Par Edouard PLATTARD – Master I – Droit de l'Immobilier - Faculté de Droit Jean Moulin – Lyon 3.
Avec la création de  la RT 2012 fixant un niveau de consommation maximum pour les bâtiments,  et de plus instituant des  contrôles de respect de la performance  énergétique ainsi que des obligations de moyens et de résultat pour les  constructeurs, le législateur est finalement intervenu.
  
Ce sont les articles  L 111-9 et L 111-10 du Code de la Construction et de l'Habitation modifié en  juillet 2010, qui viendront fixer les valeurs de performances énergétiques  devant dorénavant être obligatoirement respectées pour toutes les constructions  neuves. Ces nouvelles règles auront un impact important sur les outils  juridiques en droit de la construction, ainsi que sur les régimes de  responsabilités, cette fois-ci prévus, de ses acteurs.
Cette  chronique résulte d'un extrait de l'étude « PERFORMANCES ENERGETIQUES ET  GARANTIES LEGALES » et complète la chronique « Performance  énergétique et garanties légales : droit et labellisation ». 
1°) Réglementation 2012 et obligation de performance

La RT 2012 est avant tout  apparue comme une évidence pour le législateur. Entre coût de  l'énergie ayant explosé, pouvant conduire a  une nouvelle situation dite de « précarité   énergétique », et nécessité de consommer moins, amenée par une prise de  conscience  collective, la nécessité de  limiter la consommation des bâtiments (poste de consommation énergétique très  important) est bien présente.  Cette  nouvelle réglementation, aussi nécessaire que restrictive, va conduire à  la  création de nouveaux outils de contrôle  de la performance parmi lesquels figure le « certificat de performance  énergétique ». 
2°/ La nécessité de consommer moins

La nécessité de consommer moins n'est plus liée à une simple  question d'idéologie, mais conduit bien par conséquent à un changement de  mentalité dans sa globalité. 
  
  La diminution des consommations d'énergies par les bâtiments  a résulté d'une prise de conscience écologique collective, mais également de  l'apparition d'une nouvelle situation dite de précarité énergétique. 
  
  Une prise de conscience collective : la ratification du  protocole de Kyoto visant à limiter les émissions de gaz à effet de serre a  été  un des tous premiers engagements  écologiques marquant un véritable tournant pour les  pays du monde entier, une nécessité de prise  en compte de la planète.  La sauvegarde  de la planète est depuis devenue une évidence pour tous.  Cette volonté écologique s'est notamment  traduite en France par la notion de performance   énergétique des bâtiments, depuis la RT 77 à celle de 2012, prenant en  compte les spécificités  climatiques de  différentes zones climatiques françaises. Le Législateur Français a choisi de  reprendre le découpage géographique réalisé par « Effinergie », imposant un  coefficient d'adaptation de l'exigence thermique par zones françaises  climatiques.  Cette « prise de conscience  collective » des citoyens comme du législateur a précisément  amené a faire évoluer la nécessité d'efforts  dans la consommation, pour conduire à l'édiction  de cette RT 2012.  En parallèle de ce critère, une nouvelle  situation dite de précarité énergétique a également  conduit à devoir modifier la législation en  vigueur. 
  
  La précarité  énergétique : la diminution des consommations d'énergie sera également une  nécessité dans certains cas.  En effet le  texte de loi dit Grenelle 2 a repris le concept anglo-saxon de « Fuel Poverty  »,  marquant la situation de tout ménager  devant dépenser plus de 10% de son revenu disponible  au paiement de ses factures d'énergie. On  considère actuellement en France que « trois millions et demi de ménages sont  en  situation de précarité énergétique,  et un français sur dix dit avoir eu froid en janvier 2011 »,  ses installations ne pouvant répondre à ses  besoins ou plus grave, son budget ne le lui permettant pas. Le texte de loi  français définit cette situation comme celle de « personne qui éprouve dans son  logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d'énergie  nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires, en raison de  l'inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d'habitat ». 
  
Les coûts de l'énergie ayant connu depuis une dizaine  d'année une flambée, plus que la simple conscience écologique, la RT 2012 a  également tiré son inspiration d'une nécessité de pouvoir consommer moins  simplement pour pouvoir vivre dans son logement décemment, en raison des  ressources de chacun.  Cette nouvelle  réglementation a suivi  un changement des  mentalités global, d'inspiration européenne et d'application française.  
3°/ Un surcoût de construction. Un investissement avec des économies d'énergie

Contrairement à la performance incitée, certifiée par des  labels de performance énergétique, le respect de la norme énergétique n'aura  aucune incitation fiscale, étant d'ordre public, elle  devra être respectée.  
  
  Le surcoût lié à la conception et à la réalisation d'un  bâtiment dit BBC est estimé par les   professionnels de l'ordre de 10% supérieur à celui d'un bâtiment  conventionnel, respectant la RT 2005. La réglementation thermique de 2012  imposant le même référentiel de consommation, le surcoût sera identique. Il  paraîtra illogique et peu équitable au regard de l'augmentation des coûts de  construction et de l'acquisition foncière de devoir imposer un tel surcoût sans  contre partie, sauf à vouloir diminuer encore plus la possibilité pour chacun  de devenir propriétaire de son logement, c'est pourquoi la construction d'un  bâtiment consommant moins d'énergie devra être vu comme un investissement.
  
Le coût d'achat sera plus élevé une fois la RT 2012  applicable. Cependant, la diminution des consommations d'énergie permettra de  dépenser moins d'argent sur ce poste de dépense.  Le surcoût d'achat sera comblé par les  économies d'énergie réalisées.  Cette  notion d'investissement marque une fois de plus la nécessité d'obtenir des  économies d'énergie réelles et non plus uniquement théoriques, comme cela  pouvait être le cas avec  certains labels  de performance énergétique.  Cette  obligation de faire réaliser des économies d'énergie à l'utilisateur du bien ne  repose pas  uniquement sur le  constructeur, l'architecte ou les bureaux d'étude thermique, mais  également  sur les fournisseurs d'énergie  grâce au certificat d'économie d'énergie.  
4°/ Un mot sur le Certificat d'Economie d'Energie
Le certificat d'économie d'énergie est un nouvel outil, lancé par le grenelle de l'environnement dans le cadre de la RT 2012, permettant aux fournisseurs d'énergie de garantir des économies. Le système français des certificats d'économies d'énergie permet de valider les économies d'énergies résultant d'actions additionnelles vis-à-vis, d'une part, de la réglementation déjà en vigueur, et d'autre part, de l'activité habituelle. La mesure restant comparable à celle présente dans les systèmes étrangers, elle oblige les distributeurs d'énergie à conclure des contrats d'économie d'énergie. Les personnes n'ayant pas obtenu les certificats nécessaires pour respecter la loi à la fin d'une période fixée par l'Etat devront régler une pénalité à l'Etat. Grâce aux CEE, le consommateur va pouvoir réaliser des économies d'énergie sous l'impulsion du producteur ou distributeur d'énergie qui en dégagera un bénéfice et sans que cela emporte un coût à l'Etat.
5°/ Les impacts de la RT 2012 sur les acteurs de la construction
La nouvelle réglementation, contrairement aux labels de performance énergétique, se basera sur des économies d'énergie réelles, et non plus uniquement théoriques. Ces nouvelles exigences de consommation vont automatiquement conduire à des modifications quant aux obligations pesant sur ses acteurs, et aux sanctions les accompagnant, démontrant bien la volonté du législateur d'avoir une consommation réelle limitée. La performance conventionnelle basée sur la liberté contractuelle, laissant à la libre appréciation des juges les sanctions applicables à ce défaut d'économie d'énergie, va céder sa place à un système légal clairement défini, où constructeur et maître d'œuvre pourront voir leur responsabilité engagée en cas d'irrespect de leurs nouvelles obligations.
6°/ Les obligations de résultat
Les obligations de résultat auront un contenu défini par le  législateur, s'accompagnant de sanctions en cas d'irrespect.  
  La réglementation  thermique pour 2012 fixera aux constructeurs trois obligations de résultat : 
- la conception bioclimatique : la création du référentiel dit « Bbiomax » permettra de contrôler les consommations en termes de chauffage, de refroidissement et d'éclairage naturel, en fixant des valeurs maximales à ne pas dépasser. Ce coefficient prend en compte la compacité du bâtiment et les apports naturels
 
- la consommation conventionnelle calculée : reprenant le système des calculs réalisés dans le cadre de la labellisation des bâtiments BBC, elle ne tient malheureusement pas compte de l'utilisation de ce dernier et reste purement théorique
 
- la mesure de perméabilité à l'air : deux niveaux de perméabilité devant être respectés sont fixés : 1 m³/m²/h pour les logements collectifs, et 0,6 m³/m²/h pour les maisons individuelles.
 
La détermination de ces obligations de résultat obligera le constructeur à respecter ces valeurs, quelles que soient les techniques de constructions engagées. Ce dernier ne pourra s'exonérer qu'en démontrant la présence d'une cause étrangère, sous peine d'être sanctionné.
  
Les sanctions
Les obligations étant de résultat, les sanctions pourront être les sanctions  civiles habituelles, mais aussi des sanctions pénales. En effet, la RT 2012 est  une norme technique, imposant des degrés de performance technique, devant être  respectée.  Le manquement à cette  obligation (portée par l'article L 111-9 Code de la Construction et de  Habitation (CCH)) est prévu à l'article L 152-2 CCH et est sanctionné par  l'interruption des travaux (article L 152-2 CCH), 45 000€ d'amende et 6 mois de  prison en cas de récidive (article L 152-4 CCH). 
Dans l'hypothèse où les  travaux continueraient, le maître d'ouvrage encourrait 3 mois de  prison et 45 000€ d'amende (article L 152-3  CCH).   Les sanctions prévues sont très  lourdes pour conduire une politique efficace et performante, le législateur  ayant par ailleurs prévu de soumettre les constructeurs à des obligations de  moyens.
7°/ Les obligations de moyens
Les obligations de moyens seront moins contraignantes pour  les constructeurs, mais également moins importantes en termes de politique environnementale,  sans toutefois oublier de prévoir des sanctions en cas d'irrespect.
  Pour la première fois, le traitement des ponts thermiques,  l'obligation de recours aux énergies renouvelables, et la sensibilisation de  l'occupant à l'impact de leurs comportements sur la consommation énergétique,  sont mises en avant dans la réglementation thermique. 
  
  Concernant le recours aux énergies renouvelables, elles  deviennent obligatoires pour les maisons individuelles concernant l'eau chaude  sanitaire à hauteur de 2m² de production minimale, ou assurer la production  d'au moins 5 kWh/m²/an.  
  Concernant la sensibilisation, le comptage des énergies  consommées et leur suivi doivent être rendus possible par la mise en place d'un  système le permettant. Le constructeur devra obligatoirement intégrer ce type  de dispositif indiquant les consommations d'énergie par type de poste de  dépense, pour pouvoir livrer le bien.  
  
  Les ponts thermiques, quant à eux, ne pourront pas être  supérieurs à 0,28 W/(m²SHON.K) en  terme  de transmission thermique moyen, ni à 0,6 W/(ml.K) concernant le  coefficient de transmission thermique  linéique moyen des liaisons entre les planchers intermédiaires et les murs  extérieurs.  
  
  Ces obligations de moyens ont été mises en place pour  garantir le respect et le contrôle de celles de résultat ; la responsabilité du  constructeur ne pourra être engagée que si une faute de sa part en relation  avec le dommage est démontrée.  Dans  cette hypothèse, des sanctions pourront lui être appliquées.
  
Les sanctions
Nous l'avons dit, ces obligations ne sont que de moyens, le législateur n'ayant  d'ailleurs pas prévu de sanctions spécifiques. Leur irrespect conduira à des  sanctions civiles de droit commun tel que des dommages et intérêts.  Pour ce faire, la (prétendue) victime devra  démontrer qu'une faute en relation avec ces obligations est présente et lui  causant un dommage direct. Le constructeur ne pourra alors s'exonérer qu'en  démontrant une cause étrangère.  La  nouvelle réglementation aura également des impacts très importants sur les  systèmes de responsabilité applicables actuellement aux constructeurs.
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 Responsabilité avant réception, responsabilité décennale, maitrise d'œuvre et contrôleurs, attestation de fin de chantier, performance contrôles après réception, ...
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« Performances Energétiques et Garanties légales »
Par Edouard PLATTARD  
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