Fluides frigorigènes, ce que change le décret du 13 avril 2011

Par Florence MOULINS, IFFI - INM

Si la plupart des fluides frigorigènes actuellement utilisés ne détruisent plus la couche d'ozone, ils n'en constituent pas moins de puissants acteurs potentiels de l'effet de serre. La législation a donc ces dernières années largement encadré leur utilisation, de sorte à rendre le « potentiel » le moins probable possible. Traduite en France dans le code de l'environnement, la directive européenne relative aux substances appauvrissant la couche d'ozone et aux fluides fluorés participant à l'effet de serre se voit intégrée au fur et à mesure ; les dernières mesures ont été publiées ce printemps au travers du décret 2011-396 du 13 avril 2011.

1°/ Les fluides frigorigènes deviennent des déchets

Climatiseurs



Jusque là exclus du champ d’application, les fluides frigorigènes font désormais partie intégrale du processus – et des procédures, de gestion des déchets. Le décret les assimile maintenant comme tels, et ils devront à ce titre faire l’objet d’un bon de suivi (BSD).

Nouvelle formalité à respecter pour toute personne conduite à transférer du fluide frigorigène à un tiers, y compris pour le transporteur.

En termes clairs, cela signifie que lorsqu’un installateur par exemple récupère ou reprend du fluide sur un site, il doit en plus de ses obligations déjà existantes en termes de suivi et de déclaration, observer les règles relatives au transfert des déchets.

2°/ Les brasures sous contrôle

Nombre de chantiers font appels à des tuyauteurs – soudeurs pour la mise en place des tuyauteries frigorifiques, laissant au frigoriste le soin du contrôle d’étanchéité et de la charge en fluide. Si les textes précisaient les conditions de manipulation des installations contenant du fluide, ils ne faisaient toutefois pas mention de l’assemblage. C’est désormais chose faite, puisque le décret précise qu’une entreprise certifiée pour les opérations de brasage fort, brasage tendre ou soudure pourra intervenir, sous réserve que son activité soit encadrée par un opérateur disposant de l’attestation de capacité relative à la manipulation des fluides frigorigènes. Notons à ce sujet que la profession concernée fait elle-même l’objet de réglementations strictes.

3°/ La définition des opérateurs

Technicien frigoriste

Afin de laisser la possibilité au personnel des entreprises de manipuler les fluides dans l’attente de la date d’application définitive de la réglementation (5 juillet 2011), une solution transitoire avait vu le jour ; celle-ci permettait au personnel manipulant les fluides de bénéficier d’une attestation provisoire en fonction de critères essentiellement liés à la formation et à l’expérience. Ces attestations provisoires, compte tenu de leur caractère spécifique, n’avaient de valeur qu’à l’intérieur du pays concerné. Il en va différemment pour les attestations d’aptitudes définitives puisque celles-ci répondent aux critères de l’Union européenne.

Le code de l’environnement a donc vu dans ses textes s’ajouter à la notion d’attestation de capacité des opérateurs celle de certificat équivalent délivré dans un des pays de l’Union européenne et traduit en français. Si d’ores et déjà, et conformément à la directive européenne, les certificats de conformités étaient valables au sein de l’UE quelle que soit leur origine, le décret du 13 avril en précise les termes pour l’hexagone, en rendant obligatoire une mesure prévue par le règlement européen et laissé comme possibilité – la traduction du certificat dans la langue du pays dans lequel intervient l’opérateur.

Ainsi, une entreprise européenne étrangère ne pourra intervenir sur le sol français que dès lors que le certificat de conformité dont elle dispose est clairement traduit en langue française.

Par ailleurs, le règlement européen n’admet – ainsi que décrit dans le code de l’environnement, que des certificats de conformité et attestations d’aptitude délivrés par des organismes agréés à l’exception de toute autre forme. Qu’en est-il donc des diplômes délivrés par les établissements scolaires et organismes de formation ? En effet, pour qu’un jeune diplômé puisse être apte à manipuler les fluides – ce qu’il a appris lors de sa formation, il doit également disposer de l’attestation d’aptitude, celle-ci ne va toujours pas de pair avec le diplôme obtenu. Cette incohérence devrait être traitée ; toutefois, et à ce jour, rien n’indique encore que les diplômés 2012 bénéficieront de l’attestation avec leur diplôme.

4°/ Aides aux TPE

Nombre de petites entreprises ont du retard sur le programme de certification, ses salariés n’étant pas toujours tout ou partie, attestés. Le coût de l’opération représentant également un frein pour ces petites structures, le Ministère du Développement Durable, du Transport et du Logement (MEDDTL) - afin de lever cet obstacle, a signé une convention avec l’Association Française du Froid (AFF). Le but de cette convention est la mise en place de programmes de formation – pilotés par l’AFF, et financés partiellement par l’Etat. Cette convention cible les entreprises de 10 salariés maximum, disposant déjà d’une attestation de capacité pour les catégories d’activité I à IV, pour lesquelles le coût sera de 50 euros par participant. Les formations seront dispensées par les organismes suivants : APAVE, COPROTEC et CRISTAL FORMATIONS.

5°/ Déclaration des flux

Le décret du 13 avril apporte également quelques précisions sur le sujet. Il modifie quelque peu les termes utilisés pour la déclaration des flux, encadrant ainsi mieux le sujet.
On peut noter aussi que la date butoir de déclaration des opérateurs auprès des organismes agréés du 31 janvier a disparu. De même, un peu plus loin, l’ADEME est clairement identifiée comme destinataire potentiel de la liste des opérateurs titulaires de l’attestation de capacité, alors que dans les faits c’est déjà le cas, au travers de la déclaration des producteurs et distributeurs de fluide frigorigène et des organismes agréés auprès de l’observatoire des fluides frigorigènes.

Simplification des faits ; on peut en effet imaginer que dans la mesure où finalement, c’est la date de déclaration à l’observatoire qui importe (31 mars), les collecteurs d’information peuvent bien s’organiser comme ils le souhaitent.

6°/ Sanctions pénales accrues pour les distributeurs

Dans ce domaine également, une distinction s’est glissée. Alors que dans la version précédente du code, les distributeurs étaient passibles d’une amende de classe 3 pour défaut de validation de l’attestation du destinataire du fluide, c’est désormais une amende de classe 5 qu’ils encourront, soit un montant de 1500 euros au lieu de 450 euros, mais qui peut aussi dès lors s’additionner d’une peine sanction-réparation, fixée par la juridiction.

7°/ Et à suivre … un projet de décret concernant la vente des équipements

Si le code de l’environnement fixe les règles applicables à la manipulation des fluides frigorigènes et leurs flux, aucune mention n’était faite quant à la commercialisation des équipements. Un projet de décret encadrant les conditions de mise sur le marché des équipements de climatisation, réfrigération ou pompes à chaleur préchargés contenant ces fluides est en cours de consultation. Il sera applicable aux équipements dont la mise en service nécessitera l’intervention d’un opérateur, et limitera leur vente aux professionnels autorisés ainsi qu’à toute personne démontrant qu’elle respectera les règles applicables à leur mise en service.

8°/ En résumé

Touches par touches, le code de l’environnement dans sa partie particulière liée aux fluides frigorigènes pour les marchés du Froid et du Génie Thermique évolue. Au fil des dates d’application des mesures - ce qui est normal, mais également en précisant et encadrant davantage les utilisations potentielles liées aux fluides. Ce sont certes des contraintes supplémentaires que l’on peut y voir, mais aussi le resserrement incontournable autour de professionnels dont la qualification est non seulement certifiée mais obligatoire pour les utilisateurs.

Décret du 13 avril 2011
relatif à des substances appauvrissant la couche d'ozone et à certains gaz à effet de serre fluorés, aux biocides et au contrôle des produits chimiques

Par Florence MOULINS, IFFI - INM, qui intervient au travers de son expérience de plus de 20 ans dans les métiers du froid, du génie climatique et énergétique.
flomoulins(at)yahoo.fr

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Projet de décret relatif à des équipements contenant certains gaz à effet de serre fluorés utilisés comme fluides frigorigènes.

Commentaires

  • merlin
    0
    23/01/2012

    comment les fluides frigorigènes contribuent au réchauffement climatique, quel est la veritable particule ennemi de ozone dans les cfc


  • Yves
    0
    17/01/2012

    - Après 30 années d’expérience, de recherche et d’observation, sur les pompes à chaleur et notamment les pompes à chaleur air/eau, je vous livre mes remarques mes impressions voir même mes conseils.
    - Une impressionnante quantité de gaz frigorigènes de différente nature on été dispersée dans la nature par manque de formation et donc de compétence du personnel chargé de manipuler ces gaz.
    - Par contre bon nombre de machine chargées en gaz dans les usines de fabrication. (pompes à chaleur monobloc) ont posées peu de problème.
    - Je pense qu’il est grand temps de laisser au plombier chauffagiste la mission de faire du chauffage et pas « de la frigo ».
    - Pour cela il faut concevoir un maximum de PAC air/eau monobloc, avec un circuit frigorifique rendu pratiquement inaccessible, pour que les plombiers chauffagistes soient déchargés de cette mission de frigoriste qui ne peut pas s’exercer d’une façon sérieuse sur un chantier de chauffage.
    - Le réfrigérateur de la ménagère dont le circuit frigorifique est inaccessible ne pose aucun problème. Alors qu’attend on pour faire de la PAC une machine pour chauffer sans souci.


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