Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
Dans ma dernière lettre je vous ai indiqué l'erreur la plus importante dans les calculs de consommation de chauffage lorsqu'il s'agit de faire intervenir les chaleurs gratuites, un rôle déjà mis en évidence (mais non chiffré) en Suisse il y a plus de 50 ans pour la mise au point de la méthode des degrés-jours. Pour essayer de chiffrer l'effet j'ai procédé à des simulations horaires nombreuses (sur plusieurs sites et pour plusieurs types de bâtiments), simulations mises en place avec René GILLES. Il m'a alors été possible de présenter les résultats sous une forme qui s'est finalement avérée extrêmement efficace.
De quelle forme voulez-vous parler ?
Pour synthétiser les observations résultant des simulations, après
différents tests, j'ai finalement proposé de représenter
les résultats de la manière suivante :
- en abscisse le poids des apports gratuits (rapport des "apports gratuits"
AG aux "besoins bruts" BB),
- en ordonnée le rapport entre les besoins nets (BN) et les besoins bruts
(BB).
Ce mode de représentation, qui s'est révélé progressivement
commode, est à la base des trois "surprises" dont je reparlerai,
les résultats se présentant comme l'indique le schéma suivant.
Dans ce schéma :
- les points en bleu et la courbe ajustée représentent les résultats
pour une structure relativement classique, meublée, facilement classée
dans les livres comme "assez inerte";
- les poins en rouge et la courbe ajustée représentent les résultats
pour une structure très légère, non meublée, d'inertie
classée traditionnellement comme très faible;
- la courbe en noir représente la courbe type d'une structure courante
en local moyennement meublé.
L'important à noter est que, pour les structures courantes, la courbe
est toujours très proche de la courbe bleue.
Quelles sont, finalement, les conclusions pratiques tirées de cette représentation ?
1. Tant que le poids des apports gratuits ne dépasse pas environ 0,5,
la règle de calcul "besoins nets = besoins bruts - apports gratuits"
est valable.
2. Dès que le poids des apports gratuits dépasse environ 0,5,
il faut adopter la formule : "besoins nets = besoins bruts - (rendement
de récupération x apports gratuits)".
Ce qui signifie tout simplement que le rendement de récupération
des apports gratuits, égal à 1 tant que le poids des apports gratuits
ne dépasse pas 0,5, est ensuite très décroisant au fur
et à mesure que le poids des apports gratuits augmente : c'est ce que
j'appelle "la loi du rendement décroissant".
Vous nous aviez promis "trois surprises", quelles sont-elles ?
Elles résultent directement du mode de représentation des besoins nets (les vrais besoins de chauffage) en fonction de très nombreux paramètres, à priori d'influences très variées. J'ai eu l'occasion de présenter ces résultats, pour la première fois le 4 Avril 1978, lors d'une conférence à l'Institut Technique du Bâtiment, sous le titre "Peut-on, oui ou non, prévoir les consommations de chauffage". La méthode proposée, basée sur les observations précédentes, a paru "incrédible" à beaucoup, tellement la procédure était simple et pouvait facilement être considérée comme une simplification excessive. Et pourtant ce n'était pas le cas.
Comment avez-vous pu confirmer ce résultat ?
Même pour moi, ces résultats étaient inattendus, car je
m'attendais à devoir tenir compte de nombreux paramètres : le
climat, l'inertie du bâtiment (tant revendiquée par certains),
etc. En fait, les conclusions très simples, étaient parfaitement
valables comme sont venues rapidement le confirmer deux études différentes
:
- d'abord une étude systématique à l'Université
de Berlin, au début sceptique et on le comprend,
- ensuite une étude CSTB qui, bien que basée sur une simulation
différente, aboutit à une adoption dans la réglementation
technique ultérieure.
Ces observations étant faites, nous en exploiterons plus complètement
les résultats dans ma prochaine lettre.
Roger CADIERGUES