Par Olivier BROGGI, CEGIBAT et Mickaël SERRES, Cena Ingénierie
Confort et performance énergétique à assurer, intermittence d’occupation, fort taux de renouvellement d’air neuf, respect du mode constructif et architectural, …, une école n’est pas un projet si simple à étudier. Celui qui vous est présenté concerne une école qui a été dès le début bien pensé, qui est équipée d’une installation à haute efficacité énergétique qui fonctionne à son niveau attendu ; on ne pouvait pas ne pas en parler !
Une école n’est pas un projet si simple à traiter
En 2009 la ville de Rumilly (Haute Savoie) décide la création d’un nouveau groupe scolaire pour tenir compte de sa croissance démographique. Cette école de 250 élèves se compose de 4 classes de maternelle et 6 classes de primaire. 8 classes supplémentaires sont également prévues par Antoine Gaillard (Cabinet Richard Plottier) architecte à Lyonnais du projet.
La mairie confie au bureau d’étude CENA Ingénierie les premières études dont celle d’approvisionnement en énergie.
Celui-ci écarte rapidement les solutions techniques suivantes :
- Solaire thermique, car l’école à de faibles besoins d’eau chaude et elle est fermée en été,
- Eolien, car la ville de Rumilly est en dehors de la ZDE (Zone de Développement de l’Eolien)
- Chauffage urbain, aucun réseau à proximité
- PAC électrique air/eau car les hivers sont trop rigoureux à Rumilly
- PAC électrique eau/eau car le débit d’eau nécessaire est trop important
- Cogénération, du fait de l’absence de visibilité sur les tarifs de rachat de l’électricité à cette époque
- Fuel ; la ville étant desservie en gaz naturel,
- Electrique effet joule, pour des questions de coût d’exploitation.
Le BET se concentre donc sur les solutions Solaire Photovoltaïque, chauffage bois, PAC géothermique sur sonde (électrique ou gaz) et chaudière condensation.
|
Investissement k€ HT (1) |
Exploitation k€ HT |
CEP kWh/m².an |
CO2 |
Classement Energie |
Classement Climat |
Chauffage bois |
282 |
17 |
121,6 |
4,48 |
C |
A |
PAC géo élec |
312 |
15 |
96 |
5,32 |
C |
A |
PAC géo gaz |
285 |
15 |
91 |
12,4 |
C |
C |
Condensation |
189 |
18 |
109 |
16,64 |
C |
C |
PV seul |
128 |
-9,9 |
-15,9 |
|
|
|
(1) Comprend l’installation globale de chauffage : génération, distribution, émission, sonde géothermique éventuelle.
La pompe à chaleur à absorption est donc ressortie comme étant « le choix le plus intéressant si on prend en compte les aspects financiers (investissement et maintenance) et environnementaux. En effet, des solutions moins onéreuses existent, comme la chaudière gaz à condensation, mais ses performances environnementales sont moins bonnes. De même, la PAC électrique ou le chauffage bois sont plus performants sur les kg de CO2 mais sont soit des solutions plus coûteuses, soit plus consommatrices d’énergie primaire. »
Dans le même temps, le cabinet Richard Plottier termine de dessiner ce que sera cette future école. L’architecte part donc sur une ossature bois !
Avec une attention forte sur l’éclairage naturel !
Son mode constructif est donc le suivant :
Murs de façade ossature bois |
Plancher |
Toiture terrasse végétalisée |
Traitement des ponts thermiques |
Vitrages |
Etanchéité à l’air |
Solutions d’efficacité énergétique face à une faible inertie
L’ossature en bois du bâtiment rend son inertie faible. Il existe donc un risque réel d’inconfort en période chaude. CENA Ingénierie recherche donc une solution permettant un rafraîchissement non pénalisant (d’un point de vue RT et économique) ainsi qu’une régulation très réactive.
Le choix des sondes géothermiques pour assurer du free-cooling en été et du vecteur air comme système d’émission se met en place.
Une sur-ventilation nocturne sera donc mise en place via les CTA. Elle sera couplée à un rafraîchissement direct via les sondes en by-passant la PAC.
5 CTA double-flux à récupération d’énergie (rendement entre 80 et 85%) ont donc été installées.
L’air chaud est soufflé dans les classes et repris dans les circulations ce qui apporte le bénéfice secondaire de sécher les vestes des élèves laissées sur les porte-manteaux par temps humide.
La ventilation est équipée de batteries chaudes terminales dans les classes afin de rendre l’émission de chaleur très réactive.
Déperditions : pour -11°C extérieur 19°C dans les classes et 16°C dans les circulations: 102 kW soit 42 W/m².
La puissance installée est donc de 3 pompes à chaleur de 37 kW soit 111 kW.
Le choix de la technologie pompe à chaleur à absorption gaz a été fait pour minimiser l’investissement en sonde. En effet pour un coût d’exploitation équivalent la technologie gaz présente un réel gain d’investissement.
PAC GAZ ABSO |
PAC ELEC |
|
PAC |
50 000 € |
25 000 € |
Sondes |
11 sondes |
20 sondes |
Adduction gaz |
2 500 € |
- |
TOTAL |
118 500 € |
145 000 € |
- Pour tout savoir sur la technologie PAC ABSORPTION, consultez le dossier de savoir faire
PAC absorption gaz et solutions RT 2012
Production de chaleur assurée par 3 PAC à absorption géothermiques
Répartition du champ de sonde
Schéma hydraulique de l’école Joseph Beard de Rumilly
NB : le schéma laisse apparaître 3 emplacements de PAC pour les 8 classes complémentaires. Quand celles-ci seront décidées, une seconde étude détaillée permettra de déterminer en fonction aussi des contraintes budgétaires si ce sont effectivement 6 pompes à chaleur qui alimenteront l’école ou un couplage PAC + chaudière.
Fonctionnement Hiver
Fonctionnement été
Avec cette installation et cette structure l’école atteint le niveau BBC (de la RT2005)
Détails |
Projet |
Référence |
Ecart en % |
Ubat |
0,459 |
0,679 |
32,33 |
Cep (kWhep/m²) |
62,95 |
162,27 |
61,21 |
Chauffage/rafraichissement |
16,89 |
85,48 |
80,24 |
Eclairage |
21,21 |
28,74 |
26,19 |
Auxiliaires chauffage |
7,45 |
3,1 |
-140,48 |
Auxiliaires ventilation |
17,39 |
44,95 |
61,31 |
Bilan qualitatif et énergétique de cette installation PAC gaz réversible
Le fonctionnement du chauffage est satisfaisant. Il a cependant connu quelques difficultés indépendantes des PAC les premiers temps.
Pas de problème à signaler lors des 2 semaines de froid soutenu notamment en Février 2012.
Le rafraîchissement a été efficace voire trop efficace par endroit, ce qui a nécessité de revoir la programmation.
Consommations énergétiques
- Gaz saison 2011 – 2012 : 42 kWhep/m²
- Électricité tout usage Juin 2011 - Juin 2012 : 33 kWh/m² soit 84 kWhep/m²
A noter que le chauffage a fonctionné dés début Septembre 2011 pour affiner les réglages et être parfaitement opérationnel pour l’hiver.
Pour faire la preuve du bon fonctionnement des machines GrDF et l’Ademe ont décidé d’instrumenter ce site et de mesurer dans le détail les performances des pompes à chaleur sur l’hiver 2012-2013.
Instrumentation et mesure de l’efficacité énergétique : les résultats !
Cette instrumentation a permis de démontrer que :
1°) L’installation était correctement dimensionnée
Sur la semaine la plus froide de l’hiver, les trois PAC sont engagées, parfois à pleine puissance.
Le jour le plus froid de l’hiver (le 12/12/12), à 8 heures, les 3 PAC s’engagent à pleine puissance. Une fois la consigne atteinte, seule la PAC 1 reste en service pour assurer le maintien du confort.
2°) La cascade entre les machines fonctionne normalement
3°) Les performances énergétiques sont au rendez-vous
Un GUE moyen de 1,5 sur l’ensemble de la saison de chauffe, conforme aux valeurs attendues
4°) Aucune incidence de la température extérieure sur le COP
Ce qui est rassurant sur une machine géothermique !
COP moyen à 1,4 pour 1,43 attendu !
Bien que l’on puisse s’attendre à une corrélation entre la température de la source froide géothermique et les COP obtenus, il n’apparait pas ici de corrélation visible.
Température de la source froide de 0°C à 12°C
Ces bons résultats ont fait dire à l’Ademe …
Le site instrumenté de Rumilly a permis d'évaluer la technologie de pompe à chaleur géothermique à absorption gaz naturel en fonctionnement basse température (50°C) avec géo-cooling pour assurer un refroidissement des locaux durant l’été. Les résultats de ces mesures permettent de conclure au fonctionnement tout à fait satisfaisant du système :
- Les performances en chauffage mesurées in situ sont en moyenne de 140% sur énergie primaire pour une température de production d’environ 50°C, soit une performance équivalente à celle mesurée en puissance nominale par le constructeur (150% à B0/W50).
- Le taux de disponibilité de l'installation a été de 100% avec un niveau de confort en température très satisfaisant, indépendamment des conditions de température extérieure.
- Le dimensionnement de l’installation est tout à fait correct, les trois pompes à chaleur étant sollicitées en même temps durant les jours les plus froids et permettant d’assurer l’ensemble des besoins de chauffage.
Conclusion générale : Nous sommes donc en présence ici d’un bâtiment bien pensé et conçu, bien réalisé et équipé d’une installation qui fonctionne à son niveau attendu.
Par Olivier BROGGI - Ingénieur National Tertiaire CEGIBAT, et Mickaël SERRES - Cena Ingénierie
olivier.broggi(at)grdf.fr
SOURCES ET LIENS
- Synthèse site de Rumily
-
Autre article instrumentation abso:
La pompe à chaleur gaz donne de solides résultats
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