Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
5 Juillet 2010
Au-delà des querelles à la mode, et si l’on veut vraiment mener une « politique du futur », je pense qu’il y a – pour l’essentiel et dans les discours actuels plus ou moins complets - quatre « risques » à prendre en compte. Or, sur ce sujet et à mon avis, nous sommes de plus en plus souvent victimes d’erreurs profondes. Après avoir – sommairement – examiné les trois premiers nous allons examiner le suivant, et en tirer des conclusions qui se veulent globales.
Expliquez-vous ?
Voici le quatrième « risque », avec un exemple. Dans une construction courante l’acier représentait jusqu’ici de l’ordre de 8% des coûts. A partir de 2011-2012 il devrait atteindre 11 ou 12%, par suite du glissement des prix des matières premières. Mais le fond du problème n’est pas tellement cette hausse des coûts, le fond c’est qu’avec le fer - comme avec bien d’autres minéraux - beaucoup de mines connaissent une baisse de teneur en minerai. Il va donc falloir organiser l’appel aux réserves de matières premières. Car, en y regardant de près, les ressources pourraient bien, assez rapidement, devenir insuffisantes. C’est donc à une optimisation globale – y compris de toutes les ressources - qu’il faudrait s’attacher.
Comment y parvenir ?
A mon avis, dans un premier temps il faudrait :
. mettre à part – et sous surveillance – les problèmes des ressources d’énergie et de matières premières,
. mais se préoccuper immédiatement du double risque d’un plus ou moins fort réchauffement climatique et de l’épuisement relatif de nos ressources financières consacrées au bâtiment.
Et, pour cela, corriger notre manque total actuel d’optimisation des décisions.
Que voulez-vous dire en parlant d’évolution dans les circuits de décision ?
Depuis les années 1970 toutes nos réglementations énergétiques (dites thermiques) ont été soigneusement préparées par le ministère de l’équipement, généralement par des techniciens spécialistes du sujet. Il faut bien voir qu’avec le Grenelle de l’Environnement nous changeons de procédure. A côté des équipes ministérielles du type précité, le Grenelle 2 sera encadré par des textes qui seront, au moins pour l’essentiel, examinés par le Parlement. Lequel a confié à un Office Parlementaire (l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques : OPECST) le soin de préparer sa position. Ce qui a abouti à un rapport très circonstancié et assez volumineux intitulé « la performance énergétique des bâtiments : comment moduler la règle pour mieux atteindre les objectifs ». Ce rapport préfigure, plus ou moins, la position parlementaire, laquelle est devenue essentielle dans le système actuel. Or cette position n’hésite pas à contester certains choix prévus, ou du moins à les moduler. Finalement les positions ne sont pas toujours conformes aux prévisions initiales que l’on pouvait faire à partir du travail du Grenelle 2. Il faut donc faire très attention quant aux prévisions actuelles. D’autant qu’elles sont actuellement à courte vue.
Que voulez-vous dire par là ?
Que les mesures adoptées s’échelonnent finalement sur une très large étendue de temps, jusqu’en 2050 dans bien des cas. Or le monde peut changer d’ici là. Prenons un exemple : l’école de géosciences d’Edimbourg vient de lancer le programme « CO2SolStock » basé sur l’élimination du CO2 par des bactéries produisant alors des roches calcaires. Il ne s’agit pas là d’un programme à très longue échéance puisque les premiers résultats sont attendus d’ici 3 ans. C‘est, en tous cas, un exemple qui démontre bien qu’il faudrait prendre beaucoup plus de précautions que celles adoptées au Grenelle 1 de l’environnement … mais il y en a bien d’autres.
Pratiquement que faire ?
A mon avis, optimiser, ce qui oblige à prendre un certain nombre de précautions. Des précautions qui me paraissent essentielles, et qu’il nous faut examiner : ce sont celles que j’essaierai de proposer dans les prochaines lettres, afin de bien préciser ce que je veux dire. Voici les principes que je suggère.
1. Se baser d’abord sur un critère central : le dégagement de carbone. Et le faire avec des évaluations honnêtes et complètes, ce qui n’est malheureusement pas le cas des règles actuelles : pas de chiffres psychologiques, mais des chiffres réels et complets, incluant par exemple les énergies « grises ».
2. Traiter ce problème, non pas en le globalisant toutes composantes mêlées, mais en séparant les différents segments techniques concernés selon leur durée de vie. C’est le point essentiel qu’il nous va falloir désormais revoir.
Roger CADIERGUES