Par Véronique Pillot, Directrice des études GTM Bâtiment et Hélène Schwoerer, Directrice générale adjointe Paris Habitat
Voici en exclusivité pour les lecteurs d’Xpair l’exposé sur la rénovation et surélévation-extension d’un total de 819 logements Glacière-Daviel à Paris 13ème, dont 64 logements créés en surélévation ; conférence effectuée le 6 février 2020 lors de la journée de l’Efficacité Energétique et Environnementale du Bâtiment EnerJ-meeting.
C’est un retour d’expérience d’une complexité importante en milieu urbain avec une rénovation BBC de 756 logements réhabilités et de 64 logements neufs créés en surélévation.
Glacière Daviel : rénovation BBC de 756 logements création de 64 logements en surélévation - E H W Architecture
Surélévation-extension d’un total de 819 logements Glacière-Daviel
Le projet de Glacière-Daviel est extrêmement ambitieux car il concerne 756 logements existants datant des années 60 qui sont réhabilités, 64 logements construits neufs sur les toits et 17 cages d’ascenseur qui ont été adjointes aux bâtiments.
C’est une ambition de PARIS HABITAT et c’est une œuvre d’un cabinet d’architectes qui se nomme EHW Architecture – Mme Elisabeth HODBOURG et Mme Marie WAGNER –GTM BATIMENT a travaillé à l’ouvrage de cet ouvrage complexe pour la partie rénovée occupée. Cela a été donc une aventure pour les locataires, les résidents, et pour les riverains.
Surélever, cela présente plusieurs challenges : un des challenges c’est de construire en zone tendue, ici c’est construire dans Paris, c’est construire en site occupé sans avoir de terrains disponibles. Sur le plan masse avant / après finalement cela ne bouge pas beaucoup car on n’occupe pas plus de surface qu’auparavant.
C’est un projet qui a démarré en 2011 avec des premiers rendez-vous avec les amicales, car tous ces projets d’amélioration du cadre bâti sont soumis à des concertations multiples, à des enquêtes individuelles, …
Conférence de 20 minutes sur la surélévation-extension Glacière-Daviel
Quelques chiffres qui caractérisent le projet : c’est un investissement de plus de 65 millions d’euros, 756 logements réhabilités et 64 logements neufs créés, donc plus de 21 millions d’euros pour la création des 64 logements, ce qui donne un coût moyen de 4 400 euros du m² habitable.
Surélévation-extension en milieu occupé à Paris, un challenge réalisable
Création de 64 logements en surélévation - avant et après travaux - Glacière Daviel : E H W Architecture – GTM Bâtiment
Sur les 2 bâtiments avant rénovation et après surélévation - visuel ci-dessus - nous n’avons pas le sentiment qu’ils ont bougé, qu’ils ont donné lieu à un travail énorme. De plus près, nous voyons néanmoins qu’il y a une forêt de cheminées qui, elles, ont complètement disparues. Nous sentons bien que dans un projet comme celui-ci il va y avoir des évacuations de fumées qui venaient des anciens logements qui vont devoir traverser les nouveaux, nous allons devoir réalimenter les nouveaux logements en traversant les anciens, et allons devoir aussi évacuer les nouveaux logements en traversant les parties communes des anciens, et en fait nous sentons bien qu’en fonction de la conception du logement du dessus il faudra peut-être envisager un niveau de transition, un niveau de transfert de tous ces réseaux.
En matière de phasage de travaux, c’est complexe car il faut que les gens vivent dans leurs logements, que cela soit vivable, assurer tous les fluides dans les logements en permanence, …
L’étanchéité est également un sujet délicat, car tant que nous n’avons pas posé la surélévation et qu’elle n’est pas hors d’eau et hors d’air, le risque de fuites restait très important.
Pendant le projet, le bâtiment est resté échafaudé assez longtemps car nous avions besoin de l’échafaudage pour surélever et pour les travaux de façade.
Concrètement une surélévation c’est quoi ?
C’est poser une structure sur un bâtiment existant, c’est avoir une structure de report que nous verrons par la suite ; nous adjoignons des circulations verticales pour accéder aux nouveaux logements qui sont dans les étages et éventuellement des renforts à mettre en place dans le bâtiment existant.
Décomposition de la surélévation - extension Glacière-Daviel à Paris
Sur le plancher de report où la zone de transfert est importante en fonction de la conception des logements du dessus, les charges ne peuvent pas descendre n’importe comment, il faut les orienter sur les porteurs d’en-dessous, car il y a des locataires et construire des poteaux de reprise de structure au milieu des familles n’est pas envisageable.
Détail de construction sur la descente de charges projet de la surélévation - extension Glacière-Daviel à Paris
Nous avions une autre contrainte car sur ce site, qui a été construit sur du foncier ville de Paris depuis des années, les 756 logements et un théâtre, qui est vraiment au centre de notre groupe résidentiel étaient construits sur dalle sur un parking qui dans les années 80/90 était propriété de l’OPAC mais qui a été mis en copropriété; donc autant de négociations avec des centaines de copropriétaires et avec un syndic de propriétaires pas forcément facile pour négocier ces reprises de structures et descentes de charges. Il a donc fallu des années de négociations avec ces copropriétaires avant de pouvoir intervenir et permettre la création de cette surélévation. Nous avons eu du retard car nous avons eu beaucoup de recours contentieux sur les permis pour la surélévation.
Zoom sur la structure de report de la surélévation - extension Glacière-Daviel à Paris
L’accessibilité a été largement améliorée avec la mise en œuvre d’ascenseurs. Effectivement les bâtiments étaient R+4 dans les années 60, il n’y avait pas d’ascenseur et faire ce type de projet c’est aussi permettre aux personnes de rester dans leur quartier, de vivre toujours dans leur logement malgré les années qui passent et les accidents de la vie.
Pour les ascenseurs, pour ne pas trop empiéter sur le parking en copropriété, nous avons travaillé avec des cuvettes d’ascenseur d’épaisseur très mince pour ne pas annuler de places de parking sous l’ascenseur ou de faire démarrer un ascenseur au premier étage.
L’accessibilité de la surélévation - extension Glacière-Daviel à Paris
L’effort thermique : le bâtiment réhabilité consommait à peu près de 200 kWh au m² avant réhabilitation ; après réhabilitation il est passé à moins de 70 kWh et la surélévation est à moins de 50 kWh ; nous sommes dans le BBC bien en-dessous, nous sommes dans le Plan Climat de la ville de Paris donc nous avons les labels de bilans de consommations.
Confort thermique, projet de la surélévation - extension Glacière-Daviel
Le confort thermique d’été est un vrai sujet, sur le plan masse vous avez des façades Ouest et Sud. Il est géré par des stores, par des panneaux coulissants sur des loggias cela permet de s’abriter des rayons du soleil.
Choix des matériaux, la surélévation - extension Glacière-Daviel
Il y a eu un vrai challenge dans le choix des matériaux : les matériaux sont durables ; le bardage en bois de mélèze et en zinc ; dans les parties courantes du bardage minéral reconstitué ; la structure de la surélévation en bois. Le bois est souple : à la fois on peut amener des chevrons les monter sur place, pré-fabriquer des panneaux en usine et monter des panneaux, faire préfabriquer des blocs 3D que l’on peut poser sur les terrasses, c’est aussi très léger, bien plus que l’acier et le béton, donc dans ces sujets où les surélévations apportent des charges complémentaires c’est important de construire léger sans avoir à renforcer la structure.
Modes constructifs des structures en bois des logements surélevés
Lorsque nous faisons des rénovations thermiques, il y a un point qu’il faut bien maîtriser c’est l’étanchéité des menuiseries extérieures, et là PARIS HABITAT a fait un vrai choix car Glacière-Daviel avait déjà été rénové, il y avait déjà des fenêtres posées sur d’anciens bâtis, (parties fixes des anciennes fenêtres) et la gestion d’étanchéité n’est jamais très simple à régler et donc là, le maître d’ouvrage a choisi de complètement déposer non seulement les fenêtres mais les anciens bâtis et de reposer la nouvelle fenêtre avec une parfaite étanchéité. La suggestion que nous avons eue à gérer était qu’il y avait de l’amiante dans le joint et pour déposer cet amiante il a fallu déplacer les locataires pendant la durée des travaux, sur le site.
A chaque étape de ce projet, tout a été rénové de façon durable et pérenne, et effectivement, ce projet, en travaux a duré 5 ans.
Conclusion
Glacière-Daviel c’est aujourd’hui 819 logements qui s’inscrivent autour d’une place qui a été complètement requalifiée au pied du théâtre 13 qui est un magnifique lieu de vie. La démarche de rénovation énergétique élargie à une amélioration du confort de vie des occupants (prise en compte de l’accessibilité) avec une surélévation de logements à haute performance énergétique et environnementale est un exemple d’un projet difficile mais réalisable où la dimension humaine environnementale a été à la fois préservée et valorisée.
Quelques mots GTM Bâtiment et Paris Habitat
Véronique Pillot, Directrice des études GTM Bâtiment de s’exprimer : « Rénover l’habitat c’est un métier que nous pouvons qualifier de magique car quand nous quittons les projets nous avons le sentiment d’avoir créé du bonheur, d’avoir changé un quartier, car nous manquons tellement de logements sociaux en Ile de France que, profiter des projets de rénovation pour créer de nouveaux logements est un projet difficile mais exaltant. Les différents projets que nous menons qui relèvent tous de la même volonté de leurs propriétaires et bailleurs sociaux qui est de créer des logements à des prix accessibles sans avoir à démolir, sans avoir à réduire les espaces verts, sans avoir à occuper des zones de terre-plein ou à trouver du foncier, en clair, c’est créer des logements abordables dans des zones très bien desservies, équipées, mais c’est aussi intervenir dans un site occupé avec des familles en place, c’est aussi en profiter pour rénover ces logements, les mettre aux normes, les isoler et réduire la facture énergétique ».
Et Hélène Schwoerer, Directrice générale adjointe Paris Habitat, de compléter :
« Nous travaillons à 99% du temps à Paris intra-muros, avec un patrimoine de 125 000 logements dont 95% sont situés dans Paris. Pour ces 125 000 logements : nous avons une spécificité par rapport aux bailleurs sociaux classiques c’est que nous avons un patrimoine très ancien et 34% de nos logements ont été construits avant 1948 donc globalement notre patrimoine a une moyenne de 74 ans d’âge. Ces dernières années, nous avons engagé des opérations importantes d’amélioration thermique à travers le Plan Climat Energie de la ville de Paris pour atteindre 50 kWh maximum quand nous construisons du neuf et 80 kWh quand nous réhabilitons ».
Par Véronique Pillot, Directrice des études et directrice commerciale, GTM Bâtiment (filiale de Vinci Construction France) et Hélène Schwoerer, Directrice Générale Adjointe de PARIS HABITAT en charge de la maîtrise d’ouvrage construction neuve, réhabilitation et développement.
Sources et liens