Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
22 Novembre 2010
J’ai, ces deux dernières semaines, essayé de montrer comment, à mon sens, il vaudrait mieux opérer pour faire du véritable développement durable.
N’êtes-vous pas en pleine contradiction avec les démarches actuelles ?
Les démarches que je propose ont un but bien clair : comment faire du développement durable. Aussi bizarre que cela puisse paraître il ne s’agit pas à mon sens d’appliquer une réglementation mais de faire le mieux possible sur tous les détails. Une fois votre développement assuré vous pourrez toujours vérifier si vous êtes réglementaire ou non. Ce que je propose c’est de faire du vrai développement durable, qui tienne dans le temps. Et non pas du développement mathématique, intellectuel et technocratique.
Les démarches réglementaires actuelles (étroitement françaises d’ailleurs) sont basées, pour l’essentiel, sur l’évaluation des consommations d’énergie grâce à la méthode dite « Th-C-E ». Soyons clair :
1°. le contenu technique (d’ailleurs assez instable) de Th-C-E continue à faire l’objet de critiques multiples, et son statut juridique me parait de plus en plus douteux ;
2°. il existe au moins deux logiciels (Perrenoud et BBS-Slama) qui permettent d’appliquer la méthode Th-C-E, outils utilisés dans la très grande majorité des cas et que je n’ai aucune raison de critiquer.
Vous pouvez toujours, si vous le souhaitez, utiliser ces outils pour vérifier la conformité réglementaire.
Etes-vous finalement sceptique sur les méthodes françaises actuelles ?
Franchement oui, et ce pour deux raisons. Pour des raisons pratiques d’une part - raisons que j’ai déjà développées. Mais, également, parce qu’elles induisent des développements souvent utopiques et dangereux.
Qu’entendez-vous par là ?
Plusieurs conséquences assez disparates, mais regrettables. Qu’il nous faut examiner les unes après les autres si nous ne voulons pas tout mélanger. Trois sont, à mon avis, essentielles.
. La première conduit à une nouvelle utopie celle des « consommations zéro ». Et ce, quel qu’en soit le coût – ce qui, inévitablement, conduira à des impasses.
. La deuxième conséquence est une absence de véritable politique énergétique nationale bien cadrée – je pense surtout à la « défaillance électrique ».
. La troisième conséquence est de vouloir induire des progrès globaux, alors que l’essentiel est certainement constitué de progrès partiels et échelonnés dans le temps.
Pouvez-vous être plus clair ?
Prenons d’abord ce que j’ai appelé l’utopie de la consommation zéro. C’est devenu, parfois, une vraie religion. Il faut bien voir que ce n’est aujourd’hui jouable, en France, qu’en fixant des bases douteuses (une énergie primaire très conventionnelle par exemple) et des calculs faux (un oubli des énergies grises, une utopie sur la récupération des chaleurs gratuites, etc ...). Je l’ai souvent souligné et je n’y reviendrai pas.
Reste ensuite ce que je considère comme une absence de politique énergétique claire, volontaire et valable – je pense surtout à l’électricité. C’est un sujet qui mériterait actuellement un examen plus approfondi : j’y ai déjà insisté, mais la situation ne va pas s’améliorant par suite d’obligations européennes plus ou moins absurdes.
Reste, in fine, un aspect très particulier du monde technique actuel du bâtiment : celui des innovations.
Que voulez-vous dire ?
Quand vous regardez les initiatives nouvelles abondamment citées par la presse il s’agit presque toujours de systèmes globaux, des maisons « écologiques » passives ou solaires par exemple - qui se veulent plus performantes que les anciennes. Théoriquement du moins car les expériences sur le terrain manquent. En fait c’est une vue déformée du progrès car on oublie ainsi l’innovation des composants, qui est probablement bien plus importante mais dont on parle relativement peu.
Je suis, hélas, toujours un peu navré de constater qu’en matière d’innovations il existe bien deux catégories dont on ne parle pas également :
- les innovations basées sur des solutions globales (maisons solaires, etc ...), telles que je viens de les décrire, qui sont – hélas – à la base de l’essentiel des annonces actuelles,
- et les innovations dont on parle beaucoup moins (bien qu’elles soient probablement beaucoup plus importantes), celles qui concernent les composants, une catégorie où vous trouverez par exemple les progrès récents sur les pompes à chaleur, ou les progrès en cours sur les moteurs électriques (à aimant permanent ou à vitesse variable).
Roger CADIERGUES