable. Pour les plus calés en hydraulique, il s’agit la plupart du temps d’une maîtrise des deltaP sur les réseaux ou dans les organes.
L’équilibrage hydraulique recèle un des plus gros gisements d’économies d’énergie facilement atteignables (5 à 15%).
En particulier, on peut citer :
- une augmentation des deltaT sur les réseaux , d’où de moindres déperditions sur les retours et de meilleurs rendements de la production.
- une répartition correcte des débits pouvant conduire à une baisse de la courbe de chauffe.
- un meilleur calage des horaires de remise en température après une intermittence.
Equilibrage automatique = simplification des procédures d’équilibrage
La sélection des produits est plus simple. Les procédures de réglage des vannes sont beaucoup moins lourdes et plus rapides qu’avec des vannes manuelles.
En effet, avec de l’équilibrage manuel, chaque action sur une vanne de réglage a une influence sur le débit des autres vannes. C’est cette interaction qui rend complexe et longue la procédure d’équilibrage.
Avec des vannes automatiques, on règle un débit ou un deltaP pour la branche considérée.
Il est préférable de commencer par les vannes les plus proches de la pompe de circulation.
On ne passe qu’une fois sur la vanne.
A la fin, on peut mesurer le deltaP sur la branche la plus éloignée afin d’optimiser la HMT des pompes à vitesse variable.
Procédure de réglage de vannes automatiques
Equilibrage hydraulique et qualité d’eau, compatibilité
Faut-il une qualité d’eau particulière pour des solutions de vannes automatiques ? La réponse est non, pas plus particulière que les recommandations de fabricants de chaudière de PAC ou de radiateurs.
L’évolution que nous avons connue est une arrivée massive d’organes de régulation de la production aux terminaux. On est très loin des installations en thermosiphon où il n’y avait pas grand-chose.
Traiter de possibles embouages, traiter de possible dérives de concentration de métaux dans les circuits etc. …, fait partie des prérequis avant l’installation de tout composants en contact avec l’eau.
On peut aussi noter la tendance forte à la diminution des débits où les vannes d’équilibrage automatiques montrent toute leur supériorité. A ces débits, une vanne automatique aura moins de chance de se colmater qu’une vanne manuelle.
Est que la régulation digitale et IA pourraient régler l’équilibrage hydraulique et le faire disparaitre ?
Tout dépend de quelle régulation on parle.
→ Si l’on parle de la régulation terminale d’une température ambiante ou de soufflage, il faut bien avoir à l’esprit la courbe de puissance d’un échangeur de chaleur eau/air.
Dans cet exemple, on voit qu’un sur-débit de 100% n’engendre qu’une surpuissance de 5 à 10 %.
Un écart de 1 K seulement couvre une variation de débit de 100 à 200%.
Autant dire que l’on peut avoir des sur-débits et des deltaT médiocres avant que la sonde de température ambiante ne commence à corriger.
En théorie, en augmentant la sensibilité et la rapidité de ces sondes, on améliorerait le système, mais à quel coût ?
Mais cela ne réglerait pas le problème d’inertie et du temps de réaction de la charge thermique.
Le retard de réaction autoriserait toujours des sur-débits.
Des algorithmes d’apprentissage de la charge thermique peuvent améliorer la maîtrise des puissances à condition que les vannes employées contrôlent parfaitement les débits à toutes les charges.
C’est le domaine de prédilection des vannes PICV (Vannes de régulation indépendantes de la pression) sous réserve qu’elles possèdent une autorité de 100 %, quel que soit leur réglage.
Dans ce cas, on voit déjà sur le marché des vannes dont le débit peut être commandé de manière digitale par bus de communication.
Ce sont des vannes motorisées évoluées que l’on voit apparaître surtout dans les domaines tertiaires et de réseaux urbains.
NovoCon est adapté aux bâtiments connectés intelligents, il permet une surveillance continue, une gestion de l’énergie et une maintenance préventive.
→ Si l’on parle d’une régulation supplémentaire du deltaT sur le primaire du terminal , cela devient plus intéressant car elle est liée à la maîtrise du débit et à la charge thermique.
Et le temps de réaction est très rapide puisque la mesure est faite sur le primaire en sortie du terminal (température de retour).
Une vanne PICV* associée à un actionneur évolué voire communicant répond aisément à ces exigences.
Considérant la maîtrise des débits gérée par des solutions digitale et IA , il restera à veiller à une gestion des deltaP sur les réseaux , car, sinon, gare aux problématiques acoustiques.
On en revient toujours à l’utilisation de vannes capables d’encaisser ces augmentations de deltaP : par exemples des PICV. Ou bien des vannes d’équilibrage automatique à membrane limitant le deltaP.
Pour résumer, une avancée digitale a commencé mais elle doit forcément être répartie entre l’électronique et les qualités intrinsèques de vannes d’équilibrage / de régulation.
Pour imager cette tendance, nos véhicules actuels sont gérés par l’électronique mais les actionneurs ne sont plus les mêmes qu’avant, ils ont évolué eux aussi.
Par Thierry Aubert - Responsable Technique Chauffage et Équilibrage DANFOSS