Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
6 Juin 2011
Un bon nombre d’organisations françaises, nationales ou régionales ont consacré des réunions récentes à une présentation de la nouvelle réglementation RT 2012. Hélas il s’agit là d’un texte extrêmement fragile (pour ne pas dire plus). Et largement inapplicable, surtout dans les délais prévus.
Cette mise en doute n’est-elle pas un peu exagérée ?
Je crains bien que non. J’ai, d’abord, espéré que cette nouvelle réglementation saurait corriger les défauts des réglementations plus anciennes et j’ai donc abordé le texte de façon a priori très positive. Hélas, je suis allé de mécompte en mécompte. D’abord un premier, qui ne semble pas avoir été bien perçu en général : la réglementation n’est pas terminée, et les auteurs du texte ont dû être sommés de fournir leur travail à une date imposée. Résultat : la RT 2012 actuelle ne s’applique qu’à l’habitat et aux bâtiments d’enseignement. Comme cette limite n’est pas clairement abordée on ne sait pas quand, ni si des textes complémentaires verront le jour. De toute façon le fameux moteur de calcul n’est pas disponible. De plus, le texte est juridiquement suspendu aux décisions du Conseil d’Etat.
N’est-ce pas une remise en cause excessive ?
J’ai, plusieurs fois, dans cette lettre, souligné la faiblesse juridique des RT, mais je crains que beaucoup de lecteurs aient pensé que mes réserves étaient secondaires. En fait il n’en est rien, et ce n’est probablement qu’un début. Tout tient à une modification législative applicable depuis début 2010, mais trop souvent passée inaperçue. Avant 2010 la contestation des textes réglementaires ne pouvait guère se faire qu’au niveau européen, et ce par des procédures longues et laborieuses. Depuis 2010, date d’application d’une nouvelle loi, il est possible d’attaquer les textes en Conseil d’Etat : c’est ce qui vient de se produire déjà deux fois pour la RT 2012. Ce qui, de plus, pourrait bien encore se produire dans le futur pour des motifs autres que ceux utilisés aujourd’hui.
Vous pensez que de nouveaux recours sont encore possibles ?
Absolument, mais faudra-t-il encore qu’un contestataire se déclare. Prenez, par exemple, le problème de la méthode de calcul. Le recours au CSTB dans les conditions fixées par la RT, est – à mon sens – illégal. Toute méthode, même complexe, doit pouvoir être décrite en termes clairs et en français. Bien entendu si la complexité le justifie, cette méthode peut être informatisée, mais à partir d’un texte accessible et juridiquement organisé, donc publié en français par l’autorité administrative adéquate. Un texte qui, de plus, peut alors être soumis à la critique et à la sagacité des lecteurs.
Que voulez-vous dire par là ?
Prenons un exemple : celui du calcul des consommations en climatisation, un domaine où la procédure proposée frôle parfois l’absurde et l’irréalisme. Il suffira, simplement, dans bien des cas de ne pas prévoir « officiellement » de climatisation, et de prévoir des prises de courant sur lesquelles l’occupant pourra brancher des climatiseurs. Tout ceci sans oublier bien d’autres imperfections graves dont personne ne semble vouloir parler, qu’il conviendrait de corriger : en évaluant et publiant les surcoûts très importants liés à cette nouvelle réglementation, en procédant aux vérifications in situ de la méthode de calcul des consommations (ce que font un peu tous les pays développés pour leurs propres règles).
Tout cela parait bien formel …
Ce ne sont pas les seules fragilités de la RT 2012 telle qu’elle est actuellement prévue. Quand je l’ai lue, malgré ma bonne volonté a priori, j’ai été abasourdi par un certain nombre de dispositions, dont certaines – plus ou moins injustifiées – ont des répercussions commerciales très fortes. Même si nous laissons de côté ces faiblesses, il est évident que la RT se moque des normes. En voici un exemple : un calcul réglementaire spécifique (erroné et de bases climatiques fallacieuses) de la température intérieure d’été sans climatisation (la TIC), alors qu’il existe une norme internationale (NF EN ISO) sur le sujet, norme (valable) à laquelle il aurait été extrêmement simple de se référer.
Roger CADIERGUES