Le bâtiment, acteur majeur de la transformation

Par Dominique BIDOU, président d'honneur de l'Alliance HQE-GBC France le 19 Février 2020


Transformation, au sens du rugby. Un premier succès, l’essai, n’est pas complet sans transformation. Le développement durable a marqué un essai, en sensibilisant aux dangers d’une fuite en avant, mais il peine à le transformer, à mobiliser pour le changement.


Transformation environnement

Pour mobiliser pour le changement, le développement durable doit faire plus que de marquer un essai. 


Le développement durable a été mal « vendu »

Le premier acte a connu un réel succès, l’alerte face à la dégradation de l’environnement, victime du « progrès ». Un tel succès qu’il occupe encore tout l’espace et empêche le second acte de commencer, celui d’une réaction à l’alerte, de la recherche d’un autre « progrès », d’un développement « durable ». Ajoutons que l’alerte est souvent associée au sentiment d’une faute collective, ce qui lui donne une note moralisatrice, avec son cortège de « donneurs de leçons ». La réaction devrait donc être réparatrice, avec une dimension morale, et l’appel implicite à la pénitence, à la privation. Pas très mobilisateur… La transformation piétine. Le discours du premier acte ne fonctionne pas pour le second, il l’étouffe. Il en faut un autre, adapté à ce besoin d’entraîner le plus grand nombre sur la voie du développement durable.

L’idée d’une recherche, joyeuse, curieuse et sans préjugés, d’un avenir différent de ce que serait le simple prolongement du passé, est engluée dans la vision moralisatrice. Elle peine à émerger, malgré de nombreuses initiatives, qui restent partielles et souvent anecdotiques.  Démoralisons le développement durable, pour le libérer du poids du passé et ouvrir une nouvelle époque.

Le développement durable progresse malgré toutes ces difficultés

La peur de l’avenir pour les uns, le déni des dangers pour d’autres, le conservatisme et la défense des situations dominantes. De nombreuses initiatives en attestent, mais il faut pour cela accepter de changer notre regard sur le monde, changer de mode de penser. Ajoutons, comme il ne peut s’agir que d’une recherche collective, le besoin de faire partager l’aventure humaine que représente cette mutation. Il faut donc donner envie du développement durable, le rendre attractif pour mobiliser le maximum de nos concitoyens, et mettre leur esprit d’entreprise au service de cette recherche.

La transformation exige donc un nouveau discours

Nouveau discours où la menace de catastrophes serait confinée à un fond de décor, et non au rôle-titre. L’alerte laisse la place à l’opérationnel, aux solutions comme on a pu voir en marge de la COP 21, avec l’agenda des solutions. L’heure est aux initiatives, aux success stories, avec le souci de fournir de la crédibilité aux initiatives de renouveau. C’est une « grande transformation » selon le titre du dernier rapport du Comité 21[1].

Le secteur du bâtiment a un rôle important à jouer dans cette transformation. Peut-on offrir un habitat (ou les lieux de travail) sain, agréable, convivial, tout en faisant du bien à la planète, et sans dépenser plus d’argent ? Le beurre et l’argent du beurre, en quelque sorte. De nombreux professionnels l’affirment. Le bâtiment autrefois consommateur d’énergie, d’espace, de matériaux, d’un côté, et émetteur de gaz à effet de serre, de déchets, d’eaux usées, pourrait devenir un secteur positif dans tous les sens du terme, pour l’énergie, la biodiversité, le paysage, les ressources naturelles. C’est bien sûr un défi, mais il est à la portée de professions qui ont beaucoup changé ces dernières années, et qui n’ont pas terminé leur transformation.

Une nouvelle culture s’installe progressivement, et touche à la fois la manière de travailler et les avancées technologiques, matériaux, équipements, et bien sûr informatiques, aux multiples conséquences. Deux remarques, toutefois, pour tempérer ce tableau.

C’est dès la genèse du projet qu’il faut changer de comportement

Le travail collectif doit être très précoce, et notamment la collaboration entre le maître d’ouvrage et les professions qui vont concevoir, construire et exploiter le bâtiment. Cet effort qui exige que des moyens humains et financiers soient déployés au tout début d’une opération, avant même d’avoir l’assurance qu’elle se réalisera, est une source d’économie et d’efficacité technique. Bien calibrer un projet, avoir une vision claire de la manière dont ses occupants vont y vivre ou y travailler, l’inscrire dans un territoire avec son histoire et sa géographie, tout ce travail préliminaire est hautement rentable à tous égards.

Et puis il y a le poids du parc existant

Les techniques et les modes d’intervention habituels sur le neuf s’adaptent mal au besoin de reprendre un bâtiment pour l’améliorer sans négliger pour autant son passé, les techniques utilisées pour le construire, les ajouts apportés au fil des années, l’évolution de son environnement et des aspirations des occupants. C’est à chaque fois du sur-mesure, qui ne s’inscrit pas dans une approche dite « industrielle ». Sans avancées méthodologiques sur la rénovation, les ambitions de modernisation du parc ancien seront toujours déçues. Un investissement de toutes les professions est nécessaire sur ce point.

L’alerte et le passage à l’action ne font pas appel aux mêmes qualités

Ce ne sont pas les mêmes acteurs qui peuvent un jour crier gare, et le lendemain appeler à prendre le risque d’explorer des futurs inédits. A défaut de se transformer lui-même, le « lanceur d’alerte » doit laisser la place à l’entrepreneur. Le secteur du bâtiment a toutes les qualités pour jouer un rôle moteur dans cette transformation.


[1]   La grande transformation, freins, leviers et moteurs

la-grande-transformation



Commentaires

Aucun commentaire actuellement, soyez le premier à participer !

LAISSER UN COMMENTAIRE

ABONNEZ-VOUS !
En validant ce formulaire, vous acceptez que les informations saisies soient transmises à l’entreprise concernée dans le strict respect de la réglementation RGPD sur les données personnelles. Pour connaitre et exercer vos droits, vous pouvez consulter notre politique de confidentialité
Reférencement gratuit

Référencez gratuitement votre société dans l'annuaire

Suggestions

Agitation sociale et agricole, finances publiques en berne ? La transition attendra

Agitation sociale et agricole, finances publiques en berne ? La transition attendra

Agitation sociale et défis agricoles : Comment la transition écologique peut apaiser les tensions.


3 000 milliardaires sur la planète ! Alors 2024, année banale ou charnière ?

3 000 milliardaires sur la planète ! Alors 2024, année banale ou charnière ?

Les 3 000 milliardaires mondiaux en 2024 : Une élite financière en constante évolution, une année charnière.


Trophées Start-up « bâtiment 2050 » à EnerJ-meeting Paris : et les gagnants sont …

Trophées Start-up « bâtiment 2050 » à EnerJ-meeting Paris : et les gagnants sont …

Découvrez la liste des lauréats des Trophées Start-up Bâtiments 2050 à EnerJ-meeting Paris 2024.


Forum Mondial Bâtiments et Climat : agir pour le climat, la résilience, la prospérité et le bien-être

Forum Mondial Bâtiments et Climat : agir pour le climat, la résilience, la prospérité et le bien-être

Des discussions sur des solutions durables pour des bâtiments plus résilients et adaptés au climat.


Health Cube - le nouveau centre de santé innovant de Wilo

Health Cube - le nouveau centre de santé innovant de Wilo

Découvrez le Health Cube de Wilo, un centre de santé innovant qui réinvente le bien-être pour les employés du groupe à travers le monde.


RE:3 pour une réduction durable du carbone incorporé

RE:3 pour une réduction durable du carbone incorporé

Comment optimiser les pratiques pour contribuer à un avenir plus respectueux de l'environnement tout en maintenant la performance et la durabilité ?


CAP sur la prochaine COP - La COP 28 sera-t-elle un nouveau bide ?

CAP sur la prochaine COP - La COP 28 sera-t-elle un nouveau bide ?

En 2015, les accords de Paris avaient l’objectif du +1,5° de réchauffement moyen maximal en 2100 afin que la planète reste vivable pour la grande majorité de l’Humanité.


Développement durable : le piéton, roi de la rue

Développement durable : le piéton, roi de la rue

Le constat souvent établi, le piéton est l’oublié des politiques d’aménagement, qui lui s'adapte aisément aux circonstances.


Développement durable : faire sa part comme le colibri

Développement durable : faire sa part comme le colibri

Découvrons l'histoire relative aux milieux de l'environnement et l'ouvrage d'Alain Maugard sur le bâtiment acteur majeur des changements sociétaux.


Un joli petit « chat » aussi émouvant qu’invasif

Un joli petit « chat » aussi émouvant qu’invasif

Prenons connaissance du développement d'un « robot » bluffant de la start-up Open AI pour que les acteurs du GAFAM se mettent à rivaliser sur leurs propres avancées et projets.


Développement durable : l’imaginaire à l’encontre du sens de l’histoire

Développement durable : l’imaginaire à l’encontre du sens de l’histoire

Décourvrons les atouts pour l’environnement que représente la maison individuelle avec des grandes surfaces pour capter des énergies, ...


Développement durable - Des préjugés qui coûtent cher

Développement durable - Des préjugés qui coûtent cher

Les énergies renouvelables sont aujourd’hui prépondérantes en Europe, des progrès en tous genres sur leur efficacité et leur prix.


Cet article n’a pas été écrit par ChatGPT

Cet article n’a pas été écrit par ChatGPT

Suivons l'évolution de l'AI qui prospère rapidement et qui devient un outil de plus en plus puissant.


L’hydrogène bas carbone : préparer un avenir énergétique décarboné

L’hydrogène bas carbone : préparer un avenir énergétique décarboné

A découvrir avec le webinaire la matinée de l'IGEDD qui s'est tenue le 22 Mai 2023 sur la question : L'hydrogène, nouveau vecteur de la transition énergétique ?


Aménager les territoires du bien-être

Aménager les territoires du bien-être

Prenons connaissance de l'ouvrage de Jean-Pierre Thibault sur l'aménagement des territoires du bien-être.