Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
20 Avril 2009
Les bâtiments à énergie positive sont, pour beaucoup de spécialistes, l'avenir de la construction, puisqu'il s'agit de bâtiments qui produisent plus d'énergie qu'ils n'en consomment (énergies grises non comprises en général). Qu'y a-t-il derrière ce concept. N'est-il pas bercé de beaucoup d'illusions. Et n'est-ce pas une solution fallacieuse ?
Est-ce une solution vraiment viable ?
Je vais d'abord prendre pour exemple le pays européen qui est probablement le plus avancé sur le sujet, du moins dans les intentions. Il s'agit de la Grande Bretagne où le gouvernement a décidé qu'à partir de 2016 tous les bâtiments résidentiels seraient " zéro carbone ", les autres bâtiments devant suivre à partir de 2019. Il est vrai que le qualificatif " zéro carbone " n'était pas défini lorsque la décision a été prise, une définition qui est actuellement en cours de discussion. Il n'en reste pas moins qu'il reste, au moins en France et pour le moment, un certain nombre d'incertitudes. Et je ne suis pas sûr que cette décision miracle soit vraiment la bonne.
Quels sont donc vos reproches ?
Avant de passer aux reproches examinons ce qu'il y a derrière le terme " énergie positive ". Quand j'ai essayé d'approfondir le sujet je me suis souvent trouvé en face d'interlocuteurs qui faisaient, hélas, bien des confusions, deux en particulier. La première de ces confusions était, sans le dire, de ne prendre en compte que le chauffage, considéré comme le consommateur essentiel. Certes, dans l'existant (résidentiel et tertiaire, climatisation comprise), le chauffage représente environ 65 % des consommations d'énergie (10 % pour l'eau chaude, 25 % - surtout électrique - pour les autres usages). Mais si l'on parvient à bien isoler les bâtiments (division par cinq), le chauffage ne représentera plus que le quart des consommations : tout baser sur le chauffage est donc une première erreur. Mais ce n'est pas tout.
Quelle est donc la deuxième erreur ?
Celle de calculer les consommations de chauffage au travers d'une méthode inexacte, beaucoup plus répandue dans les démarches officielles qu'on ne le pense, par exemple dans la réglementation britannique (code L). Elle consiste à calculer d'abord ce que j'appelle les besoins bruts (sans apports), calculés à partir de l'isolation du bâtiment et des degrés-jours (non corrigés), ainsi que des rendements. Pour obtenir les consommations, ce que j'appelle les besoins nets, dans les règles simplistes, on soustrait tout simplement les apports des besoins bruts. Quand on examine les phénomènes heure par heure (en simulation correcte) on s'aperçoit que cette démarche revient à utiliser les apports de façon exagérée, les surchauffes étant prises comme des apports positifs. En fait plus le poids des apports est élevé plus le rendement (utile) de récupération des apports est faible. Dès que le poids des apports (apports divisés par besoins bruts) dépasse environ 50 % le rendement de récupération utile de ces apports diminue très vite. Diviser, aujourd'hui, les pertes des bâtiments par 5, ne conduit pas à diviser les besoins nets par 5, mais par bien moins de 4. Attention, donc, aux méthodes de prévisions fallacieuses, et pourtant fort répandues.
La définition correcte des bâtiments énergétiquement positifs ne se limite pas au chauffage?
C'est tout à fait exact, mais les confusions que je signale sont celles que j'ai constatées. Si nous examinons les autres usages, qu'il s'agisse d'eau chaude (avec le solaire) ou d'autres usages électriques, là aussi des économies sont possibles. Mais alors, quand on examine ce qui est réalisable dans les quinze années à venir on aboutit à des consommations dont la structure n'a plus rien à voir avec la structure actuelle : il faut donc se méfier des raisonnements trop schématiques.
Le développement des énergies positives ne se limite pas aux réductions des consommations ?
Dans les présentations valables sur le sujet, les bâtiments à énergie positive sont essentiellement caractérisés par des productions locales utilisant des énergies renouvelables : micro-cogénération à base de chaudières utilisant la biomasse, éoliennes locales, photovoltaïque. Tout ceci pose la question suivante qu'on semble ne pas vouloir aborder : la production localisée est-elle supérieure à la production centralisée. J'en doute très fortement. Il suffit de voir, en France, le tarif ahurissant de rachat du courant électrique issu des cellules photovoltaïques. Ou, en Allemagne, le tarif également ahurissant de rachat du courant électrique issu de la micro-cogénération.
Voulez-vous dire par là que ces tarifs sont tout à fait anormaux ?
Absolument, et nous verrons pourquoi la semaine prochaine.
Roger CADIERGUES