Par Olivier PAPIN – Ingénieur INSA
Le Bilan des Emissions de Gaz à Effet de Serre ou BEGES est un bilan réglementaire et donc obligatoire pour bon nombre de sociétés. Il a pour mérite d'obliger de nombreux acteurs à prendre en compte les enjeux des émissions de gaz à effet de serre et du changement climatique. L'obligation d'établir ce bilan a été portée jusqu'au 31 décembre 2012.
Quelle utilité possède réellement ce bilan réglementaire ? Quelle comparaison peut-on porter par rapport au Bilan Carbone® ? 
L’article 75 de la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010  portant engagement national pour l’environnement (ENE) et le Décret n° 2011-829  du 11 juillet 2011 relatif au bilan des émissions de gaz à effet de serre et au  plan climat-énergie territorial rendent obligatoire la réalisation d’un bilan  des émissions de gaz à effet de serre.
Les obligés, tenus d’établir ce bilan avant le 31  décembre 2012 sont :
- Les personnes morales de droit privé de plus de 500 personnes (SIREN)
 - Les personnes morales de droit privé de plus de 250 personnes pour les DOM-TOM
 - Les communes ou communautés de communes de plus de 50 000 habitants
 - Les Collectivités locales (régions, départements, communautés urbaines, …) de plus de 50 000 habitants
 - L’Etat
 
A  noter que l’effectif est définit selon les règles du code du travail et l’effectif  de référence est l’effectif atteint en 2011, année sur laquelle vont se baser  les données du bilan.
Ce bilan doit ensuite être publié et actualisé tous les  3 ans. A noter que ce bilan de gaz à effet de serre obligatoire inclut un plan  d’action, lui aussi obligatoire.
Regardez le texte de loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement
Texte de loi n°2010-788 du 12/07/2010 
Par souci de clarté, ce bilan réglementaire obligatoire  est communément appelé dans la profession le « BEGES réglementaire »  (pour Bilan des Emissions de Gaz à Effet de Serre Réglementaire), par  opposition au bilan carbone que nous avons déjà évoqué dans la tribune d’XPAIR,  et dont le périmètre est plus exhaustif.
La norme ISO 14 067 définit ainsi 3 scopes de  comptabilisation des émissions dont seuls les deux premiers sont obligatoires  dans le BEGES réglementaire, le troisième étant uniquement recommandé:

A noter que tous ces postes sont obligatoirement pris en compte dans le cadre du bilan carbone
pour correspondre au cahier des charges de la démarche.
Le périmètre du BEGES réglementaire est en effet assez  différent de celui du bilan carbone, pour la partie obligatoire, dans le fond  et dans la forme.
En effet le BEGES réglementaire s’appuie sur la norme  ISO 14 067, avec laquelle le bilan carbone est entièrement compatible, pour sa  comptabilité.
Sur le fond, le bilan carbone ne doit négliger aucun  poste quand le BEGES réglementaire lui peut choisir de limiter fortement le  périmètre.
Sur la forme, la dénomination des postes du BEGES  réglementaire reprend complètement les noms des postes de la norme, pas  toujours très communiquants (ex : Leasing Aval).
Le bilan carbone quant à lui, s’il effectue également  une extraction de ses postes selon les 24 postes de la norme ISO 14 067,  regroupe les postes d’émissions sous des appellations un peu plus simples et  regroupées :
1/ Energie
2/ Hors Energie
3/ Intrants
4/ Futurs emballages
5/ Frêt
6/ Déplacements de personnes
7/ Déchets
8/ Immobilisations 
9/ Utilisation des produits
10/ Fin  de vie des produits
Les deux approches ne sont donc pas tout à fait identiques, comme le montre le tableau comparatif suivant qui récapitule la prise en compte des postes d’émissions, suivant l’approche:

Dans sa réalisation, le BEGES règlementaire ne représente pas à ce jour une démarche complète comme peut l'être celle des acteurs qui se lancent dans un bilan carbone.
 
En effet, le périmètre restreint peut assez simplement être comblé en termes de collecte de données, et la dimension « projet d'entreprise » est bien moins présente puisque le périmètre ne tient compte que de données simples et souvent déjà suivies, quand le bilan carbone amène à se poser des questions en termes d'impacts indirects et de vulnérabilité face à l'épuisement des ressources fossiles, et notamment de ses coûts directs et indirects.
Forcément, puisque la comptabilité du BEGES réglementaire  n’est pas aussi exhaustive que celle du bilan carbone, l’ensemble des émissions  n’est pas couvert.
Ainsi on estime communément dans la profession que les  scopes 1 et 2 (obligatoires) ne représentent souvent que 10 à 30% des émissions  du scope 3, périmètre du bilan carbone©.

Exemple d'extraction par scope 1, 2 et 3 d'un bilan carbone© réalisé par ECIC
En effet, l'ensemble des émissions indirects (la fabrication des matières premières, les déplacements domicile – travail, les déchets, le frêt sous traité, l'utilisation et la fin de vie des produits, les immobilisations, etc…) ne sont pas pris en compte dans l'approche réglementaire de manière obligatoire (ces postes sont uniquement recommandés). 
Ces postes représentent souvent une forte part des émissions, indirectes certes, mais absolument indispensables au fonctionnement de l'entreprise, et témoignent donc de sa vulnérabilité carbone (effet de serre et épuisement des ressources fossiles).
Le  BEGES réglementaire, s’il a le mérite d’exister et d’obliger de nombreux  acteurs à prendre en compte les enjeux des émissions de gaz à effet de serre et  du changement climatique, ne représente pas à ce jour un véritable outil  stratégique en termes d’impact et de vulnérabilité carbone. Il permet toutefois  de faire entrer ses problématiques dans le cœur des entreprises qui ne s’y  étaient pas encore intéressées.
Le bilan carbone© reste à ce jour l’outil  et la démarche la plus exhaustive pour prendre en compte l’impact carbone de son entreprise ou de sa collectivité en termes de changement climatique et  d’épuisement des ressources fossiles.
On  peut toutefois supposer que le dispositif réglementaire sera amené à évoluer  dans le temps et à étendre à la fois son périmètre, et le nombre de ses obligés  et il sera intéressant à la fin de l’année 2012 de connaître le retour sur les  BEGES réglementaires réalisés et les plans d’actions engagés.
Olivier PAPIN 
Olivier PAPIN, Ingénieur INSA Energie et Environnement assure des missions d'audit énergétique et bilan carbone pour les collectivités publiques et les sociétés privées.
Il est également formateur spécialisé Bilan Carbone et intervient pour le compte de l'Institut de Formation Carbone. ECIC a réalisé à ce jour plus de 150 bilans carbone et plusieurs Plan Climat Energie Territoire (PCET). 
www.bet-ecic.fr
→ SOURCES & LIENS
- www.ademe.fr
 - www.associationbilancarbone.fr
 - www.if-carbone.fr
 - www.apc-carbone.fr
 - www.developpement-durable.gouv.fr/Bilans-des-emissions-de-gaz-a.html
 - www.bet-ecic.fr
 
→ AUTRES CHRONIQUES d'Olivier PAPIN
