Par Bernard REINTEAU, journaliste spécialisé le 29 Octobre 2023
Alors que la crise du logement et de la construction de logements fait rage, les dernières données de l’INSEE sur le parc français livre une photographie des quarante dernières années instructives.
En 1983, la France métropolitaine comptait une population d’environ 55 millions d’habitants logés dans 19,8 millions de résidences principales - 20 millions en France et DROM et collectivités d’outre-mer ; en 2023, on dénombre un total de 68 millions d’habitants - 65 millions en métropole – et 31 millions de résidences principales - 30,24 millions en métropole. A noter qu’il y en avait 16,8 millions en 1960. Autre point de comparaison : le nombre de voitures particulières a pratiquement triplé au cours des 40 dernières années (11,2 millions en 1980, 32,6 millions en 2020).
Ces données livrées par l’INSEE ce mois d’Octobre intéresseront forcément les acteurs de l’aménagement et de la construction. Qu’elles en sont les principales informations ?
Une progression … en baisse
La chose est bien connue des spécialistes de la construction et les chiffres le confirment : le parc augmente annuellement d’environ 1,1% par an depuis 40 ans. Cependant, si cet élan général s’est maintenu jusqu’en 2018, tendanciellement, une baisse s’est amorcée depuis 2007 - à la suite de la crise bancaire de 2008 qui a globalement entraîné des répercussions pendant une décennie. La progression sur les cinq dernières années (2018-2023) est en moyenne de 0,9%. La progression des résidences principales est même plus faible depuis 2012 : 0,8% en France métropolitaine.
Les chiffres enregistrés ces derniers trimestres devraient certainement encore dégrader cet état des lieux.
L’INSEE développe aussi ses commentaires à propos de la vacance, en augmentation sensible depuis 2007. Elle fournit plusieurs explications à ce phénomène : une inadéquation entre l’offre de location ou de vente et la demande, le mauvais état du bâti ou une mise en attente pour le réhabiliter, une attente de règlement de succession ou un délai après un départ en maison de retraite …
En quarante ans, le parc de logements a augmenté de 50%
Un statut d’occupation stabilisé
Autre flagrant signe des temps : le statut de propriétaire n’évolue quasiment plus depuis 15 à 20 ans et tend à baisser ; l’inverse se remarque chez les locataires. Par ailleurs, les accédants à la propriété se sont maintenus à la faveur de l’allongement des durées d’emprunts depuis une vingtaine d’années.
Les coups de boutoir de la rareté du crédit et du renchérissement de la construction devraient, là encore, venir amplifier le phénomène de recul au cours des prochaines années. Même constat au sujet des bailleurs privés à la lumière des informations récentes : la réduction des possibilités d’investissements va peut-être casser cette tendance stable, légèrement haussière.
Les parts entre propriétaires et locataires vont-elles se rapprocher à moyen terme ?
L’attrait des grandes agglomérations hors région parisienne
L’INSEE se penche aussi sur l’évolution de la production de logement selon la taille de l’unité urbaine. Le statisticien relève que la part des résidences principales dans les agglomérations de moins de 100 000 habitants a sensiblement évolué ces dernières décennies, passant de 29,7% en 1983 à 32,2% en 2023. C’est tout aussi net dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants : 29,3% en 1983, 31,8% en 2023. On reconnaît à travers ces chiffres l’augmentation de la population dans les villes de Marseille, Lyon, Bordeaux ou Strasbourg, …
L’INSEE remarque aussi à travers ses enquêtes le développement des résidences secondaires et des logements occasionnels en milieu urbain - 31,6% en 1983, 39,9% en 2023, alors que dans le même temps les résidences secondaires « hors unités urbaines » chutent fortement - 51,8% en 1983, 37,1% en 2023. L’impact des sites de location bien connus est ici bien lisible.
Pour ce qui concerne la vacance des logements, l’INSEE indique qu’elle se situe essentiellement, à 58,7%, dans les agglomérations de moins de 100 000 habitants et hors unité urbaine. Surtout, ce phénomène est globalement à la baisse hors unité urbaine (29,9% en 1983, 23,9% en 2023), en région parisienne (16,3% en 1983, 13,3% en 2023), mais augmente dans les agglomérations de moins de 100 000 habitants (8,9% en 1983, 34,8% en 2023).
Les communes hors unité urbaines et les agglomérations de moins de 100 000 habitants concentrent la majorité des logements vacants
L’éclairage annuel apporté par cette enquête devrait contribuer à alimenter les réflexions des acteurs de la construction, notamment pour ce qui concerne la rénovation urbaine et la rénovation énergétique.
À propos de l'auteur
Bernard Reinteau
Journaliste de la presse bâtiment depuis la fin des années 80, Bernard Reinteau est journaliste indépendant. Il a œuvré pour les principaux titres de la filière et se spécialise particulièrement sur les solutions techniques liées à la performance énergétique et environnementale des constructions et rénovations performantes. Il collabore principalement avec les plus grands titres et en particulier avec Xpair.