Par Roger CADIERGUES le 04 Juillet 2019
Dans les deux dernières lettres nous avons commencé à aborder le problème de la réglementation thermique telle qu'elle se présente actuellement. J'ai eu le malheur de dire qu'on pouvait faire nettement mieux : me voici au défi de le démontrer, ce que je vais essayer de faire.
Qu'entendez-vous par bien mieux ?
La mise en place d'une procédure présentant les avantages suivants
:
1. l'élimination d'études inutilement coûteuses,
2. la suppression de calculs fastidieux et inutiles,
3. l'atteinte de résultats bien plus performants,
4. la facilité de doser économiquement les mesures choisies,
5. de grandes et effectives facilités offertes à tous les intervenants
de terrain,
6. l'inutilité de tout contrôle (lequel n'est d'ailleurs pas fait
actuellement) la responsabilité normale des constructeurs et installateurs
suffisant.
Une telle liste est "vertigineuse" : n'est-ce pas "pousser le bouchon" un peu trop loin ?
Absolument pas. Partez du principe que les calculs compliqués sont éliminés au niveau de chaque projet : les points 1 et 2 sont satisfaisants. Ce qui peut vous surprendre c'est qu'on puisse ainsi atteindre des résultats plus performants. Ma démonstration sera simple : dans tous les projets actuels (ou presque tous) chaque responsable conscient se rend compte qu'on peut faire beaucoup mieux que ce qu'exige la RT. Je pense que cette démonstration suffit. Et qu'elle montre bien l'un des défauts criants des démarches actuelles. Tous les autres points, 4, 5 ou 6, en découlent.
Comment estimez-vous possible d'opérer face à la réglementation, obligatoire par essence ?
Bien entendu c'est l'obstacle (absurde) le plus apparent. Lorsque est parue,
en France, la première réglementation "thermique" j'ai
plaidé pour que les spécifications soient "éclatées".
C'est-à-dire que par exemple pour le chauffage on devrait simplement
spécifier, outre l'isolation thermique des locaux : les caractéristiques
minimales des équipements pris un par un (ex. l'isolation minimale des
tuyauteries de chauffage). C'est ce que j'appelle les spécifications
"éclatées", que je conseille tout simplement d'appliquer
hors de tout calcul savant. Vous obtiendrez facilement de bien meilleurs résultats
… sauf, peut-être, en isolation des bâtiments pour laquelle
la réglementation thermique :
- ne joue pas complètement le jeu des spécifications globales,
- et devient probablement l'origine essentielle des surcoûts qui font
de plus en plus peur.
Est-ce que, justement pour l'isolation des bâtiments la RT n'applique-t-elle pas vos principes ?
Pas vraiment, voyez ce qui s'est passé. Pour l'isolation il a d'abord été décidé d'abandonner les spécifications "éclatées", par exemple des coefficients maximaux pour les murs, les terrasses, les fenêtres, etc ..., ce qui était ma proposition. Et l'on a choisi un critère global : le coefficient G [W/m³ K]. Puis comme cette spécification s'était tout simplement traduite par une réduction des surfaces de fenêtres (sans améliorer l'isolation de ces dernières) on a commencé à "corriger", et on a introduit le coefficient B, et ce afin de faire intervenir un petit peu l'ensoleillement. Avec quelques conséquences architecturales regrettées quand même. D'où, finalement, dans les textes actuels, selon une démarche prônée depuis longtemps en Belgique, une spécification globale plus neutre (architecturalement) : le coefficient UBât. Elle vous permet de choisir une architecture aussi compliquée que vous le souhaitez, le développement (éventuellement débridé) des surfaces extérieures ne jouant plus aucun rôle. Dans les textes du moins, car dans la réalité c'est tout autre chose.
Peut-on, vraiment, faire autrement ?
Notez d'abord que tout ce que je viens de dire ne concerne que l'isolation des bâtiments (un sujet relativement facile) : les déconvenues pour le reste (l'équipement) n'ayant pas tardé à apparaître. En réalité, si vous assurez correctement votre travail de conception, les résultats atteints sont très supérieurs à ce qu'exigent les textes. Ne me faites pas dire par là qu'il faut alors privilégier les labels : ce sont des hochets qui soufrent des mêmes difficultés (le calcul) et qui en ajoutent d'autres (des objectifs arbitraires, sans véritable optimisation économique).
Roger CADIERGUES