Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
2 Juin 2009
Le succès des pompes à chaleur, dans les médias aussi bien que dans la réalité, nous conduit à tenter de faire le point sur ces " nouveaux " générateurs. Nous essaierons de le faire indépendamment de toutes les excitations actuelles, souvent plus dangereuses qu'utiles par leur enthousiasme parfois assez béat.
Cela veut-il dire que vous pensez que le succès actuel des pompes à chaleur est éphémère?
Absolument pas, mais encore faut-il ne pas tout mélanger. La pompe à chaleur n'est pas une technique nouvelle : elle a nettement plus d'un siècle d'âge, mais elle a beaucoup évolué ces dernières décennies. Pourquoi et comment, telles sont les questions à se poser. Partons de 1950 : à cette époque les industriels suisses avaient la réputation d'avoir ouvert le marché des pompes à chaleur. En fait leur rôle avait surtout été de réaliser quelques installations importantes durant la guerre. En réalité la première référence suisse (celle d'Escher-Wyss) était plus ancienne : la pompe à chaleur réalisée aux Etablissements Jambon, à Paris, en 1936, une pompe à chaleur qui fonctionnait encore très correctement en 1950-1960. Que s'est-il passé ensuite, c'est ce que nous allons tenter de voir, car cette période a une grande importance.
Peut-on en avoir un premier résumé ?
Il se trouve qu'en 1951 j'ai proposé à la Société Française des Electriciens une conférence sur le chauffage électrique. Cela m'a valu une visite fort aimable d'un cadre d'Electricité de France qui souhaitait éviter (à cette période) toute publicité sur le chauffage électrique. Je n'ai pas eu, en réalité, à modifier ma communication car l'essentiel portait sur la pompe à chaleur. C'est quelques années plus tard, d'ailleurs, que fut réalisée la pompe à chaleur de la Maison de la Radio, proposée par André Missenard (conseil de l'Administration). Une opération encore marquée par les connaissances et habitudes des frigoristes classiques. Ce n'est qu'ensuite que nous allions aborder les nouveaux développements, car l'essentiel restait encore à venir.
Que fut donc, finalement, cet essentiel dont vous parlez ?
Très clairement cet essentiel est le développement progressif et prodigieux des compresseurs frigorifiques vendus sur catalogue. Avec, à l'arrière plan de multiples études d'optimisation économique, renforcées plus tard par la crise de l'énergie des années 1970. On connaît mal, aujourd'hui, cette période qui fut pourtant fondamentale, avec par exemple de grands efforts venant d'URSS, de Pologne ou d'Allemagne de l'Est. C'est que la pompe à chaleur telle qu'on la conçoit maintenant - en réalité les compresseurs frigorifiques - exigent des études et mises au point relativement lourdes, dont le but final est d'optimiser les performances. A un point tel, aujourd'hui, que les résultats des essais ne sont pas toujours bien indicatifs des performances annuelles.
Voulez-vous dire que les marques de qualité ne valent rien ?
Absolument pas : ce que je veux dire c'est que les performances réelles et moyennes d'une pompe à chaleur dépendent beaucoup de la qualité du concepteur
. Et non pas des efforts de l'industriel impliqué, quelles que soient par ailleurs les qualités de ce dernier. Et, à un certain degré, quelles que soient les performances annoncées.Que voulez-vous dire par là ?
Que la conception d'une bonne machine exige l'intégration de trois exigences
qu'il faut bien maîtriser, et ce pas seulement dans des conditions types
mais tout au cours de l'année. Il faut :
- une très bonne compétence en thermodynamique,
- une très bonne compétence en construction mécanique,
- une bonne habitude des calculs économiques actualisés,
ici complexes.
En fait on croit que tout est simple, ce n'est malheureusement pas exact. Prenons
l'exemple de l'aspect thermodynamique seul, il faut prendre en compte,
à la fois :
- l'efficacité du compresseur,
- puis celle du condenseur,
- puis celle du détendeur,
- puis celle de l'évaporateur, les performances de ces quatre composants étant loin d'être indépendantes
les unes des autres. C'est donc une optimisation complexe d'un ensemble de composants
qu'il faut mettre en jeu. Et ce n'est pas simple, ni facile.
Il faudra que nous y revenions la semaine prochaine, car c'est une base
essentielle des progrès actuels.
Roger CADIERGUES