Par Alain GARNIER ingénieur et directeur du bureau d'études GARNIER à Reims.
Préambule
Efficacité énergétique et EnR. Sommes-nous prêt pour 2020 ? C’est le troisième article d’une série portant sur les économies d’énergie ainsi que le recours aux EnR (énergies renouvelables). Il y en aura d’autres, tout dépend de vos réactions.
Les articles précédents traitaient de « l’industrie à basse consommation d’énergie » :
- Et si on s’attaquait aux économies d’énergie dans l’industrie ?
- Un exemple de solutions d’économies d’énergie dans l’industrie
Le contexte énergétique européen et français
Depuis 2008, de nombreuses mesures énergétiques et environnementales ont été prises au niveau européen avec notamment le lancement du « 3x20 ». Ce programme consiste, pour l’horizon 2020 à :
- Augmenter de 20% l’efficacité énergétique,
- Diminuer de 20% les émissions de CO2,
- Et couvrir 20% des besoins en énergie par des énergies renouvelables.
Site Commission Européenne
La feuille de route pour la France peut se résumer ainsi
Un constat :
Nous sommes en 2013 et pourtant nous stagnons, les ambitions des premières années de quelques uns se sont éteintes, la conjoncture n’explique pas tout …
Pourtant les constructeurs ont amélioré leurs produits. Les architectes commencent à avoir des formations pour apprendre à réaliser des bâtiments BEPOS de façon à être prêt en 2020.
Comment se préparent les bureaux d’études ?
Tant bien que mal me diriez-vous ! Néanmoins, le BET doit posséder cette vision globale certes bâti + systèmes, où chaque kWh compte. Pour répondre à cette question, j’illustrerais mon propos par des exemples, des recommandations et des conseils, qui diffusés au sein d’Xpair, permettront la prise de conscience et le partage d’informations précieuses.
La densité de mon propos m’oblige séparer ma chronique en 2 parties :
Efficacité énergétique et EnR. Prêts pour 2020 ? - Acte 1
Efficacité énergétique et EnR. Exemples dans l’industrie - Acte 2
Et si on imaginait d’autres voies de progrès …
Depuis des décennies, nous travaillons sur des concepts de production et d’émission de façon détachée et en prodiguant par habitude les mêmes conseils (le fameux copier-coller). Compte tenu de l’évolution rapide des performances des matériels et des possibilités que nous offre maintenant la régulation pour les exploiter, il me semble que les bureaux d’études pourraient peut-être repartir des fondamentaux et se reposer les bonnes questions de façon à trouver des voies nouvelles de progrès.
Certains y seront opposés, préférant la sécurité à l’efficacité. Il y a le risque diront d’autres que dès que l’on modifie soit la production, soit d’émission, des interactions se développent souvent au détriment du fonctionnement.
Pourtant sans des surcoûts excessifs, les bureaux d’études devraient dans leur ensemble suivre l’axe vertueux de de leur métier : l’innovation au travers de la valorisation des récupérations et des transferts thermiques ainsi que la substitution de l’énergie fossile par des EnR.
Les bureaux d’études doivent avoir une réflexion globale qui seule permettrait d’accéder à une efficience énergétique maximum.
Pour y arriver, ils ont plusieurs axes de réflexion. Ne faudrait-il pas ?
- Demander à la GTC de calculer le bilan thermique en continu de façon à intervenir plus intelligemment sur les équipements (performance et tarification) ?
- Réaliser des mix énergétiques ?
- Adapter, grâce à la GTC, les puissances, les débits et les températures mis en œuvre ?
- Foisonner les besoins et les raccorder en série afin d’optimiser le BT (basse température) voir le TBT (très basse température) ?
- Accorder plus d’importance aux systèmes de récupération d’énergie, aux transferts thermiques et substituer la consommation en énergie fossile par des EnR ?
- Optimiser les performances des générateurs et émetteurs en fonction de leur taux de charge de façon à augmenter leur rendement de génération ?
- Gérer et anticiper le fonctionnement des générateurs et émetteurs de façon à lisser les pics de puissance ?
Réfléchissons à chaque nouveau projet pour savoir s’il n’y a pas d’autres voies que les standards habituels. Apprenons ou réapprenons à réfléchir !
Je vous donne 3 exemples simples mais reflétant l’étendue des possibilités d’augmenter l’efficience énergétique de nos systèmes :
- Une chaufferie en tertiaire où tout est fait pour condenser,
- Un système global de production de froid et de rafraichissement et de climatisation en industrie où les EnR sont utilisés au maximum. (A voir dans la chronique Acte 2)
- Une déshumidification (processus, piscine, etc.) où la récupération de froid sensible et de chaud permettent de réduire les consommations d’énergie de 20%. (A voir dans la chronique Acte 2)
Les avantages apportés par les chaudières à condensation sont bien connues, surtout en tertiaire car les temps de chauffage en ralenti et même en hors gel sont bien plus longs et contribuent ainsi à beaucoup plus d'économie d 'énergie.
Quand on gagne 8 à 10% en habitat grâce aux chaudières à condensation, il n'est pas rare d'en gagner 14 à 16% en tertiaire.
De plus, depuis que les chaudières à condensation savent moduler en puissance à partir de 25 voir de 10% chez certains constructeurs, le rendement de génération a été considérablement augmenté. Avec un démarrage à 10% de la puissance nominale, il n'est plus rare de produire l'eau chaude sanitaire sur ce type de chaudière alors qu'il n'y a pas si longtemps on recourrait à des chauffe-eau gaz ou électriques.
Il y a encore et malheureusement beaucoup d'installations qui comportent des chaudières à condensation qui ne condensent pas du fait essentiellement d'erreur de conception. Il faut donc trouver des parades pour que cela ne se reproduise pas.
On devra concevoir des systèmes de production de chaleur intégrant un bilan thermique des besoins, pour agir ensuite sur la modulation de puissance des chaudières à condensation. On pourra aussi recourir aux chaudières à condensation à 3, voir prochainement à 4 piquages de façon à sélectionner les retours des circuits en fonction de leur température pour condenser au maximum.
Pour parvenir à un gain maximum grâce à la condensation, il faut réaliser une analyse été et hiver des besoins calorifiques hebdomadaires et des températures des différents circuits. Ce n'est pas simple car certains circuits n'ont pas les mêmes besoins de température d'eau en été et en hiver, alors lequel raccorder sur le piquage TBT ?
La solution que je vous propose de mettre en place, c'est de remplacer la distribution en étoile par une en série, au moyen d'une boucle primaire à débit variable. Les circuits seraient branchés dessus en série suivant un ordre décroissant dépendant de leur température d'entrée. Chaque circuit serait branché sur la boucle primaire en dérivation, il comporterait une vanne de régulation installée en mélange avec sa propre pompe de façon à obtenir un débit constant avec une température variable dans les émetteurs.
L'autre intérêt d'un tel montage hydraulique serait que l'on pourrait même alimenter un circuit HT (à haute température) tel que le bouilleur d'une machine à absorption à réchauffage indirect ou encore un traitement anti-légionnelle par choc thermique. Car, on pourra grâce aux circuits suivants BT ou TBT descendre la température de retour à la chaudière à condensation.
Si les besoins en production d'eau chaude sanitaire étaient importants, on pourrait même profiter du retour de la boucle primaire en BT pour préchauffer l'eau chaude sanitaire ce qui aurait également pour effet de passer le retour de la chaudière en TBT et lui permettre de condenser d'avantage.
Schéma de principe d'un système de production de chaleur ou tout est fait pour condenser
S’il s’agit d’un réseau de chaleur avec une chaufferie centralisée, ce serait pratiquement le même principe. C’est le réseau de chaleur qui jouerait le rôle de boucle primaire et les circuits qui seraient branchés dessus comporteraient des sous-stations avec des vannes de régulation installées en injection avec leur propre pompe de façon à obtenir un débit constant avec une température variable dans les émetteurs. On serait certain de condenser un maximum.
Par Alain GARNIER
Alain Garnier est ingénieur et directeur du bureau d'études GARNIER 120 rue Gambetta à Reims
Lauréat du premier prix de l'Eco-Efficacité catégorie « concepteurs » en 2009,
récompense remise lors de l'UCE (Université du confort et de l'eau) de ICO à Lille.
Alain Garnier a écrit deux ouvrages :
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L'échéance BEPOS est très proche, et il n'y a pas que les BET qui sont en retard de formation. L'offre industrielle est-elle même lancée? Les pouvoirs publics sont-ils en phase quand on voit la dispute et la polémique sur la RT 2012 avec la dernière décision du Conseils d'Etat. Oui M. GARNIER, il y a urgence à former toute la filière mais qui est le pilote dans l'avion?