Par Florence Moulins, Expert - Cemafroid, AFF – AICVF et Eric Devin, Directeur Général - Cemafroid, IIF - AFF
Au 1er juin 2015, est rentré en vigueur le décret n° 2014-285 du 3 mars 2014 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement.
S’appuyant en grande partie sur la directive dite « Seveso III » ce texte conduit à une modification du numéro de rubrique relativement aux substances.
Ainsi, par exemple, la rubrique concernant les gaz à effet de serre et les substances qui appauvrissent la couche d’ozone ne s’appelle plus « 1185 » mais « 4802 ».
Cette rubrique a fait l’objet d’une modification dans le contenu de ses prescriptions générales, au travers de l’Arrêté du 4 août 2014 relatif aux applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement soumises à déclaration sous la rubrique no 1185.
Qu’est-ce que cela induit pour la profession ?
Installation Classée pour la Protection de l’Environnement
Une Installation Classée pour la Protection de l’Environnement (ICPE) est une installation fixe dont l’exploitation présente des risques pour l’environnement - au sens large du terme, car elle présente des caractères potentiellement dangereux ou incommodants pour le milieu dans lequel elle se situe.
La terminologie complète se trouve dans l’article L511-1 du code de l’environnement et définit les ICPE comme « usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. »
La réglementation classe les ICPE en fonction de leur activité propre ou des substances que l’activité les conduit à employer. Ce classement est lui-même scindé en rubriques et chaque rubrique peut comporter plusieurs paragraphes, fonction du niveau de dangerosité ou de risque. Le niveau de danger et/ou de risque conduit à une déclaration, une déclaration assortie d’un contrôle périodique, un enregistrement ou d’une autorisation auprès de la préfecture. La réglementation comporte un nombre considérable d’ICPE ; celles qui concernent les métiers du froid et du conditionnement d’air sont heureusement pour nous peu nombreuses.
Installation, risque et danger …
Au sens de la réglementation, une installation est un site, pouvant comporter une ou plusieurs installations de production de froid par exemple.
Un danger est la propriété intrinsèque d’un équipement, d’un agent - chimique, biologique …, généré par les activités ou utilisé dans les procédés de fabrication d’une organisation et susceptible de causer un dommage.
Le risque correspond aux conditions et qui permettent à ce danger de se manifester ; le niveau de risque dépend des critères de ces conditions.
Fluides frigorigènes relevant de la rubrique 4802 (ex 1185)
Cette rubrique concerne les « Gaz à effet de serre fluorés visés par le règlement (UE) n° 517/2014 ou substances qui appauvrissent la couche d'ozone visées par le règlement (CE) n° 1005/2009 (fabrication, emploi, stockage) ».
Elle scinde les activités de fabrication, conditionnement et emploi particuliers (paragraphe 1), de celles d’emploi dans des équipements clos en exploitation (systèmes de réfrigération – paragraphe 2a ou d’extinction – paragraphe 2b) et de stockage de fluides vierges, recyclés ou régénérés sauf stockage temporaire (paragraphe 3). Nous nous intéresserons particulièrement au paragraphe 2a.
Alors que le texte précédent demandait une seule déclaration pour les « équipements frigorifiques ou climatiques (y compris pompe à chaleur) de capacité unitaire supérieure à 2 kg, la quantité cumulée de fluide susceptible d'être présente dans l'installation étant supérieure ou égale à 300 kg », l’arrêté du 4 août 2014 assortit cette déclaration d’un contrôle périodique.
Son application est entrée en vigueur au 1ier janvier 2015 ; les prescriptions applicables font l’objet de l’annexe... On note l’intégration de nouvelles réglementations (inspections périodiques de systèmes de climatisation et pompes à chaleur réversibles de plus de 12 kW par exemple) et l’harmonisation avec l’évolution de certaines autres (CTP systèmes frigorifiques, EN378, ...)
Liste des principales prescriptions à suivre et points de contrôles
Les prescriptions applicables décrites dans l’annexe sont plus précisément relatives à la protection des personnes (points 2 à 4) et de l’environnement (5 à 8).
On notera que l’arrêté, applicable aux installations – au sens ICPE, comportant plus de 300 kg de fluide impose des prescriptions particulière lorsque ces 300 kg sont contenus dans un seul et même système frigorifique (équipement) et en particulier lorsque ce fluide est toxique et inflammable. Si encore à ce jour les fluides frigorigènes concernés par la rubrique ne le sont pas, ce ne sera peut-être plus le cas avec l’arrivée sur le marché des fluides à faible GWP et présentant pour nombre d’entre eux des caractéristiques d’inflammabilité (l’ammoniac fait l’objet d’une autre rubrique – 4735).
- Dispositions générales
L’exploitant doit établir et tenir à jour un dossier, tenu à la disposition de l’inspection des installations classées. Ce dossier comporte à minima les informations suivantes ; les points en gras et italique ont été ajoutés à la liste.
- les plans tenus à jour ;
- le récépissé de déclaration et les prescriptions générales ;
- le schéma général de tuyauteries et d’instrumentation de l’installation ;
- le rapport d’inspection relatif aux inspections périodiques des systèmes de climatisation et pompes à chaleur réversibles, dont la puissance nominale est supérieure à 12 kW (ICP).
La présence de ces documents fait l’objet du contrôle ; toutefois, le contrôle vérifiera également l’adéquation entre la quantité cumulée de fluide susceptible d’être présente dans l’installation (au regard de la capacité unitaire des équipements) et de la quantité cumulée de fluide déclarée ainsi que la conformité des informations transmises au préfet quant aux fluides présents. Ces 2 derniers points, comme la présence du schéma général de tuyauterie et d’instrumentation relèvent d’une non-conformité majeure en cas de non-respect.
- Implantation – Aménagement
Lorsqu’une installation comporte un équipement contenant à lui seul plus de 300 kg de fluide toxique ou inflammable, cet équipement doit être implanté et maintenu à une distance d’au moins 5 mètres des limites de l’établissement (distance mesurée à partir du local de compression ou de l’équipement extérieur), sauf dérogation préfectorale en cas de justification d’absence de risque pour les tiers ou si la mise en service de l’équipement consiste exclusivement en un raccordement à un réseau électrique (équipements monoblocs). De plus, ces installations ne doivent en aucun cas être surmontées de locaux habités.
Le bâtiment ou le local de compression abritant l’installation comportent des murs extérieurs et murs séparatifs de classe REI 120 et des portes et fermetures résistantes au feu (y compris celles comportant des vitrages et des quincailleries) et leurs dispositifs de fermeture EI 120.
Ces 3 points font l’objet du contrôle et leur non-respect relève de non-conformités majeures.
- Exploitation et entretien
L’accès à la salle des machines, l’inventaire des équipements comportant plus de 2 kg de fluide et leur étiquetage (nature et quantité de fluide) sont également requis et contrôlés. Le non-respect de la tenue du registre de dégazage fait l’objet d’une non-conformité majeure.
- Risques
La présence de plans de locaux avec descriptions des dangers associés, l’implantation des extincteurs, la présence d’un système de détection et d’alarme (uniquement pour les l’installation comprenant un équipement contenant à lui seul plus de 300 kg de fluide toxique ou inflammable), y compris les moyens d’alerte des services d’incendie et de secours sont contrôlés ; l’absence d’extincteur relève d’une non-conformité majeure.
A minima, les consignes relatives aux procédures d’arrêt d’urgence et de mise en sécurité de l’installation (électricité, réseaux de fluides notamment) et les mesures à prendre en cas de fuite sur un récipient ou une tuyauterie contenant des substances dangereuses sont présentes et connues du personnel. La présence de ces consignes, l’état du calorifugeage et l’étanchéité des tuyauteries sont également contrôlés.
- Prescriptions environnementales ; eau, air, déchet et bruit
Les exploitants de pompes à chaleur sur forage (sont exclues de ce champ les installations relevant du code minier), doivent attester de la non-contamination des eaux utilisées. La présence d’un dispositif anti-retour en cas de raccordement à une nappe comme la présence du document attestant la non-contamination sont contrôlés (le non-respect de ces points relève de non-conformités majeures).
Concernant la protection de l’air, les contrôles visent la présence des justificatifs attestant de la réalisation des contrôles d’étanchéité (le non-respect de ce point relève d’une non-conformité majeure).
La présence du registre des déchets (entrants ou sortants le cas échéant) tenu à jour et des bordereaux de suivi de déchets et des documents justificatifs de traitement, sont contrôlés.
Les niveaux sonores peuvent faire l’objet de mesures en cas de plainte. La réglementation applicable (arrêté du 23 janvier 1997) prend en compte comme date de référence la date de déclaration de l’installation.
Les contrôles périodiques
L’objectif des contrôles est d’informer et d’assurer les exploitants d’installations soumises à déclaration de la conformité de leur installation avec les prescriptions réglementaires.
Les contrôles sont réalisés par un organisme agréé et sont réalisés tous les 5 ans. Leur coût est à la charge de l’exploitant.
Les installations nouvellement déclarées doivent faire l’objet du premier contrôle dans les 6 mois qui suivent leur mise en service.
L’administration n’est pas destinatrice du rapport de contrôle ; dans le cas d’une non-conformité majeure, l’exploitant doit envoyer un échéancier de mise en conformité. Une saisine de l’administration est prévue en cas d’absence d’envoi de celui-ci, de non réalisation d’un nouveau contrôle ou de maintien du constat après un nouveau contrôle.
Le contrôle ne peut être effectué que par un organisme ayant fait l’objet d’un agrément ministériel ; L’exploitant peut s’adresser à l’organisme agréé de son choix. Les organismes de contrôle sont agréés par le ministre chargé de l’écologie, une accréditation sur la base de la norme NF EN ISO/CEI 17020 est exigée afin de s’assurer de leur compétence technique et de leur indépendance vis-à-vis des exploitants.
La périodicité des contrôles est fixée à 5 ans sauf pour les installations dont le système de management environnemental a été certifié conforme à la norme internationale ISO 14001 par un organisme accrédité, couvrant l’activité de l’installation, pour lesquelles elle est de 10 ans.
Une installation soumise à déclaration avec contrôle périodique incluse dans un établissement dont l’une des installations est soumise à autorisation ou enregistrement n’est pas soumise aux contrôles périodiques puisque que le site est inspecté au titre de l’autorisation.
Le contrôle ne peut porter que sur les seules dispositions réglementaires déterminées par les arrêtés de prescriptions générales pris en application de l’article L. 512-10 du code de l’environnement pour chaque rubrique concernée.
Conclusion
La mise à jour de l’arrêté relatif aux prescriptions applicables à la rubrique 1185/4802 a donné lieu à des précisions spécifiques aux fluides frigorigènes concernés, mais surtout à la mise en place de contrôles périodiques.
Si les exploitants restent les premiers intéressés, il va de soi que l’information doit également transiter par la profession qui est concernée en premier chef par le respect de nombre de prescriptions.
L’arrêté du 4 août 2014 a par ailleurs fait la part belle à la prise en compte des réglementations en cours ; la conformité des installations devrait dès lors, n'être qu’une formalité !
Décret n° 2014-285 du 3 mars 2014 modifiant la nomenclature
des installations classées pour la protection de l'environnement
Décret n° 2014-285
Par Florence Moulins, Expert - Cemafroid, AFF – AICVF et Eric Devin, Directeur Général - Cemafroid, IIF - AFF
SOURCES ET LIENS
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