Par Dominique BIDOU, président d'honneur de l'Alliance HQE-GBC France le 30 Novembre 2023
Le circuit court a la cote. Nous avons toujours plaisir à savoir que ce nous consommons est le fruit du travail d’une entreprise locale, voire de notre propre jardin ou de notre atelier. Les fluctuations des prix des biens de consommation renforcent cette préférence pour les produits locaux, sans parler du besoin de réduire le volume des transports, pour économiser l’énergie.
Bilan environnemental petite ou grande échelle
Ne nous emballons pas pour autant, la plupart des produits que nous utilisons ne peuvent venir d’une activité locale, et le bilan environnemental de produits fabriqués en masse sera souvent meilleur, transport compris, que ceux issus de petites séries, économies d’échelle obligent.
Il n’empêche que la production locale sera toujours appréciée, qu’elle rapproche le consommateur du producteur, qu’elle provoque et entretient un sentiment d’appartenance à une communauté, pour le meilleur ou pour le pire. Et il n’est pas interdit de penser que la production à petite échelle ne puisse progresser et devenir plus performante, notamment grâce aux retours des consommateurs. Pas ou peu de perte en ligne, sur les produits comme sur la circulation de l’information.
Autoconsommation collective
Une tendance se dégage aujourd’hui pour l’autoconsommation, ou l’autoproduction, comme vous voudrez. Bref, produire ce que vous consommez, ou consommer ce que vous produisez. Une autonomie toute relative, le plus souvent, car l’ajustement est difficile au niveau personnel. Ça fonctionne mieux quand on est plusieurs, il est alors question d’autoconsommation collective.
Le potager est en tête d’affiche. Il contribue au pouvoir d’achat, à la biodiversité, au plaisir du jardinage malgré les contraintes qu’il impose. Il provoque des échanges et stimule la vie sociale, en plus de ses bienfaits matériels. Il y a aussi les marchés, les AMAP (Association pour le Maintien de l'Agriculture Paysanne) et toutes sortes de circuits courts pour l’alimentation qui représente un tiers de notre « empreinte écologique », excusez du peu.
Et la question énergétique, l’autonomie énergétique ?
Petit à petit, la question de l’énergie émerge dans l’univers de l’autoconsommation. Compte-tenu de son prix, des enjeux environnementaux, n’est-il pas plus sage de la maîtriser autant que possible ?
Le bois-énergie en est une illustration parfaite : une ressource locale, des emplois locaux du bucheronnage au ramonage, un bilan carbone en apparence neutre (en apparence seulement, du fait du décalage entre le moment de combustion du bois et celui où le carbone émis sera repris par la photosynthèse), l’autonomie est à portée de main. Il faut juste acheter dans le commerce des inserts ou des poêles performants, pour économiser la ressource.
La source d’énergie en vogue, c’est le soleil
L’autoconsommation y progresse vivement, près de 80% de hausse en un an, la hausse du prix de l’électricité aidant. 1 630 kW installés, ce n’est pas bien gros, l’équivalent d’un petit bout de réacteur nucléaire, mais ça monte vite. L’obligation faite aux grandes surfaces et à tous les propriétaires de grands toits, comme les entreprises de logistique, de s’équiper de panneaux solaires ne va pas manquer de booster ce secteur, au profit des entreprises plutôt que des particuliers.
Pour celles (y compris les collectivités publiques) qui ne veulent pas investir, il y a des opérateurs qui le font pour elles, les formules juridiques et financières sont au point ! En autoconsommation collective, citons le mouvement des centrales villageoises, 8 expériences lancées en 2010, 56 collectivités aujourd’hui, 10 MW installés. Une forme de mutualisation des toits, plus la participation des citoyens, des collectivités et des entreprises locales, une affaire qui marche.
Et l’éolien, une énergie autoconsommable ?
L’autoconsommation est plus compliquée pour l’éolien, du fait de contraintes cumulées. Pas d’éolienne à moins de 500 mètres des habitations, mais les consommateurs, membres de communautés d’énergie renouvelable, ne devaient pas être à plus de 2 Km les uns des autres. Pas facile, dans ces conditions, d’équilibrer production et consommation. Tout récemment (Arrêté du 19 Septembre et JO du 7 Octobre 2023) porte cette distance à 10 Km, et même 20 si tous les participants se situent exclusivement dans une ou plusieurs communes rurales. Espérons que cette ouverture suscitera des vocations. Sinon, il y a toujours la possibilité de prendre des participations dans le parc d’éoliennes citoyennes, mais ce n’est pas de l’autoconsommation à proprement parler. Il reste, pour les fanas de l’autoconsommation, l’éolienne perso, que vous pouvez monter chez vous sans rien demander à personne, si elle ne dépasse pas 12 m de haut. Mode d’emploi dans « construire une éolienne » de Tristan Urtizberea (Ulmer Editions).
L’autonomie énergétique n’est pas évidente, elle sera rarement totale, mais elle fait faire des économies, et a aussi le grand mérite d’amener les candidats à s’interroger sur leur consommation. L’autoconsommation, le début de la sagesse ?
À propos de l'auteur
Dominique Bidou
Ingénieur et démographe de formation, Dominique Bidou a été directeur au ministère de l’Environnement et est Président d’Honneur de l’association HQE (désormais Alliance HQE – GBC). Il est consultant en Développement Durable, a écrit de nombreux ouvrages tels que « Le développement durable, une affaire d’entrepreneurs », anime son blog...