Par Dominique BIDOU, président d'honneur de l'Alliance HQE-GBC France le 03 Mai 2024
Vous connaissez la célèbre exhortation : « penser global, agir local ». Une logique imparable, en ces temps où les enjeux planétaires s’imposent, mais bien difficile à mettre en pratique. La planète et la vie quotidienne, quoi de commun, comment établir un lien, bien que nous sachions que c'est l'addition de tous les choix particuliers, de toutes les décisions locales si modestes soient-elles, qui compromettent les grands équilibres de la planète.
L’écart entre le global et le local
L'écart entre le global et le local est tel que beaucoup préfèrent la fuite, et n'acceptent pas de modifier leur comportement pour le mettre en cohérence avec les enjeux globaux. Il est arrivé cependant que le lien soit facile à comprendre et qu’il soit facile de mettre ses choix en cohérence avec les intérêts globaux. Rappelez-vous les bombes aérosols néfastes pour la couche d'ozone. Dès que le message a été clair, que l'étiquetage des produits l’ait rendu évident et que des produits de substitution étaient proposés dans le commerce, les consommateurs ont fait localement le choix favorable au global. Il s’agissait de décisions individuelles, comment faire pour des décisions prises au nom d’une collectivité, au sein de laquelle les intérêts et les envies ne sont pas homogènes ?
Nous pouvons être convaincus de la nécessité d’agir pour la planète, mais comment atterrir, comment traduire cette préoccupation dans les projets territoriaux ?
A court terme, il y a le besoin de s’adapter à la nouvelle donne climatique
Nouvelles réglementations, aides techniques et financières à intégrer à des exigences renforcées. C’est le cas pour les bâtiments avec la NRE (Nouvelle Règlementation Environnementale) et voilà que la Fédération Nationale des Travaux Publics (FNTP) crée une plateforme numérique intitulée InfraClimat [1] pour visualiser l’impact du changement climatique sur les infrastructures.
InfraClimat analyse l'exposition d'une infrastructure route, pont, équipements d’assainissement, etc … à cinq aléas climatiques : submersions marines, vagues de chaleur, inondations et précipitations extrêmes, sécheresse et retrait-gonflement des sols argileux (RGA). Un outil à la fois pour s’adapter dans l’immédiat et pour concevoir des projets intégrant le nouveau contexte climatique.
Constructions et infrastructures, il s’agit toujours d’ouvrages, avec une maîtrise bien identifiée et des études préalables conséquentes. Il en est autrement avec les projets d’aménagement et de développement économique. Comment les élaborer de manière qu’ils concourent à l’amélioration de l’environnement local et planétaire, au-delà de la simple nécessité d’assurer leur pérennité ?
La Fédération Nationale des Agences d'Urbanisme (FNAU) s’est attelée au sujet dans son domaine l'aménagement, et publie un ouvrage sur « une nouvelle boussole pour l’habitabilité de la terre [2] ». La planète a des limites, comment en tenir compte dans les projets d'urbanisme ? La diversité des situations rend impossible l'élaboration d'une méthode harmonisée, il faut plutôt amener les acteurs locaux à « s’approprier pleinement le concept de limites » de la planète. Des limites tenant compte à la fois du « plafond environnemental » et d’un « socle social » défini à partir des objectifs de développement durable de l'ONU. Ce sont 8 limites biogéochimiques qui ont été mises en évidence par les scientifiques qui permettent d'assurer un « espace sûr pour l'humanité », de préserver l'habitabilité de la terre : climat, intégrité fonctionnelle de la biosphère, surface d'écosystèmes naturels, eaux de surface, eaux souterraines, cycles de l’azote, cycle du phosphore, aérosols.
8 limites à intégrer localement : « C’est à l'échelle locale que se prend la plupart des décisions qui impactent les variables de contrôle des différentes limites planétaires ».
[2] Les limites planétaires, une nouvelle boussole pour l'habitabilité de la terre - Points FNAU - Gallimard Alternatives
À propos de l'auteur
Dominique Bidou
Ingénieur et démographe de formation, Dominique Bidou a été directeur au ministère de l’Environnement et est Président d’Honneur de l’association HQE (désormais Alliance HQE – GBC). Il est consultant en Développement Durable, a écrit de nombreux ouvrages tels que « Le développement durable, une affaire d’entrepreneurs », anime son blog...