Par Marika Frenette, Architecte Wigwam Conseil et J.M. Morisseau, Angers Loire Habitat
Au-delà des performances exceptionnelles de ce projet de logements collectifs E+C- situés à Beaucouzé (49), l’intérêt de ce retour d’expérience est l’approche systémique et collaborative dès le début du projet proposée et acceptée par la maîtrise d’ouvrage bailleur social. Et surtout la dimension carbone globale, que développe et nous amène à prendre en compte l’architecte urbaniste Marika Frenette.
Voici en exclusivité et en vidéo pour les lecteurs d'XPAIR, la conférence animée par le duo composé de Marika Frenette, Architecte-urbaniste, Présidente-fondatrice, Wigwam Conseil et Jean-Michel Morisseau, Responsable amélioration et renouvellement patrimoine, Angers Loire Habitat, lors de la Journée de l'Efficacité Energétique et Environnementale du Bâtiment EnerJ-meeting, le 10 octobre 2019 à Nantes.
Réflexion globale et bas carbone pour les logements sociaux E+C- à Angers
L’opération HELIOS se situe dans un contexte urbain et péri-urbain près de la commune de Beaucouzé (49) sur des terres agricoles et constitue la 3ème phase d’une ZAC.
Une démarche collaborative bas carbone dès le départ
Démarche de conception collaborative
Au niveau des ateliers qui ont été animés par l’architecte, l’idée était de partir d’une page blanche et de mettre autour de la table les utilisateurs, les propriétaires privés, des bailleurs sociaux, la mairie, l’aménageur et d’autres bureaux d’études, afin de travailler sur les usages et l’intégration dans ce futur quartier. Et J.M. Morisseau, d’Angers Loire Habitat, de préciser « pour nous, en tant que bailleur, avec cette démarche collaborative, 50% du travail était fait à ce niveau de concertation et de synthèse des idées avec une prise en compte de la dimension énergie/carbone dès le départ ». Soit une démarche collaborative et un Processus de Conception Intégré (ou PCI).
Ce qui est intéressant c’est que les bailleurs sociaux et les promoteurs sont venus à des ateliers où chacun a apporté son savoir-faire pour concevoir ensemble la zone globale avant que les fiches de ilots soient faites.
Et Marika Frenette de compléter « De ce fait l’architecte urbaniste devient au service d’une réflexion collective, il a tout son rôle à jouer, mais un rôle qui devient plutôt de transférer/synthétiser l’ensemble des contraintes que personne ne peut avoir seul à l’esprit ».
Bâtiment de logements collectifs HELIOS à Beaucouzé (49)
Les caractéristiques d’HELIOS : bâtiment de logements collectifs E+C-
Un référentiel énergie/carbone E3 C1
Nous sommes arrivés à un niveau d’énergie E3 et entre C1 et C2 pour la partie carbone, Nous pouvions être E4 et C1 en étant simplement plus couverts de panneaux photovoltaïques. Nous pouvions également être E3 et C2 en optant pour une chaufferie bois, ce que nous avions fait sur un premier projet.
Prendre globalement conscience de la dimension carbone au-delà du bâtiment
La part carbone globale : env. 10 tonnes C02/an pour une famille
Globalement, une famille française moyenne selon les logiciels consomme annuellement 11.5 tonnes, soit autour de 10 tonnes de CO2 par personne et par an – cf visuel ci-dessus. Sur ces 10 tonnes, on voit que la part bâtiment que ce n’est qu’une part et non la plus importante. Après il y a tout le reste que l’on va regarder ci-après en détail, et cette réflexion qui se fait nécessairement à l’échelle urbaine, amène le concepteur a réfléchir et à aller au-delà que « juste le bâtiment », et donc vers le déplacement des personnes, les transports en commun, ...
La part des matériaux des construction est minime
Prenons une famille factice qui habiterait dans ce logement et l’on regarde l’impact de chacun de ces postes en imaginant des scénarios de vie.
Regardons les bilans réels de trois personnes et d’une en particulier. Trois situations réelles de locataires contactés récemment pour pouvoir mettre à jour nos données.
Quand on est sur un bilan de trois personnes, cela divise par trois le bilan global, là c’est son bilan à elle mais on pourrait imaginer que l’on pourrait faire le bilan des enfants qui serait un peu différent, donc on voit une différence par rapport au fait du poids carbone du logement par m² qui est complètement lié à l’usage qu’il y a à l’intérieur.
Trois familles et leurs émissions annuelles de CO2
Que voit-on plus précisément pour la 1ère famille?
Détail des émissions annuelle de CO2
Le bilan global avec ce logiciel, qui se nomme Micmac, est ce que l’on voit apparaître sur ce logiciel le découplage entre la partie logement qui concerne les constructions et l’énergie, la part transport donc cette personne fait entre 12 et 15 000 kilomètres de diesel par année, la part alimentation c’est une personne qui mange de la viande, du poisson à tous les repas comme plusieurs d’entre vous, les fruits et les légumes elle achète beaucoup de fruits …
Plus de détails sur la vidéo :
En résumé, cela est notre feuille de route à tous d’ici 2050, c’est diviser par 5 notre poids carbone et d’ici 2030 c’est diviser par 2, c’est une moyenne. Une famille par exemple avec deux enfants qui fait un voyage en Asie et qui fait deux voyages en Europe c’est déjà 15 tonnes, donc le sujet nous concerne tous individuellement ce n’est pas que l’Etat qui doit réglementer, ce n’est pas qu’une question de pouvoir mettre des matériaux biosourcés locaux, le sujet nous concerne tous et il concerne l’ensemble des impacts. Bâtiment et autres !
Est-ce que l’objectif est de faire des bâtiments bas carbone ou d’essayer nous acteurs du bâtiment de contribuer à une objectif global bas carbone et si notre objectif est de contribuer il faut se poser les questions de manière systémique, se dire comment peut-on inciter les locataires à manger moins de viande et plus de régimes protéines végétales ; là on commence à se poser des questions et on commence à travailler de manière systémique et là les bonnes questions viennent rapidement, c’est vraiment important d’avoir cette conscience-là globale.
Feuille de route 2050 famille moyenne
La question du carbone nous amène à une réflexion globale et majeure bien au-delà du bâtiment en tant qu’objet passif. Cette prise en compte majeure se fait en globalité pour les professionnels que sont les MOA et MOE pour la construction neuve comme pour la rénovation. Pour le neuf, si nous prenons l’exemple de ne cibler que le biosourcé pour un objectif bas carbone est nécessaire certes mais amplement insuffisant. Par exemple, la part du bois en structure dans la famille étudiée ci-avant ne représente que 0.3% !
Marika Frenette, Architecte-urbaniste, Présidente-fondatrice, Wigwam Conseil
et Jean-Michel Morisseau et Responsable amélioration et renouvellement patrimoine, Angers Loire Habitat
Sources et liens
La démarche collaborative entre maître d'ouvrage et maîtres d'oeuvre (Architectes et Ingénieurs) est un investissement en temps et en compréhension du programme qui va s'avérer rentable car tout est mis sur la table en amont, les idées fusent et de complètent. Quant à la dimension carbone étendue au transport et aux modes de vie actuels et à venir, quoi de plus évident dans une optique CYCLE DE VIE du bâtiment et des occupants. Bravo à Marika!