Par Ludovic Gutierrez, Responsable Efficacité Energétique Résidentiel - Cegibat
Il s’agit de la réalisation d’un Bâtiment intergénérationnel à Energie POSitive dans l’éco-quartier MONTGORGES situé à POITIERS (86) ; soit un bâtiment résidentiel BEPOS de 30 logements.
Carte d’identité du projet
Date des travaux : Février 2015 – Juin 2016
Localité : Poitiers (H2b)
Type de bâtiment : Bâtiment collectif composé de 30 logements R+3
Superficie : 2219 m² SHAB (2562 m² SRT)
Maître d’ouvrage : CIRMAD Centre Sud-Ouest pour le compte de LOGIPARC
Bureau d’études thermiques : CETAB
Architecte – Maître d’œuvre : AUE PAUL CHEMETOV
Solution retenue : Chaudières individuelles à condensation gaz naturel + Installation solaire photovoltaïque en toiture
Les choix techniques face aux attentes du client
2.1 Contexte : pour 30 logements Bepos
Il s’agit de la réalisation d’un Bâtiment intergénérationnel à Energie POSitive dans l’éco-quartier MONTGORGES situé à POITIERS (86) ; soit un bâtiment résidentiel BEPOS de 30 logements. Initiative lancée en 2008 par Grand Poitiers, en réponse à l’appel à projets lancé par le Ministère du Logement relatif aux éco-quartiers, la rénovation urbaine de la ZAC des « Montgorges », parcelle de 33 hectares située à proximité du centre-ville, a permis la construction du premier éco-quartier de la région Poitou-Charentes.
2.2 Attentes, entre autres : encourager la mixité sociale et intergénérationnelle
Afin de faciliter son intégration dans l’environnement existant tout en offrant un cadre de vie agréable, Grand Poitiers a fixé six enjeux majeurs pour faire de cette opération, une réussite économique, sociétale et environnementale :
- Prendre en compte les besoins des futurs habitants
- Encourager la mixité sociale et intergénérationnelle
- Favoriser les formes urbaines innovantes
- Rechercher l’efficacité énergétique optimale
- Favoriser les circuits de production locaux
- Gérer durablement les ressources en eau
Pour ce faire, un tiers de la surface est dédié à l’activité économique, les deux tiers restants étant réservés à l’habitat, aux équipements et services publics ainsi qu’aux commerces de proximité, organisés autour d’une place. L’opération comprend en tout la construction de 800 logements (dont un minimum de 30 % de logements sociaux), accueillant environ 1 700 personnes, ainsi que 25% d’espaces verts publics. Logiparc, bailleur social sur le territoire du Grand Poitiers, a souhaité participer activement à cette expérience, en proposant notamment la construction de la résidence intergénérationnelle.
2.3 Contraintes, entre autres : obtenir un niveau label Bepos Effinergie 2013
Afin d’être en cohésion avec les enjeux fixés par Grand Poitiers, notamment sur la dimension sociétale, la démarche de Logiparc dans ce programme a été de faciliter la mixité et d’encourager le mieux vivre ensemble. Mixité des populations (logements à destination de militaires, de foyers à faibles ressources, résidence intergénérationnelle) et mixité des typologies de logements (du T1 au T6, en logements collectifs ou maisons individuelles).
D’un point de vue énergétique, la résidence intergénérationnelle devait initialement respecter les exigences du label réglementaire BBC (Bâtiment Basse Consommation) de la RT2005. Après discussion avec la région Poitou-Charentes en 2014, Logiparc a finalement fait le pari ambitieux de suivre les exigences propres au label BEPOS Effinergie 2013.
Solution retenue
Premier bâtiment BEPOS de la région, la résidence intergénérationnelle se compose de 30 logements :
- 14 T2, dont 5 T2 dédiés aux enfants traumatisés crâniens pour le compte de l’ Association des Familles des traumatisés crâniens (AFTC)
- 7 T3
- 5 T4
- 4 T5
Elle dispose en complément d’une salle commune, lieu de vie et de partage pour tous les habitants. Un bureau dédié à Logiparc a été réservé pour aider et accompagner les habitants au quotidien.
3.1 Les atouts de la solution énergétique gaz + photovoltaïque
Afin de permettre et de faciliter le développement de l’éco-quartier, GRDF et le gestionnaire de la ZAC ont signé un contrat de partenariat. Grâce à ces qualités intrinsèques, le gaz naturel est l’énergie retenue pour assurer le confort au sein du logement (production de chauffage et d’eau chaude sanitaire).
Pour satisfaire aux exigences du label BEPOS Effinergie 2013, le choix s’est orienté vers des solutions techniques simples et maitrisées. Ainsi, une chaudière individuelle à condensation double service a été installée dans chacun des logements. En complément, et pour assurer une production locale d’électricité d’origine renouvelable, 352 m² de panneaux solaires photovoltaïques ont été posés en toiture.
Le bâtiment, relativement compact, bénéficie d’une isolation renforcée à l’aide de matériaux traditionnels.
3.2 Chiffres clé de l’étude thermique
Les très bonnes performances de la chaudière individuelle à condensation permettent de respecter l’exigence sur le Cep avant même la déduction de la production d’électricité.
Bbiomax BEPOS Effinergie |
Bbio projet |
48 |
36,4 |
Cepmax BEPOS Effinergie hors PV |
Cep projet hors PV |
46 kWhep/m²SRT.an |
44,9 kWhep/m²SRT.an |
L’exigence sur le bilan en énergie primaire non renouvelable calculé devant être inférieur à un écart autorisé est bien respectée :
Bilan epnr < Ecart autorisé |
||
Consommation 5 usages | 44,9 kWhep/m².an |
46 kWhep/m².an |
Consommations mobilières et immobilières |
70 kWhep/m².an |
70 kWhep/m².an |
Production locale électricité |
75,4 kWhep/m².an |
66 kWhep/m².an |
Total |
39,5 kWhep/m².an < 50 kWhep/m².an |
3.3 Descriptif bâti-système mis en œuvre
PLANCHER BAS | Local non chauffé : 220 mm de béton armé (R = 0,096 m².K/W) + 140 mm d'isolant (R = 3,6 m².K/W) Up = 0,248 W/m².k Sur terre-plein : 60 mm de béton plein lourd (R = 0,03 m².K/W) + 61 mm de polystyrène expansé en isolation sous chape (R = 2 m².K/W) + 120 mm de béton plein lourd (R = 0,03 m².K/W) Up = 0,435 W/m².k |
TOITURE | Toiture terrasse béton plein de 200 mm(R = 0,1 m².K/W) + 120 mm de polystyrène expansé (R = 5 m².K/W) Up = 0,191 W/m².k Combles froid ventilé : 300 mm de laine de verre (R = 7,5 m².K/W) Up = 0,130 W/m².k |
MURS EXTERIEURS | Murs en parpaings de 200 mm + ITI 133 mm doublage PSE (R = 4,10 m².K/W) |
PERMEABILITE | 0,8 m³/h/m² sous 4 Pa |
MENUISERIES | Double vitrage Argon 4/16/4, présence de volet roulant Uw = 1,6 W/m².k - Ujn = 1,4 W/m².k |
CHAUFFAGE + ECS | Chaudière individuelle murale gaz naturel à condensation double service - Puissance nominale : 25 kW |
EMISSION | Radiateurs moyenne température avec robinets thermostatiques |
SURFACE PV | 352 m² de capteurs solaires photovoltaïques situés en toiture (P = 70,63 kWc) injecté à 100% sur le réseau |
VENTILATION | VMC simple flux hygro B |
Evaluations exigées par le label Bepos-Effinergie 2013
4.1 Energie Grise : 67,8 kWh/m²SRT/an, obtenu à l’aide du logiciel ELODIE (pour une durée de vie de 50 ans).
Les postes les plus contributeurs sont les suivants :
- Superstructure – Maçonnerie à hauteur de 39,2%
- Cloisonnement – Doublage – Plafond suspendus – Menuiseries intérieures à hauteur de 24,7%
- Couverture – Etanchéité – Charpente – Zinguerie à hauteur de 12,4%
- Installation solaire photovoltaïque à hauteur de 9,7%
Répartition de la consommation totale d’Energie grise par lot
4.2 Eco-mobilité :
Cette étude permet d'estimer les consommations d’énergie engendrées par les déplacements des utilisateurs de ce bâtiment. Lors de l'évaluation de la performance énergétique d'un bâtiment ou d'un logement, ces consommations sont également à prendre en compte.
Le calcul des déplacements est restreint à celui des usagers du bâtiment dans leurs déplacements quotidiens. La mobilité longue distance, définie dans un rayon supérieur à 80 km, n’est donc pas prise en compte.
Le bâtiment étant construit à proximité des destinations clés et des transports en commun, le potentiel d’éco-mobilité est favorable.
Résultat obtenu par l’outil www.effinergie-ecomobilite.fr
4.3 Consommations mobilières :
Les consommations réglementées (chauffage, refroidissement, eau chaude sanitaire, éclairage, auxiliaires) ne représentent qu’une partie des consommations d’énergies liées à l’usage d’un bâtiment. Par conséquent, il est important d’évaluer les consommations dites mobilières pour les limiter et sensibiliser l’occupant.
L’évaluation des consommations mobilières a été réalisée à partir des ratios surfaciques définis par le Bureau d’Etudes Enertech. Dans le cas présent, les consommations mobilières estimées sont égales à 62,5 kWhep/m².an et se décomposent comme suit :
Autorisé par la commune, le choix d’installer les panneaux en superposition se justifie par :
- Une simplicité d’installation ; dans cette configuration, la pose des panneaux n’impacte pas au bon déroulement du chantier et n’occasionne pas de délais supplémentaires. Lors des travaux, l’électricien a intégré à sa prestation l’installation électrique spécifique à la présence de panneaux photovoltaïques. Lors de la pose de ces derniers, l’installateur a raccordé le ou les capteurs aux câbles en attente.
- Un risque limité sur l’étanchéité de la toiture.
- Un rendement amélioré ; en effet, le rendement est fonction de la température du panneau. Dans le cas d’une installation en superposition, une lame d’air entre le panneau et la toiture est créée permettant d’abaisser la température par ventilation.
Bilan de la réalisation
Chantier lancé en février 2015, la livraison a eu lieu 15 mois plus tard, le 30 Juin 2016 et les premiers occupants ont pris possession de leur logement à partir du 15 Juillet 2016. Ils se sont vus remettre un guide pédagogique dans lequel sont consignés tous les bons gestes et comportements à adopter pour permettre une maitrise de la facture énergétique.
Sur cette opération, le surcout constaté par rapport à un projet RT2012 s’élève à 200 000 € pour 30 logements (soit 6600 €/logement). Néanmoins, une aide mise en place par le conseil régional de feu la région Poitou-Charentes et destinée à financer les 1000 premiers logements passifs ou à énergie positive est venue intégralement compensée ce surcoût. Ainsi, dans le cadre d’un bâtiment labellisé BEPOS Effinergie 2013, le montant de l’aide s’élève à 7000 €/logement (Majoration possible +1000 € si recours en quantité suffisante à des matériaux biosourcés) plafonné à 200 000 €.
La production d’électricité issue de l’installation solaire photovoltaïque est injectée en totalité sur le réseau, générant une rente estimée à 5500 €/an perçue par LOGIPARC.
Enfin, LOGIPARC a décidé de réaliser un suivi de performances sur deux postes - production locale d’électricité par les panneaux et consommations énergétiques dans les logements - afin d’en tirer des enseignements et pour communiquer sur la pertinence de faire le choix de bâtiment à énergie positive.
A noter que 10 logements composant cette résidence intergénérationnelle (T2 – T3) ont été labellisés Habitat Services Séniors, label national.
Témoignages
« L'implantation d'une Résidence Intergénérationnelle est parue comme une évidence dès la phase d'opportunité au regard des caractéristiques techniques et de l'attractivité du site (Eco-quartier). A la dimension sociale et du bien vivre ensemble au sein de ce bâtiment, LOGIPARC a souhaité lui conférer une dimension performancielle en concevant le premier bâtiment d'habitation collectif labellisé BEPOS EFFINERGIE 2013 sur l'ex Région Poitou-Charentes. Cette labellisation a pu être atteinte sans dénaturer la stratégie de l'Office, de maîtriser les coûts d'investissements et de charges pour les locataires en étudiant la compacité du bâti et l'intégration d'équipements performants, connus, simple d'utilisation et à faible coût d'entretien. Cet bâtiment innovant a également suscité une prise de conscience auprès des résidents. Au delà de sa fonction première de proposer du logement social, ce bâtiment d'habitation est aussi perçu comme un outil de production d'énergie.»
Max Olivier Gaudin - Responsable Maîtrise d'Ouvrage du Développement – LOGIPARC
« La résidence intergénérationnelle construite sur la ZAC des Montgorges à Poitiers, devait naturellement s’inscrire dans la transition énergétique et le développement durable, tel un passage de témoin « entre les générations ». Pour souligner cette volonté, notre client a sollicité nos compétences pluridisciplinaires, pour certifier le bâtiment « BEPOS Effinergie 2013 ».
Ce niveau de performance énergétique et environnementale nécessite une ingénierie plus fine. Nous avons souhaité conserver la conception par le bon sens qui nous caractérise, en proposant des systèmes énergétiques fiables, simples à l’utilisation et à l’exploitation, mais néanmoins performants. Nous avons ainsi optimisé les qualités bioclimatiques du bâti en travaillant sur le traitement des ponts thermiques, l’orientation du bâtiment, les surfaces de vitrage, etc.
Afin d’évaluer l’impact environnemental du projet, nous avons déterminé les consommations indissociables du bâtiment tel que la consommation d’énergie nécessaire à la mise à disposition des matériaux de construction (énergie grise), la consommation d’énergie engendrée par les déplacements des futurs utilisateurs du bâtiment (potentiel d’écomobilité) et les consommations d'énergie liées aux usages autres que les usages réglementaires (usages domestiques).
Enfin il nous paraissait logique que la résidence intergénérationnelle participe à la production locale d’énergie renouvelable pour que celle-ci soit produite au plus près des besoins. La toiture est donc couverte de capteurs solaires photovoltaïques. »
Guillaume PRETESEILLE - Chef du service fluides – CETAB Ingénierie - Groupe CETAB
« Pour l'Architecte il est important que les équipements soient correctement intégrés au projet et qu'ils participent à l'architecture du bâtiment. Dans le cas présent, il s'agit d'une demande intervenue en cours d'étude alors que le projet présentait une forme assez aboutie. Pour exemple, lorsque a été formulé le souhait de réaliser un bâtiment BEPOS, il était question de disposer d’une importante surface de panneaux photovoltaïque en partie supérieure des pergolas bois, initialement prévue comme agrément paysagé, situées sur les parkings du rez-de-chaussée. Nous avons immédiatement réagit défavorablement à cette disposition qui présentait le double inconvénient, d'une part d'offrir une la vue directe sur ces panneaux depuis les logements et d'autre part de supprimer une rangée d'arbres susceptibles de faire ombrages aux panneaux. Il a donc été décidé de disposer ces équipements en toiture, constituée d'un bac acier inversé à faible pente et de relevés d'acrotères suffisamment haut pour recevoir ces panneaux et assurer une totale discrétion depuis l'espace public. »
Vincent BRETON, AUA PAUL CHEMETOV - architectes urbanistes associés
Par Ludovic Gutierrez, Responsable Efficacité Energétique Résidentiel - Cegibat
SOURCE ET LIEN
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200 000 euros de surcout payé par le contribuable et 5000 euro dans la poche du maître d'ouvrage ?
Pas mal ! retour sur investissement zero pour le contribuable et 5000 euros par an moins les coûts de maintenance pour la maîtrise d'ouvrage
(nettoyage des panneaux inclus par des professionnel muni d'une habilitation électrique ?)
Au fait quel est le MTBF des panneaux et leur durée de vie probable?